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Misères de la presse, presse de la misère
Actualité
Publié dans La Nouvelle République le 12 - 09 - 2020

Les médias représentent les sens cognitifs de la République et la boussole de l'opinion publique. Pourtant, le journalisme se meurt de deux poisons d'égale virulence. En premier lieu la rente qui a acheté la conscience de la profession, en particulier certains directeurs de médias et leurs actionnaires. Ensuite, l'invasion du politique qui cherche à contraindre puérilement les journalistes et les évolutions inéluctables imposées par de nouveaux formats technologiques. Au lieu de rapports renégociés, dans un domaine en constante évolution, la nature même du politique lui fait préférer la hiérarchie des ordonnancements ressemblant à l'Etat, là où les TIC privilégient l'échange d'inspiration sociétale. Les politiques tiennent en laisse la presse nationale par la publicité des annonceurs publics, distribuée de manière discriminatoire, au gré des amitiés coupables, de compromissions de toutes natures, de soutiens intéressés sur le dos de la vérité due aux lecteurs. Ce sont les mêmes, agents cancérigènes de la bureaucratie d'un Code de l'information établi en dehors de ceux qui en vivent, exerçant des pratiques dignes des mœurs de la féodalité d'une époque lointaine, qui viennent nous expliquer doctement que les fake-news sont à proscrire sans voir la véritable gangrène qui ronge ce métier de l'artisanat intellectuel. Nous n'osons même pas aborder ici le rapport informationnel inégal qui nous est imposé depuis des lustres par les grands groupes médiatiques internationaux, véritables industriels propagandistes des intérêts de leurs Nations, alors que dans nos pays, nous nous débattons tant bien que mal, pour maintenir ce qui pourrait ressembler de loin à une vie médiatique. Les journalistes ne vivent pas de leur métier. Ce sont des militants de la culture, convaincus que les activités intellectuelles sont la source essentielle des progrès d'un peuple et une condition majeure d'une vie démocratique saine permettant des renforcements du consentement national libre, en leviers de développements de tous ordres qu'une action publique intelligente saurait mettre en œuvre par ailleurs. Mais l'altruisme possède des limites. Est-ce un simple effet du hasard si en Algérie l'information s'est effondrée avec les cours du baril ?
Si le journalisme, comme aiment à se le répéter les professionnels de la plume, mène à tout à condition d'en sortir, en Algérie cet adage est largement inversé. Le journalisme dans notre pays conduit à tout à condition d'y rentrer, surtout aux compromissions sur le dos de l'éthique. C'est ainsi que pullule une faune humaine qui n'a que faire du journalisme mais qui est bien plus intéressée par l'odeur alléchante de la redistribution de la rente pétrolière via l'ANEP d'une part et les imprimeries d'Etat d'autre part. La première répartie les chèques des annonceurs, les secondes des dettes négligemment oubliées en un sur tirage déguisé en invendus, négociés au poids du papier pour finir dans le financement doré du journalisme rentier, à coups de subventions dévoyées et de retro commissions douteuses. Ici comme ailleurs, ce n'est pas le travail sur l'information qui est promu, en soutien à un métier noble, mais les instruments multiples qui en permettent l'encadrement restrictif.
Cette limitation du libre arbitre journalistique – fondement de la compréhension du monde que possède l'intellectuel en écriture – est parfaitement illustrée par le langage administratif en cours au ministère de l'Information. Les bureaucrates se plaisent à parler de «secteur de l'information» comme si l'information, d'essence universelle – car elle est la matière première qui soutient la communication nécessaire aux intégrations sociales de tous types – pouvait être «secteurialisée» ? Nous sommes ici au cœur du hiatus qui sépare le journalisme professionnel de l'éthique exigeante, d'avec le journalisme des nécessités prosaïques pour ne pas dire bassement pragmatiques. L'information ne peut exister en plénitude, au sens social, que si elle est librement produite, assumée et consommée. Nous ne sommes bien évidemment pas de ceux qui pensent que le délit de presse n'existe pas. Notre profession se doit de se plier à des conventions sociales et culturelles qui fondent la morale et l'éthique dans nos sociétés, intimement liées aux droits de la personne, des us et coutumes, des mœurs et de l'intérêt général bien compris.
