Le peuple ne s'attendait pas au délire que lui offrent les prétoires aujourd'hui. La justice donc ne s'était pas amusée à aiguiser le glaive pour régler des comptes, mais les griefs s'adressaient à de bien drôles de gamins noyés dans l'inconscience qui s'étaient accaparés de couronnes en toc pour s'empiffrer. La cascade des aveux est ahurissante et la pesée prouvée des tonnes de milliards sortis de l'ombre est à la mesure de l'effarement. Pourquoi le cacher ? On s'attendait à un peu de dignité de la part de nos anciens Premiers ministres et ministres et on croyait avec sincérité qu'il leur restait une miette de noblesse à nous présenter. Les sirènes des limousines et des escortes avaient berné presque tout le monde parce que l'on se disait que trôner à une telle hauteur, avec un condensé de verbes patriotiques forts, préfigurait une épaisseur d'âme et un consistant sens de la responsabilité. A la barre ceux qui offraient hier encore, du haut des tribunes, un profil de tigres aguerris se sont avérés en définitive n'être que des marionnettes jaloux d'une prestance en papier carton. Auteurs de légèretés déconcertantes, ils affirment s'être pliés aux ordres d'un monarque fantomatique, reconnaissant que l'orchestration de leur damnation était l'œuvre du maléfique vizir autoproclamé. L'ambition personnelle et la cupidité étaient-elles alors si fortes pour que des hommes se disant d'Etat puissent tomber si bas pour que la gouvernance d'une nation soit plus basse que celle d'une maison close ? Piteux et hallucinants spectacles en même temps quand les mauvais présumés innocents d'un dramatique instant poussent l'impudeur jusqu'à affirmer que les centaines de milliards mis au fond de la doublure du veston n'étaient que le produit personnel de petites économies. La panoplie des aveux a en ce moment une odeur d'arsenic et la sidération nationale est justifiée. L'Algérien a beaucoup de mal à s'expliquer pourquoi des magnats non attitrés ont pu avoir la main trop leste pour offrir des fortunes sonnantes et trébuchantes impossibles à compter pour des élections présidentielles censées gagnées d'avance. Il est vrai que la planche à billets comme recours a de quoi et de qui tenir.