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La cigale et la fourmi
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 03 - 09 - 2009

L'histoire que nous allons vous raconter aujourd'hui n'est pas vraie. Les personnages sont des animaux et n'ont rien à voir avec les humains que vous connaissez ou dont vous avez entendu parler. Il nous est parvenu que vous avez le cafard et que vous arrivez péniblement à jeûner par cette chaleur amollissante, alors nous avons pensé vous distraire un moment et vous aider à passer le temps en vous narrant ce qui s'est passé jadis entre la cigale et la fourmi sa voisine. Encore une fois, nous vous supplions de ne pas oublier que ça n'a rien à voir avec la réalité. Il était une fois, une cigale qui, ayant chanté à loisir tout l'été, se trouva le ventre creux et gargouillant sans honte, quand les premières bouffées froides de l'automne atteignirent l'arbre où elle faisait crisser son violon, se prenant pour ce grand violoniste algérien dont on parle en ce moment dans tous les médias du monde.
Grelottant de froid, le ventre percé par la vrille impitoyable de la faim, elle décide d'aller chercher un peu de nourriture chez la fourmi sa voisine.
- Bonjour, madame, lui dit-elle, quand celle-ci lui ouvrit la porte. Je viens vous demander un petit quelque chose à mettre sous la dent comme disent les êtres humains. La faim me torture depuis des jours, le froid me glace les ailes, et je n'ai pas envie de mourir maintenant. Je n'ai pas encore bien joui de la vie, madame. Et qu'est-ce qui s'est passé d'après vous ? Eh bien, la fourmi embrasse la cigale en versant des larmes, et lui ouvre la porte toute grande.
- Entrez monsieur, dit-elle, la voix fissurée par l'émotion, vous êtes le bienvenu. Vous trouverez chez moi de quoi vous nourrir. Il ne sera pas dit qu'un insecte de la tribu des fourmis a laissé mourir de faim un insecte de la tribu des cigales.
- Merci infiniment, madame, répond la cigale, émue par tant de générosité. En me dirigeant vers cette fourmilière, je savais que j'allais y rencontrer une âme noble et charitable.
Puis, elle ajoute :
- Mais dites-moi, madame la fourmi, comment avez-vous deviné que je suis un mâle ?
- C'est évident, monsieur, dit la fourmi. Dans votre tribu, la femelle est muette, et vous n'avez pas arrêté de chanter pendant tout l'été.
Frappée par tant de science, la cigale complimente :
- Je dois avouer, madame, que vous m'étonnez. Notre école est classée parmi les dernières de la planète, elle a transformé tous les animaux qui l'ont fréquentée en bêtes stupides et moutonnières, et l'on ne s'attend pas du tout à trouver autant d'intelligence dans un corps aussi petit.
La fourmi rougit, arrive à murmurer un merci, et s'apprête à aller chercher de quoi manger et boire.
Mais, juste à ce moment, comme il arrive souvent dans les contes, le téléphone portable de la cigale se met à vibrer. Celle-ci plaque l'appareil contre son oreille pendant quelques instants, écoute et répond, puis le ferme et le range. Elle avait l'air tourmenté. Au bout d'un moment, elle dit :
- C'est un humain qui dit s'appeler Esope. D'après lui, nous n'appartenons pas, vous et moi, au monde réel mais à une histoire dont il est l'auteur. Et que dans cette histoire, vous êtes censée refuser de me donner à manger. Il s'agit, selon lui, d'un conte qu'il a imaginé pour apprendre aux êtres humains à se préparer et prendre leurs dispositions pour l'avenir. Il nous a choisis comme personnages de sa fable, parce que, selon lui toujours, vous êtes un insecte travailleur et prévoyant, et que moi par contre, je suis paresseux et imprévoyant, passant mon temps à chanter au lieu de travailler.
La fourmi s'exclame :
- Conte ou pas conte, tous les chefs de tribu de notre pays se sont réunies il y a quelques mois, et ont pris une décision que je me suis jurée de respecter. Cet Esope qui écrit des histoires ne me fera pas oublier mon devoir de citoyenne. Permettez-moi d'ajouter une chose, monsieur : méfiez-vous de ces machines qui transportent les paroles. Ce ne sont pas les blagueurs et les arnaqueurs qui manquent chez nous.
