Démantèlement d'un réseau criminel organisé et saisie de 176.000 comprimés psychotropes    Plus de 1,4 million d'emploi directs créés grâce au secteur de l'artisanat    Le MCO prend les commandes    LA LISTE DE BOUGHERRA POUR LA DOUBLE CONFRONTATION FACE À L'EGYPTE    Clôture du salon après 10 jours de riches activités    Comment se distingue une meilleure œuvre technico-artistique ?    Une population épuisée    Des colons israéliens attaquent des agriculteurs palestiniens    Une nouvelle plate-forme pour la promotion et la distribution    Face aux nouvelles mutations énergétiques mondiales, les douze actions stratégiques pour un nouveau management de Sonatrach    Les zones assiégées en détresse    Le grand retour d'un rendez-vous mythique    La facture d'importation de médicaments en forte baisse    Le film irakien « Anachid Adam » remporte le « Wihr d'or »    La diversité linguistique de l'Algérie est une « force d'unité »    70 jeunes filles et garçons formés au programme «Ambassadeurs de la Mémoire»    Programme TV du 4 novembre 2025 : Coupes et Championnats – Heures et chaînes    Sayoud installe les walis délégués de Bou Saâda et d'El Kantara et du wali de Batna    Inhumation de l'ancien ministre des Moudjahidine Tayeb Zitouni    Programme TV du samedi 25 octobre 2025 : Ligue 1, Bundesliga, CAF et championnats étrangers – Heures et chaînes    Programme TV du 24 octobre 2025 : Ligue 2, Ligue 1, Serie A, Pro League – Heures et chaînes    Festival international du Malouf: fusion musicale syrienne et russe à la 4e soirée    Adhésion de l'Algérie à l'AIPA en tant que membre observateur unique: le Parlement arabe félicite l'APN    Industrie pharmaceutique : nécessité de redoubler d'efforts pour intégrer l'innovation et la numérisation dans les systèmes de santé nationaux    Conseil de sécurité : début de la réunion de haut niveau sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Examen de validation de niveau pour les diplômés des écoles coraniques et des Zaouïas mercredi et jeudi    APN : la Commission de la santé à l'écoute des préoccupations des associations et parents des "Enfants de la lune"    Réunion de haut niveau du Conseil de sécurité sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Boudjemaa reçoit le SG de la HCCH et le président de l'UIHJ    Athlétisme / Mondial 2025 : "Je suis heureux de ma médaille d'argent et mon objectif demeure l'or aux JO 2028"    Ligne minière Est : Djellaoui souligne l'importance de la coordination entre les entreprises de réalisation    Mme Bendouda appelle les conteurs à contribuer à la transmission du patrimoine oral algérien aux générations montantes    CREA : clôture de l'initiative de distribution de fournitures scolaires aux familles nécessiteuses    Poursuite du suivi et de l'évaluation des programmes d'investissement public dans le secteur de la Jeunesse    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 65.382 martyrs et 166.985 blessés    La ministre de la Culture préside deux réunions consacrées à l'examen de l'état du cinéma algérien    Le Général d'Armée Chanegriha reçoit le Directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique de la Fédération de Russie    Foot/ Coupe arabe Fifa 2025 (préparation) : Algérie- Palestine en amical les 9 et 13 octobre à Annaba    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mohamed Saïb Musette. Chercheur au Cread
« Les nouvelles fortunes sont le fait des importations »
Publié dans El Watan le 03 - 11 - 2008

Sociologue et chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (Cread), Mohamed Saïb Musette explique dans cet entretien que les classes moyennes algériennes semblent plus fragiles aujourd'hui.
De qui parle-t-on lorsqu'on évoque les classes moyennes en Algérie ?
Les classes moyennes constituent un ensemble assez hétérogène d'agents sociaux qui varient en fonction de la grille d'observation. Pour faire simple, les classes moyennes se situent entre les classes riches et les classes pauvres, entre les défavorisés et les favorisés qui sont les extrêmes de la structure sociale ; le niveau intermédiaire est décomposé entre trois classes moyennes, la classe inférieure, la classe médiane et la classe supérieure. Ces classes représentent la vitrine sociale dans toutes les formations sociétales à l'ère du libéralisme. Dans notre dernier ouvrage, La Paupérisation des sociétés maghrébines, les analyses vont dans le même sens : les classes moyennes sont en danger dans leur positionnement, la classe moyenne inférieure s'appauvrit tandis que la classe supérieure s'enrichit, ce qui donne une image de rétrécissement des classes moyennes. Cette première lecture est accompagnée, de nos jours, par la naissance d'une nouvelle classe moyenne, en opposition avec la petite bourgeoisie citadine en panne de reproduction. Comme toute société est par essence dynamique (non figée), la mobilité s'opère avec le temps.
L'accélération du passage à l'économie de marché met-elle les classes moyennes en péril ?
