Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a catégoriquement rejeté vendredi les accusations portées contre son fils aîné Bilal dans le cadre du scandale de corruption qui éclabousse son gouvernement. "Récemment, l'opposition a lancé une campagne de diffamation contre mes enfants. Que les choses soient très claires : si un de mes enfants était impliqué dans une telle affaire, je l'aurais immédiatement renié", a lancé M. Erdogan dans un discours à Istanbul. Selon la presse turque, le fils aîné de M. Erdogan, Bilal, faisait partie d'une liste d'une trentaine de patrons, hommes d'affaires et élus visés par un mandat d'arrêt délivré par un procureur d'Istanbul mais que la police judiciaire a refusé d'exécuter. Agé de 34 ans, Bilal Erdogan, serait soupçonné de trafic d'influence via une fondation pour l'éducation qu'il préside, la Fondation turque pour le service des jeunes et de l'éducation (Turgev), a rapporté la presse turque. Le ministre turc de la Justice Bekir Bozdag a assuré de son côté vendredi qu'aucun mandat d'arrêt n'avait été délivré contre le fils du Premier ministre. "Je voudrais certifier qu'il n'y a jamais eu de mandat d'arrêt ni d'ordre de détention délivré contre Bilal Erdogan", a déclaré M. Bozdag, "les informations selon lesquelles il aurait quitté le pays ou se cacherait n'ont aucun lien avec la réalité". Depuis le 17 décembre, plusieurs dizaines de patrons, hommes d'affaires et élus considérés comme proches du Premier ministre, qui règne sans partage sur la Turquie depuis 2002, ont été inculpés et/ou incarcérés pour fraude, blanchiment d'argent et corruption. Cette enquête a déjà provoqué la démission de trois ministres et précipité un remaniement gouvernemental d'ampleur le 25 décembre. Selon le quotidien proche de l'opposition Cumhürriyet citant une requête judiciaire sollicitant la levée de leur immunité, deux de ces ministres sont soupçonnés d'avoir accepté un total de 63,5 millions de dollars de pots-de-vin. M. Erdogan accuse la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, très influente dans la police et la justice, d'avoir constitué un "Etat dans l'Etat" et de manipuler l'enquête en cours pour le déstabiliser, à quelques mois des élections municipales du 30 mars et présidentielle d'août. Depuis l'éclatement de cette affaire, le chef du gouvernement a démis de leurs fonctions plus d'un millier de policiers, hauts gradés ou officiers subalternes, et procéder à de nombreuses mutations de magistrats. La crise politique majeure provoquée par ce scandale a fortement affecté les marchés financiers, qui redoutent ses répercussions sur la santé économique du pays. La livre turque (LT) a franchi un nouveau plus bas vendredi à 2,2246 LT pour un dollar et à 3,0177 LT pour un euro, tandis que le principal indice de la bourse d'Istanbul (BIST 100) cédait en clôture 1,81 % à 65.635.06 points. Sept importantes organisations non-gouvernementales turques ont joint vendredi leur inquiétude à celles des milieux d'affaires pour déplorer que les accusations de corruption qui visent le gouvernement menaçaient la démocratie. "Les allégations de corruption et d'Etat dans l'Etat qui polluent l'environnement menacent la paix sociale et la stabilité et représentent un danger pour notre paix intérieure", ont déclaré ces sept ONG lors d'une conférence de presse.