La confusion des genres tue le journalisme
Cela étant dit, l'information n'est pas ministrable car elle est par essence libre de toute contrainte, étant elle-même la production consubstantielle de l'activité de l'homme d'abord marquée par la supériorité de l'intellect sur l'instinct. L'activité gouvernementale peut par contre se doter d'un «secteur de la communication» pour faire la publicité légitime de ses actions. Tout le reste devrait être soumis au régime du respect des libertés individuelles et publiques qui fondent les véritables sociétés démocratiques. Et si des dépassements se signalent de temps à autres, des instances de régulation comme l'Arav (nous aurions préféré l'institution d'une commission d'éthique animée par des professionnels) ou la Justice pour des cas sévères de manquements à l'éthique professionnelle, sont là pour y remédier. La première pour rappeler à l'ordre des directions de média peu scrupuleuses, la seconde pour donner réparation morale et dédommagements conséquents, aux plaignants victimes médiatiques, aux fins d'exercer un effet de dissuasion sur ceux qui confondent la dignité morale d'une action en information et des règlements de comptes de bas étages. La communication est à l'information, ce que l'argent sale est à la politique. Le mélange des genres amène aux effondrements irrémédiables, des Etats comme nous étions à deux doigts de le vivre en 2019 en Algérie, des médias comme nous pouvons désormais en témoigner.
Cet écroulement n'est pas seulement dû aux évolutions irrépressibles portées par la révolution numérique. Il est d'abord le signe que cette profession s'est vidée de sa substantifique moelle pour faire place aux bonimenteurs et aux discussions du café du mauvais commerce. Ceux qui se font une haute idée de leur métier, ne peuvent en aucun cas accepter d'évoluer dans de tels milieux interlopes et préfèrent sagement rester à la marge des marécages nauséabonds de ce système de la rente politico-médiatique afin de ne jamais croiser les gestionnaires ventripotents érigés en maître des consciences de la médiocrité écrite et audio-visuelle d'hier, électronique de demain. Pour que la situation change, il est d'abord nécessaire de reprendre les choses à l'endroit où elles furent abandonnées. Dans la formation des journalistes en toute première instance, en confusion permanente de la nature même de notre profession qui relève intimement des arts et des métiers de la production intellectuelle quotidienne pour donner du sens aux actions multiformes de l'activité humaine. Sa nature commerciale est en ce sens immédiatement frappée de l'exceptionnalité due à la production culturelle qui la caractérise. La pensée contrairement aux idées ne s'industrialise pas.
Elle reste attachée à l'intimité des conditions humaines faites d'un long processus de façonnage évolutif nous distinguant d'entre toutes les créatures de Dieu. Ensuite, il est nécessaire d'impulser des dynamiques de rénovation au secteur public de l'information qui est mis en demeure de gagner en densités de réalisations journalistiques, en établissant des distinctions fécondes entre information publique marquée par la neutralité étatique et rapports sur l'action gouvernementale. Pour cela une profonde rénovation strictement professionnelle au sens le plus noble de ce terme (nous ne parlons pas bien évidemment de refonte de grille programmatique mais d'une nouvelle manière d'aborder le journalisme). Cela doit d'abord prendre forme au sein de l'Agence de presse, cœur battant du journalisme public, organisation à reformer aujourd'hui tant quantitativement en raison d'une productivité par journaliste de la matière informationnelle en berne, que qualitativement, les derniers évènements la concernant nous confortant malheureusement dans nos observations à cet égard. Pour ce qui concerne le secteur public de la presse écrite et audio-visuelle, nous avons eu l'occasion d'en discuter les termes dans les colonnes de ce journal, in La Nouvelle République numéro 6784 dans un article intitulé «Journalisme de la rupture numérique».