Le passage à l'économie de marché s'est fait sans l'achèvement de l'économie planifiée. Cette transition s'avère lente, avec des pauses et des accélérations mettant en jeu notamment la répartition des revenus ou la distribution de la rente, selon les analystes. Une stabilisation des classes moyennes, avec notamment une stagnation de la classe médiane (les fonctionnaires) qui suppose un échec social, nécessite au moins le passage d'une génération. Cette stabilisation impose une triple capitalisation pour pouvoir se reproduire : un capital financier, un capital social et surtout un capital culturel. Les craintes de ne pas pouvoir atteindre cette triple capitalisation pour les classes moyennes peuvent traduire l'avènement d'un péril, une crise sociale aiguë. La stabilisation non achevée, la reproduction sociale est menacée.
Quel impact a la nouvelle donne en matière de consommation sur cette frange de la société ?
Les classes moyennes se donnent, à voir notamment par leurs modes de consommation, une forme d'extériorisation de leur réussite sociale. Quelques modèles de consommation sont sociologiquement lisibles : modèle d'habiter, modèle alimentaire, modèle vestimentaire, loisirs… Ces modèles sont constitués par des éléments en changement permanent, comme pour se mettre à l'avant-garde des nouveautés sociales. C'est ainsi qu'on passe de l'appartement F3 à la maison privée, avec tous les nouveaux équipements, l'ameublement, l'équipement électroménager… De la même manière, la culture alimentaire se modifie avec des repas légers, des déjeuners ou dîners au « resto » ! Les tenues vestimentaires doivent être « stylisées » selon les rituels quotidiens, intérieur, extérieur, sorties, réceptions… Il en va ainsi pour les modèles de loisirs avec l'organisation des vacances (ici ou ailleurs), des goûts artistiques et musicaux, des soirées... Ces modèles de consommation se superposent aux modèles traditionnels ou religieux, comme pour l'organisation des fêtes. Ces modèles traduisent en fait la conscience de classe.
Sur ce point précis, la contestation sociale est-elle symptomatique de la fragilité des classes moyennes en Algérie ?
La contestation sociale est en fait le propre de la classe laborieuse qui semble se résigner présentement à son sort, malgré sa force de lutte dans la sphère de production. Paradoxalement, les classes moyennes, généralement peu combatives, s'adonnent dans une pseudo-contestation sociale, car cette lutte ne vise pas le changement social mais bien une meilleure intégration dans le système de distribution des rôles sociaux. Les classes moyennes algériennes s'engagent plus dans une lutte de consommation et moins dans la production des richesses.
La classe moyenne se rapproche-t-elle des bas revenus ?
C'est un rapprochement inverse qui se produit sur l'échelle des revenus. Ce sont les classes populaires qui se rapprochent allégrement du niveau de revenus des classes moyennes. Le risque d'un écrasement de l'échelle des revenus à la base n'est pas à écarter. La stagnation des revenus des classes moyennes suppose certes un recul, mais la débrouille des classes populaires a conduit les agents des classes moyennes à se donner à des « bizness » pour maintenir un niveau de consommation respectable. C'est ainsi que l'invention du trabendo a agi comme une bouée de sauvetage pour les classes moyennes.
Est-ce que l'émergence de nouvelles fortunes en Algérie a généré de nouveaux « modèles sociaux » ?
L'émergence des nouvelles fortunes, que l'on appelle aussi les nouveaux riches ou encore les anciens pauvres, est propre à la dynamique de la société selon les rythmes du fonctionnement de l'échelle sociale. En Algérie, on a l'impression que ce rythme a connu une accélération rapide, hors normes. Certes, il est dans la logique de la classe moyenne supérieure de rejoindre, tôt ou tard, celle des riches. Cette ascension peut se faire dans la sphère de la production ou dans celle de la distribution. Les nouvelles fortunes, en Algérie, proviennent plus de la distribution à partir des importations que de la production des richesses. La rapidité d'accès au sommet de l'échelle sociale est telle que cette classe n'a pas encore acquis la culture nécessaire pour asseoir sa réussite sociale.
Quel avenir pour les classes moyennes ?
Il est vrai qu'on est loin de ce que les marxistes attendaient des luttes sociales. L'invention des classes moyennes, comme lecture wébérienne de la stratification sociale, avait justement pour objectif la démonstration de l'absence d'antagonismes dans la formation des sociétés humaines. Les classes moyennes en Algérie représentent, selon cette lecture, un bon argument pour le maintien du système actuel et sa reproduction, à condition que les revendications sociales de ces classes continuent à alimenter les scènes économique et politique. Ces classes, fortes de leurs fonctions d'intermédiaires dans le conditionnement social et culturel, s'inventent régulièrement de nouveaux besoins, de nouvelles luttes que le système libéral s'empresse souvent de satisfaire avec de nouveaux mécanismes d'endettement. Les classes moyennes obtiennent ainsi leurespace de vitrine sociale qu'il faut sans cesse alimenter. Il est aussi vrai que toute construction des réalités sociales, comme ici les différentes classes sociales, n'est qu'un rapprochement de cette réalité dont l'objectivation reste un idéal. Cette construction a le mérite de proposer une « lecture » des formations sociétales sur la base des observations empiriques en changement constant. Dans nos recherches, le commun des Algériens semble toujours s'identifier et se classer au milieu de l'échelle sociale, c'est dire la force d'attraction de ces classes qui dominent l'imaginaire du commun des mortels.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.