Mais voyant son voisin écarquiller les yeux et la fixer bizarrement, montrant par là qu'il n'avait rien compris, notre généreux et savant insecte reprend la parole :
- Je sais que vous n'êtes pas encore au courant. Le jour où nos chefs de tribu se sont réunis, celui de la vôtre ne pouvait pas être présent. Vous n'étiez encore que des larves vivant sous terre. Mais le procès-verbal de la réunion va être bientôt affichée partout sur les arbres. Voici ce qui s'est passé ce jour-là, dit-elle, avec une voix émouvante.
Doucement, la fourmi raconte alors à la cigale, que les chefs de tribu, inquiétés et alarmés par la misère et le désordre qui n'arrêtaient pas de sévir en dépit des richesses que contenait le pays, avaient décidé de se rassembler et de chercher la cause de ce malheur. La réunion dura des jours et des jours. Les débats furent houleux. Il y eut des insultes et du sang, comme à chaque fois que les bêtes se réunissent chez nous. Généreux et attentif, le gouvernement mobilisa toutes ses ambulances. Quand ces discussions violentes mais fructueuses prirent fin, les résultats furent annoncés par un vieux chef de tribu. En résumé, le rapport final souligne que les malheurs que vivent les animaux de cette contrée sont dus à plusieurs causes aussi dangereuses et difficiles à combattre l'une que l'autre. Dont, en particulier, le mauvais oeil des nations voisines et les coups secrets et malveillants de l'Ennemi Extérieur.
- Le rapport révèle que celui-ci, déclare la fourmi à la cigale, par l'intermédiaire de toute une armada de sorciers, jette des sorts sur tous ceux qui parmi nous sont désignés à un poste de responsabilité, faisant foirer toutes leurs initiatives. Comment gouverner convenablement, lorsqu'on est ensorcelé ? ajoute-t-elle gravement. Du coup, on comprend pourquoi tout est de travers chez nous. Nos responsables sont assis sur des chaises trafiquées par des magiciens. Tout ce qu'ils entreprennent est transformé en son contraire. S'ils luttent contre le chômage, le nombre des chômeurs augmente. Les nouveaux hôpitaux qu'ils construisent sont très vite débordés par des milliers de nouveaux malades. Ils ne cessent pas d'inaugurer des cimetières. S'ils prévoient de bâtir des bibliothèques et d'importer des livres, ce sont des millions de téléphones portables qui envahissent le pays, transformant les animaux en cinglés. S'ils décident de combattre la corruption, celle-ci se répand partout. S'ils pensent à de jolis jardins et à des toilettes publics, des milliers de dortoirs laids les devancent et défigurent tous les espaces. Les écoles, destinées dans les plans à transmettre le savoir et produire des citoyens à l'esprit critique et éveillé, sont métamorphosées en camps d'abêtissement. Et nous n'arrêtions pas de les critiquer. Que Dieu nous pardonne notre méchanceté. Comment pourrait-on reprocher quoi que ce soit à des responsables envoûtés ? Vous conviendrez, monsieur, que nous devons plutôt les plaindre. C'est pourquoi, il a été décidé lors de cette réunion extraordinaire de leur porter secours. Tout d'abord, les tribus se sont mises d'accord pour demander pardon au gouvernement et lui exprimer un soutien continu et indéfectible. Désormais, les journaux ne diront que du bien sur nos gouvernants afin de les encourager à accepter le pouvoir. Ils auront un salaire consistant et pourront faire des affaires sans courir le risque d'être embêtés. Ils resteront au pouvoir à longueur de vie. Le peuple acceptera la misère qui le ruine sans pousser des soupirs de tristesse ou des exclamations de révolte. Il prendra en charge ses misérables. L'école enseignera essentiellement les sciences occultes pour apprendre aux élèves comment pratiquer la sorcellerie et la déjouer. Et beaucoup d'autres choses qui visent toutes à aider inconditionnellement notre gouvernement à lutter contre l'Ennemi Extérieur. Vous comprenez maintenant pourquoi je suis dans l'obligation de vous offrir de quoi calmer votre faim. C'est désormais le devoir de chacun de nous d'aider son compatriote. Un long silence s'ensuit. La cigale semble très perplexe. Enfin, elle dit :
- Pardonnez-moi, madame, ce que je vais dire pourrait vous vexer, mais il me semble que dans cette réunion vous avez abordé les choses d'une manière — pardonnez-moi le terme - un peu primitive. À l'ère des nanotechnologies, vous expliquez le chômage par des vieilleries et des sornettes comme la sorcellerie ! Admettez madame qu'il est très difficile de croire à de telles analyses. Je vous rappelle que nous sommes en 2009, madame. La fourmi s'agite nerveusement. Les propos de la cigale semblent l'avoir durement bousculée. On sent qu'elle est sur le point de se mettre en colère. Brusquement, elle demande :
- Et quelle serait selon vous monsieur la cause de notre malheur ?
