Une alerte vient d'être lancée à propos de l'éventualité d'un fort séisme. Elle indique que s'il survenait avec force à Alger, les trois quarts de la capitale disparaîtraient. D'un pessimisme extrême, l'oracle prédit ce que nous savions déjà, et parce que tout le Nord algérien est assis sur une zone sismique, notre tenace crainte nous susurre que le danger est largement plus étendu. Déjà aux prises avec un séisme social que tout le monde pressentait, on imagine le malheur qu'un important tremblement de terre naturel produirait en s'alliant avec les particulières turbulences humaines et amplifiant avec une colossale perfidie les terrifiants spasmes actuels qui étranglent le pays. Du reste, on peut penser qu'une telle catastrophe n'a nullement besoin de rappliquer quand on constate que des effondrements de vieux immeubles se manifestent tous les jours aux quatre coins du pays sans une aide divine manifeste et ne répondant qu'au dictat de l'usure du temps. Un demi-siècle d'une indépendance délurée, pourfendue par plus de dix ans d'une noirceur morbide sans pareille, ont éparpillé des masses entières d'une population, émigrés et harraga, dans leur propre pays. Aucune politique de l'habitat ne pouvait avoir de sens dans la terrible désarticulation d'une Algérie où le sens de la nationalité ne pouvait avoir une raison fondée qu'une fois un toit acquis par l'empreinte des routes barrées et le feu des pneus usés. La docilité complice des gouvernants ira jusqu'à ériger des milliers de prisons dortoirs et pousser la gabegie jusqu'à alimenter en gaz et électricité des bidonvilles et des cités taudis. Dieu ne sera pour rien dans la préparation de la sauce morbide qui sera servie aux générations qui arrivent au pas de charge. On devine de quoi leur éducation et leur développement auront de noms. Le drame entier reste à venir pour parachever le tout. Des milliers de promoteurs immobiliers, dont la majorité s'était engouffrée dans un domaine sans en maîtriser les primaires intitulés, s'abreuvent aujourd'hui d'une eau acide jusqu'à la lie. Tous n'ont plus la dextérité miraculeuse sonnante et trébuchante pour répondre aux réclamations des banques et de leurs huissiers, se rendant compte aujourd'hui que leurs offrandes ont été, hier encore, outrageusement graciles et généreuses. Le drame à nos portes est encore plus manifeste, car c'est tout le pays qui n'a plus de répondant à opposer aux différents séismes et aux alertes plurielles.
