Quand on est à Oujda, on est forcément abreuvé d'infos aussi variées que contradictoires. La drogue, le trafic de faux billets, le nombre d'Algériens y résidant, les marchandises saisies, la rumeur annonçant la (ré)ouverture de la frontière… et autant de sujets qui meublent l'actualité de cette “Algérie d'outre-terre”. Nous avons voulu faire le point avec le responsable local, M. le “mouhafadh”, le wali en l'occurrence. Nous nous présentons donc au siège de la “âamala” sis, boulevard El-Zerktouni, pour demander une entrevue. L'agent nous réclame les papiers et s'engouffre dans le couloir fermant derrière lui la porte capitonnée. Ce doit être le bureau du cabinet. Quelques minutes après, notre homme ressort flanqué d'un responsable en costume gris souris qui, au passage, nous a bien dévisagés, avant de rentrer dans un bureau à côté. Notre visite semble visiblement dérangeante. Le sujet est sensible. Il risque même d'être compromettant, à voir toute la méfiance, la délicatesse qui entoure notre contact d'avec les autorités de la wilaya. A plus forte raison pour un fonctionnaire de la monarchie. L'agent nous invite à rentrer dans le même bureau. Le directeur de cabinet — un jeune plutôt affable — laisse d'emblée s'échapper sa surprise de voir un journaliste algérien débarquer comme ça, pour parler des relations algéro-marocaines. “Vous êtes descendus dans quel hôtel ?”, interroge-t-il. “Les Lilas”, avons-nous répondu. Les présentations faites, nous demandons s'il était possible d'entretenir M. le Wali. Le jeune fonctionnaire, l'air plus serein, dit que “normalement, c'est très faisable” et il a promis de nous arranger un rendez-vous dans l'après-midi. 16h00 tapantes, nous pointons au cabinet. Quelle ne fut notre surprise d'apprendre que l'entretien était “impossible”. Le chef de cabinet, franchement désolé, a eu bien du mal à expliquer les raisons de ce faux bond. “Vous savez, M. le Wali a beaucoup de travail à faire aujourd'hui, donc il ne peut, hélas, vous recevoir”, dit-il sans conviction. Il esquisse un sourire comme s'il m'invitait à ne pas croire cette version “diplomatique”. Nous lui proposons alors de le rencontrer le lendemain (jeudi 25 avril). “Impossible non plus”, réplique-t-il, ajoutant qu'il nous fallait aussi une autorisation du ministère de l'Intérieur. Pourquoi ? “M. le Wali va recevoir un ministre.” “Quel ministre ?” “Celui de la Pêche…”, précise notre interlocuteur, le sourire au coin. Il fallait donc comprendre qu'il est inutile d'attendre. Que ferait donc un ministre de la Pêche à Oujda ? Le lendemain, aucun représentant du gouvernement Jettou n'a pointé le nez à Oujda, bien sûr. Point de banderoles ni d'affiches annonçant l'arrivée du “Wazir”. C'était juste un expédient. Le wali s'est tiré d'affaire. Pas d'entretien, pas de déclaration et pas de chiffres. Nous devons nous contenter de la radio-trottoir pour raconter Oujda. H. M.