MEDEA - Le "Rob", suc épuré, obtenu de la variété de raisin, le "Cinsault", et le boudin de gelée de raisin aux amandes, sont les derniers survivants d'une tradition culinaire séculaire jalousement gardée par une minorité d'artisans établis à Médéa et ses environs. Ces deux produits phares de l'art culinaire populaire de l'ancienne capitale du Titteri, sont aujourd'hui menacés de disparition du paysage gastronomique local, en raison du déclin du secteur de la transformation traditionnelle du raisin. Très répandue autrefois à Médéa, Benchicao, Si-Mahdjoub et Tizi-Mahdi, cette pratique a perdu, aujourd'hui, l'essentiel de ses artisans. Beaucoup d'entre eux se sont reconvertis dans des activités plus lucratives et moins contraignantes, alors que d'autres, ont préféré abandonner le métier. Les changements dans les habitudes de consommation de la société, induits par la sédentarisation galopante de la population, ont eu pour conséquence un recul de la demande sur ces deux produits, auxquels certains attribuent des vertus thérapeutiques. Si le "Rob" et le "boudin de gelée de raisin aux amandes", connu aussi sous le nom de "halwat laaneb", ne font plus recette que lors des occasions de la fête de Yennayer, c'est à cause, en partie, des nouvelles orientations en matière agricole qui ont profité à d'autres filières, au dépend de la viticulture, censée assurer l'essentiel du produit brut indispensable au maintien de cette activité de transformation. L'archaïsme du système de fabrication et de commercialisation de ces produits, vieux de plusieurs siècles, est l'autre facteur à l'origine de la disparition ou de la reconversion de nombreux ateliers de transformation qui existaient dans ces régions. Le petit noyau industriel, qui a mis plusieurs décennies pour se constituer, a vu son élan freiné subitement, en raison de la régression de l'activité viticole. Au lieu d'assister à une expansion des activités de transformation, l'inverse s'est produit, au point où l'essentiel de l'activité de transformation s'est réduite à une simple activité domestique traditionnelle, assurant de maigres ressources aux familles qui continuaient à la pratiquer. En dépit de ces aléas, les produits dérivés du raisin continuent d'être déclinés sous différentes formes, nectar, pâte concentrée, gélatine, et autant de parfums, très prisés, que ce soit, lors des grandes fêtes locales ou pendant l'hiver, vu leur apport énergétique et les vertus thérapeutiques qui leur sont attribués.