Battu au Ghana (0-1) après une belle victoire face aux Comores (3-0), le Mali a vu s'envoler ses espoirs de qualification directe pour la Coupe du monde 2026. Cette contre-performance complique considérablement la suite de son parcours : désormais, les Aigles ne peuvent viser que la deuxième place de leur groupe, synonyme de potentielle participation aux barrages intercontinentaux. Une perspective qui demeure néanmoins très incertaine, tant elle dépend d'un enchaînement de résultats favorables dans les autres groupes et d'un classement parmi les meilleurs deuxièmes. Dans ce contexte tendu, Afrik-Foot a obtenu en exclusivité une interview avec Tom Saintfiet, le sélectionneur belge du Mali, qui revient sur les deux dernières journées de qualification, les enseignements qu'il en tire, les difficultés rencontrées, mais aussi les perspectives pour l'avenir de la sélection nationale. Un contexte hérité complexe Dès l'entame de l'entretien, Tom Saintfiet rappelle la situation délicate dans laquelle il a repris les rênes de la sélection malienne : « Lorsque j'ai été nommé, l'équipe avait récolté cinq points en quatre journées. On partait de loin, avec un déficit de confiance et une pression immédiate sur les résultats. » Dans un groupe particulièrement relevé où chaque faux pas se paie au prix fort, le technicien belge savait qu'il n'aurait pas droit à l'erreur : « Il fallait espérer un parcours sans faute, ou presque, pour recoller au peloton de tête. Une entreprise périlleuse, mais nous avons essayé de rester mobilisés. » Des progrès notables malgré l'échec Sous sa houlette, les Aigles ont effectivement montré des signes encourageants. Ils ont battu le Tchad (2-0) à domicile, puis ont signé une belle victoire face aux Comores (3-0), démontrant une solidité défensive accrue et une meilleure gestion collective des temps de jeu. « Nous avons engrangé sept points sur douze possibles. Ce n'est pas parfait, mais cela montre une dynamique de progression. Le groupe a fait preuve de caractère et de discipline. » Cependant, la défaite au Ghana est venue briser cet élan. Un match jugé « charnière » par le sélectionneur, tant il pouvait permettre au Mali de recoller au classement. « À Kumasi, nous avons bien entamé la rencontre, avec de bonnes intentions. Malheureusement, on encaisse un but évitable juste avant la pause. Ensuite, on a eu les occasions pour revenir, mais le réalisme a cruellement manqué. À ce niveau de compétition, cela ne pardonne pas. » Des obstacles multiples à surmonter Revenant plus largement sur les raisons de cette élimination prématurée, Saintfiet insiste sur plusieurs facteurs structurels et conjoncturels : « D'abord, l'inexpérience de certains jeunes joueurs. Ce sont de très bons éléments, mais ils n'avaient encore jamais été confrontés à un tel niveau de pression. Ensuite, nous avons dû composer avec les blessures de cadres comme Yves Bissouma et Moussa Djenepo, qui sont des piliers du collectif. Enfin, certaines positions manquent de profondeur. On ne peut pas espérer aller loin si l'on n'a pas d'alternatives fiables sur le banc. » Le sélectionneur insiste également sur les contraintes logistiques qui ont pesé sur la sélection : l'absence de matchs à domicile dans de bonnes conditions, les déplacements fatigants, et le peu de temps de préparation entre les rencontres. « Jouer à domicile est censé être un avantage. Mais dans notre cas, entre la rénovation de certains stades et les changements de dernière minute, nous avons rarement pu bénéficier d'un vrai soutien populaire dans un environnement maîtrisé. » Un regard tourné vers l'avenir Malgré la déception, Tom Saintfiet reste résolument tourné vers l'avenir et garde une foi intacte en ce groupe. « Ce groupe est jeune, certes, mais il a du talent et de l'envie. Il y a une génération montante prometteuse, avec des joueurs comme Doumbia, Diarra ou encore Haidara, qui vont prendre de plus en plus d'importance. L'élimination est douloureuse, mais elle peut aussi être formatrice. Chaque échec est une étape vers la réussite, à condition d'en tirer les bonnes leçons. » Quant à son avenir personnel à la tête des Aigles, le technicien belge adopte une posture prudente, sans pour autant éluder le sujet : « Je suis sous contrat, et pleinement engagé. Mais il faudra échanger avec la fédération. Il est important que nous soyons alignés sur les ambitions et les moyens pour atteindre nos objectifs. Je suis venu ici pour construire quelque chose de durable, pas seulement pour une campagne. Des bases solides ont été posées, maintenant il faut du temps, de la stabilité et un véritable projet à long terme. » Une mission inachevée mais structurante Saintfiet reconnaît que cette campagne qualificative laisse un goût amer, mais refuse de parler d'échec total : « On ne doit pas juger uniquement à travers le prisme du résultat brut. Il y a eu une progression dans le jeu, une meilleure cohésion, et une identité qui commence à se dessiner. Ce sont des éléments fondamentaux pour construire une équipe compétitive dans la durée. Le Mali a les moyens de devenir une grande nation de football, à condition de continuer à travailler avec rigueur et vision. » Le rendez-vous manqué avec la Coupe du monde 2026 servira peut-être de tremplin vers d'autres succès, à commencer par la prochaine Coupe d'Afrique des Nations, où les Aigles auront à cœur de montrer un tout autre visage. En conclusion, si la déception est grande pour les supporters maliens, Tom Saintfiet préfère retenir les progrès accomplis depuis son arrivée à la tête des Aigles. Le Mali ne participera sans doute pas à la Coupe du monde 2026, mais les fondations sont désormais posées pour bâtir une équipe encore plus compétitive dans les années à venir, portée par un vivier de jeunes talents prometteurs, prêts à s'imposer sur la scène internationale. Il convient également de replacer cette situation dans son contexte : l'équipe nationale a rarement eu l'opportunité de jouer à domicile. « Depuis que je suis sélectionneur, je n'ai pas encore eu la chance de diriger un match officiel devant notre public à Bamako », rappelle-t-il. Par exemple, la réception des Comores s'est tenue au Maroc, le stade malien n'étant pas disponible à cette période. Or, jouer à domicile, avec l'énergie et le soutien du public, peut faire une réelle différence dans une campagne de qualification. « C'est pourquoi je suis très heureux à l'idée de pouvoir, enfin, diriger l'équipe à Bamako lors du match d'octobre contre Madagascar. Ce sera une belle occasion de renouer avec notre public et de mobiliser tout le pays autour de la sélection.» Quant à la préparation de la Coupe d'Afrique des Nations, elle est en cours de finalisation avec la Fédération. Deux matchs amicaux sont envisagés en novembre. L'objectif : affronter des équipes dont le style se rapproche de celui de nos adversaires du premier tour, notamment le Botswana et le Maroc. « Une équipe d'Afrique australe — comme la Zambie, la Namibie ou le Zimbabwe — pourrait nous offrir une bonne répétition face à un style de jeu basé sur la vitesse, l'impact physique et le jeu direct. » En parallèle, le staff cherche également à organiser une rencontre contre une nation d'Afrique du Nord, probablement l'Egypte, afin de mieux préparer la confrontation attendue face au Maroc, « un adversaire de très haut niveau, structuré et rigoureux sur le plan tactique ».