La réponse de la cigale ne se fait pas attendre :
- L'absence d'une véritable démocratie, madame. Il faut permettre à notre peuple de s'exprimer librement sur son avenir et cesser de le mépriser. Il faut que nos responsables se guérissent le plutôt possible de ce paternalisme qui consiste à croire qu'eux seuls peuvent gérer les affaires de ce pays. Il faut surtout qu'ils se regardent impitoyablement dans une glace pour se rappeler qu'ils sont comme nous : des créatures qui peuvent se tromper et commettre des bêtises. Il faut apprendre à nous écouter mutuellement. Il faut lutter contre ces appétits honteux qui nous poussent à s'accaparer de tout ce qui nous tombe sous la patte. Il faut aimer son pays et travailler pour lui au lieu de magouiller pour se remplir la panse. Bref, il est temps de devenir des adultes et de se débarrasser de ces comportements infantiles qui ont fait de nous la risée des nations civilisées. Je ne sais pas si vous entendez ce rire, madame, mais moi il me perce les oreilles maintenant. Nous sommes si ridicules. Nous sommes si stupides. Des fanfarons qui fanfaronnent en gémissant de plaisir. Regardez ce que nous avons fait de notre patrie. Nos ennemis n'auraient pas fait autant.
Alors, la fourmi explose :
- Incroyable ! C'est incroyable ! Vous m'excuserez monsieur, mais il est de mon devoir d'avertir la police. Entendre des paroles pareilles de la part d'un de nos citoyens et rester les bras croisés serait un crime de trahison contre la sécurité de la patrie. C'est maintenant que je m'explique le malaise qui s'est emparé de moi et ne veux pas me lâcher depuis que je vous ai vu sur le seuil de ma porte. Tout d'abord, vous êtes encore vivant alors que c'est connu que les cigales meurent avec la fin de l'été. En deuxième lieu, vous me demandez de quoi manger, alors que tout le monde sait que vous vous nourrissez de la sève des arbres. Un étranger s'appelant Esope vous appelle. Vous prétendez être le personnage d'un conte pondu par cet Esope. Enfin, vous insultez nos croyances. Convenez, monsieur, que ce sont là des signes qui poussent à la méfiance et à l'inquiétude. D'ailleurs, je vous informe maintenant, que si nos chefs de tribu se sont réunis avant l'été, c'était pour éviter la présence du chef de votre tribu. Personne n'ignore que les cigales ont des moeurs très relâchées. Vos mâles passent le plus clair du temps qu'ils ont à vivre à séduire vos femelles avec cette musique qui ne cesse pas de tout l'été. Et beaucoup de tribus constituant notre peuple n'approuvent pas du tout cette conduite immorale, contraire à nos coutumes.
Moralité : en premier lieu, il faut toujours se méfier de ceux qui jouent de la musique pour leurs femmes. Car on ne chante pas pour ces créatures incomplètes et idiotes, on leur hurle au visage des ordres et des reproches. Deuxièmement, la démocratie est une idée étrangère à nos coutumes, donc dangereuse. Chez nous, c'est le chef qui décide. Car le chef est infaillible et possède la science infuse. Les autres sont des retardés qu'il faut surveiller et guider. Troisièmement, il vaut mieux faire de la charité que créer des emplois. Quatrièmement, il faut encourager la recherche scientifique à s'investir dans la sorcellerie et le mauvais oeil. Cinquièmement, ne vous préoccupez pas de ce qui se passe dans ce monde insignifiant.
Mais il est temps au conteur de vous quitter. Les muezzins appellent à la prière du Maghreb. Fatigué, le soleil est allé se coucher dans la mer. Se réveillera-t-il demain ? Encore une journée du mois sacré de Ramadan qui s'en va. Dans quelques minutes un silence total régnera sur le village de Sidi-Ben-Adda. Il n'y aura plus alors que le bruit des mâchoires mastiquant avec plaisir les bons plats préparés par nos femmes, que Dieu les protège contre le mauvais oeil. Pendant ce temps, la nuit profitera pour effacer les objets et rendre moins pénible la vue des bêtises commises par les hommes. Au revoir.


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