Selon ce confrère, l'usine a rejeté ses eaux usées sur des parcelles agricoles exploitées par deux paysans et l'enquête effectuée par les services habilités (police et gendarmerie) a établi la toxicité des rejets. Sur cette base, le wali d'Oran a réagi en ordonnant l'arrêt immédiat du déversement des eaux usées, l'indemnisation des deux victimes et la dépollution des sols. La justice saisie de l'affaire a procédé à une expertise accablante pour l'usine de Coca Cola qui a été condamnée à payer une amende de 60 millions de centimes et plus de 1,1 milliard de centimes de dommages et intérêts au profit des deux paysans. Ce fait peu courant signifie-t-il que le temps où les pollueurs bénéficiaient d'une sorte d'impunité est révolu ? Jusqu'à présent, les amendes «environnementales» ont concerné surtout les responsables de déversement d'hydrocarbures en mer près des côtes algériennes. La condamnation de Coca-Cola montre, en tout cas, que la loi est, enfin, applicable et qu'il est possible de faire payer les pollueurs. Les pilleurs de sable, les chasseurs d'espèces protégées, les constructeurs qui ne respectent pas les règles de l'urbanisme, les fauteurs de bruit, même s'ils sont «institutionnels», et, d'une façon générale, les pollueurs ne resteront pas indéfiniment impunis. L'article 3 de la loi sur la protection de l'environnement et le développement durable du 19 juillet 2003 a consacré «le principe du pollueur-payeur, selon lequel toute personne dont les activités causent ou sont susceptibles de causer des dommages à l'environnement assume les frais de toutes les mesures de prévention de la pollution, de réduction de la pollution ou de remise en état des lieux et de leur environnement». Il y a quelques années, plus précisément en mars 2005, une information avait été publiée par la Nouvelle République, sous forme de brève, concernant deux personnes présentées devant le procureur de la République, à Constantine, pour avoir jeté des déchets médicaux contrairement aux prescriptions de la loi sur les déchets. Le plus incroyable est que ces deux personnes ont été placées sous mandat de dépôt en application des dispositions de la loi. La loi sur l'environnement permet aux associations d'être partie civile dans les affaires d'atteintes à l'environnement même si elles ne sont pas directement touchées. Mais les associations recourent très rarement à l'action judiciaire, sans doute à cause des longueurs des procédures et des frais qui découragent les bonnes volontés. En Inde, où Coca-Cola connaît, là aussi, des problèmes d'environnement, ce sont les fermiers qui protestent contre ses nuisances. Le magazine mensuel français, Alternatives économiques, dans son numéro de mai 2010, rappelle qu' «en 2004, une de ses usines d'embouteillage, située dans la ville de Plachimada au Kerala, avait dû fermer pour avoir contaminé les nappes phréatiques avec du cadmium. Des milliers de bouteilles de Coca et de Pepsi ont également été retirées de la vente, car elles contenaient des pesticides à un taux supérieur aux normes européennes. L'Etat du Kerala lui avait même interdit durant quelques années toute production». Dernier épisode en date, signale le magazine, «le gouvernement du Kerala réclame à Coca-Cola 48 millions de dollars pour avoir mal géré les ressources hydrauliques autour de Plachimada. D'autres communautés mènent une action similaire au Rajasthan, une région très aride».