C'est tard dans la nuit de lundi à mardi que la cour de justice de Sidi M'hamed a rendu son verdict dans l'affaire des personnes accusées d'avoir porté atteinte à l'unité nationale en brandissant un drapeau autre que l'emblème national au cours des manifestations du vendredi à la Grande Poste d'Alger. Ainsi, 21 personnes ont été condamnées à une année de réclusion dont 6 mois avec sursis et une amende de 30 000 dinars algériens, avec confiscation des objets qu'ils avaient en leur possession lors de leur arrestation. La séance au tribunal de Sidi M'hamed à Alger a duré la journée complète du lundi. Le procès de 20 autres personnes- 11 sous mandat de dépôt et 9 sous contrôle judiciaire- pour les mêmes raisons a été reporté au 18 novembre en cours. La rue adjacente à la cour de Sidi M'hamed a connu dès les premières heures du procès une affluence de citoyens dont la majorité étaient des proches des personnes jugées et demandant leur libération immédiate, en présence d'un déploiement de la police chargée d'assurer la sécurité sur les lieux. Hier, dans la journée, six nouveaux verdicts ont été prononcés contre six manifestants accusés d'avoir porté la «bannière amazigh». En détention provisoire au niveau de la prison d'El Harrach depuis prés de quatre mois, ils ont été condamnés à six mois de prison ferme, et 20.000 Dinars d'amende pour «détention d'un drapeau autre que le drapeau national de nature à porter atteinte à l'unité nationale». Le procès des personnes accusées d'avoir porté atteinte à l'unité nationale, a eu lieu dans un contexte dominé par la perspective de l'élection présidentielle du 12 décembre dont le processus est à une phase avancée puisque la liste des candidats au nombre de cinq est maintenant connue et que la campagne électorale, qui doit commencer le 17 novembre, est en préparation active au niveau des équipes des candidats. Ainsi, un des cinq candidats, Abdelmadjid Tebboune, a rendu public, samedi, son programme électoral, placé sous le thème «Engagés pour le changement, capables de le réaliser» qui comporte 54 engagements pour l'instauration d'une «nouvelle République». Il s'engage à «édifier une société civile libre et active en mesure d'assumer sa responsabilité en tant que contre-pouvoir, mettre en application un plan d'action au profit des jeunes régi par un cadre réglementaire incluant des mesures permettant de transmettre le flambeau à la jeunesse, et à consolider les composantes de l'identité nationale, à savoir: l'islam, l'arabité et l'amazighité". Le lendemain, dimanche, c'était le président du parti Talaie El Houriyet, Ali Benflis qui présentait les grandes lignes de son programme électoral sous le slogan «Notre serment pour l'Algérie», et affirmait qu'il visait à «opérer un changement global dans la perspective de réaliser la modernisation politique, économique et sociale du pays». Il a saisi l'opportunité pour affirmer que son programme d'urgence était mû par le devoir de sincérité, de franchise et de vérité, insistant sur son caractère pragmatique, réaliste et réalisable. Les «anti-élection» étaient, pour leur part, quelques centaines, dont très peu d'étudiants, à manifester hier mardi à la Grande Poste à Alger, dans la cacophonie habituelle de slogans fantaisistes et au contenu sans signification aucune. Selon de nombreux observateurs, qui suivent l'évolution du hirak depuis son début, l'activisme des courants extrémistes a conduit à la démobilisation d'une proportion importante des citoyens qui avaient l'habitude de venir au rendez-vous du vendredi à la Grande Poste et qui ne trouvent plus de raisons de le faire pour entendre les slogans fantaisistes et irresponsables des extrémistes. Ils ont observé et souvent dénoncé la tentative d'infiltration des marches populaires par une infime minorité de manifestants brandissant des drapeaux autres que l'emblème national. En fait, l'approche consensuelle du hirak, après avoir obtenu gain de cause sur ses principales revendications, avec l'appui de l'institution militaire, consiste depuis quelques semaines, à militer pour une sortie de crise à travers l'élection présidentielle. La télévision algérienne a commencé à montrer les images de manifestants dans plusieurs villes qui scandent des slogans favorables à l'élection présidentielle du 12 décembre et à la démarche de l'institution militaire dans la sortie de crise par la voie constitutionnelle.