Pour des solutions novatrices et audacieuses
Nous sommes persuadés que le redressement du secteur médiatique dans son ensemble passera d'abord par la production d'une information qualitative publique s'appuyant sur les élites intellectuelles de ce pays pourvu que les moyens financiers et matériels s'appliquent en concentrations d'efforts constants, désintéressés et responsables en direction des énergies qui ne manqueront pas de s'y exprimer. En réalité c'est une question de volonté politique et de choix judicieux des hommes (et des femmes) qui s'attèleraient à une telle mission. La nouvelle Constitution qui, désormais, distingue nettement régime politique et action publique générale devrait contribuer à l'éveil des consciences qu'il est cependant nécessaire d'accélérer tant les enjeux sont cruciaux. Pour ce qui concerne la sphère privée, nous partons du principe que le modèle des sociétés d'édition est obsolète. Le journalisme et l'information sont un art et une matière qui prennent vie grâce au labeur d'artisans engagés dans un métier qui relève de la passion. Ils ne sauraient donc être enfermés dans des personnalités juridiques qui sèment la confusion entre les productions matérielles et celles intellectuelles. Pour ce qui concerne le journalisme, la société par actions a prouvé ses limites. Cette forme juridique a prêté le flanc aux rentiers du régime, voire pour certains médias aux ingérences internationales à coups de financements dont l'origine, comme l'information dévoyée, se déguise soigneusement.
Place aux dynamiques coopératives entre journalistes, aux sociétés des rédacteurs afin que plus aucun journal ne puisse se faire sans ses journalistes, autorisant les dérives les plus terribles, les exploitations les plus amères, amenant à la situation dévastatrice dans laquelle cette profession sinistrée se trouve. Il est urgent de repenser la forme légale de l'édition journalistique, comme de celui des journalistes (ne faudrait-il pas réfléchir à un statut des journalistes comme il existe un statut des magistrats en lieu et place d'un Code de l'information ?), conditions premières de sa renaissance. Le statut du journaliste permettra d'en délimiter du même coup le champ de ses droits mais aussi de ses obligations et jalonnera ainsi une pratique de l'information qui a besoin bien plus d'éthique et de règles professionnelles que de codes désuets.
Lorsque de tels ordonnancements professionnels, c'est-à-dire corporatistes, se feront jour, il sera bien plus simple d'organiser la manne publicitaire publique, en dehors de la logique du privilège. Et si ce financement advenait à ne pas suffire, il devrait pouvoir se voir prolonger par des fonds alloués à la presse (qui sera essentiellement électronique), comme il en existe pour le cinéma ou le livre. Nous ne sortirons de la situation misérable de la presse que dans un effort de rénovation des rapports sociaux qui s'expriment au sein du secteur médiatique. En réalités, «patrons de presse» et le «système de la rente» se sont acoquinés depuis fort longtemps contre les journalistes et le journalisme.
Pour retrouver les voies d'une information démocratique, c'est-à-dire authentiquement responsable, il est nécessaire d'imaginer avec les véritables professionnels chevronnés de la presse, restés fidèles à l'idéal de leur profession, les fondements juridiques d'une profonde réforme de la presse (les entreprises et les journalistes) afin, d'une part, de sortir des milliers de travailleurs d'une misère sociale qui ne dit pas, par pudeur, son nom et d'autre part de retrouver les chemins d'un dialogue citoyen, basé sur l'échange d'une information dûment vérifiée que la magie de la technologie numérique permet. C'est ainsi que nous rendrons le plus grand des services à nous-mêmes, aux citoyens et enfin à l'Etat, car il aura à sa disposition une plate-forme culturelle puissante à même de porter dans les consciences populaires les progrès qu'il souhaite apporter à l'organisation de son action tout aussi contradictoire que vivifiante.


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