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L'abstention, c'est l'équivalent politique de la grève
Publié dans El Watan le 02 - 05 - 2014

– Dans votre livre, vous parlez de «syndrome de fatigue démocratique». Qu'est-ce exactement ?

C'est un syndrome qui frappe ce que l'on définit comme les «démocraties avancées». Dans ces pays, le citoyen vote de moins en moins. L'abstention devient le bord politique le plus important. Ceux qui votent sont inconstants dans leur choix d'un scrutin à un autre. De moins en moins de gens adhèrent à des partis. Les politiques se méfient des citoyens et réciproquement. Un gouffre se crée entre le peuple et les élites, un mot qui soit dit en passant a la même racine étymologique que «élection». Le paradoxe, c'est que de par le monde, il n'y a jamais eu autant envie de démocratie qu'aujourd'hui et autant de défiance dans le même temps. Il y a un décalage entre l'envie démocratique et la satisfaction des citoyens. Or, la démocratie est comme une plante : il faut la nourrir et l'arroser. En Europe occidentale, on a trop souvent l'impression d'avoir trouvé la formule magique et on essaye de l'imposer aux autres. Je suis contre les élections si la démocratie se réduit à cela. Mon livre est un plaidoyer pour enrichir la démocratie avec d'autres formes de désignation.
– Quid des pays, comme l'Algérie, candidats à la démocratie ? Vous leur dites : n'y allez pas, c'est une erreur ?

Je leur dis : l'élection n'est qu'une des possibilités. A l'origine, l'élection n'est pas conçue comme un outil pour instaurer la démocratie. C'est avant tout une procédure aristocratique. On a tendance à l'oublier. Le tirage au sort est en réalité la procédure la plus démocratique, mise en place dès l'Antiquité. L'élection a été adoptée pour freiner l'essor démocratique. Et depuis, on confond le moyen et l'objet. La démocratie ne se limite pas à organiser des scrutins. Si on prend l'exemple de l'Afrique, le vote provoque davantage de violence et de corruption que de démocratie. On oublie aussi que Hitler a pris le pouvoir par les urnes. Mais le fondamentalisme électoral est myope et refuse de reconsidérer les options et les procédures démocratiques. Résultat : on vit dans une hystérie électorale permanente. Les politiques repartent en campagne au lendemain des résultats. C'est une dynamique diabolique ! C'est d'ailleurs l'un des syndromes clés de la fatigue démocratique : quand le poids de l'élection suivante devient plus important que le srutin précédent.

– En Algérie justement, une élection présidentielle vient de se tenir. Le président Abdelaziz Bouteflika est réélu avec 8,5 millions de voix. 11 millions d'électeurs se sont abstenus. La question qui en découle : qu'est-ce qui fonde la légitimité des dirigeants ?

La légitimité ? Vaste question. Je crois que la légitimité n'est pas forcément mathématique. En anglais, on parle de l'input et l'output legitimacy. La première repose sur les institutions. La seconde sur les résultats. Je dirais du coup que la légitimité vient d'une confiance généralisée dans la validité de certaines procédures. Pour être plus clair, un dirigeant est légitime même auprès de ceux qui ne l'ont pas choisi parce que le mode de désignation est lui-même légitime. En ce qui concerne le cas algérien, 11 millions d'abstentionnistes, c'est beaucoup. Je ne serais pas super à l'aise si j'étais Abdelaziz Bouteflika ! L'abstention est l'équivalent politique de la grève. Il serait malvenu de ne pas prendre en compte les voix silencieuses, parce que ceux qui ne se sont pas exprimés par les urnes finiront par le faire un jour différemment. Il peut y avoir une explosion violente du silence. Le pouvoir ne prend pas assez au sérieux l'abstention. Personnellement, je suis pour qu'il y ait des sièges vides au Parlement pour rappeler aux élus leur légitimité partielle.
– A vous lire, on a le sentiment que les politiques sont réduits à leur rôle médiatique, à défaut d'un réel poids sur les grands enjeux …

Les politiques ont perdu de leur pouvoir à l'échelle européenne et transnationale du fait de la mondialisation, de la spéculation financière. Le niveau national n'est plus capable de gérer les vraies problématiques. Il y a clairement une perte de souveraineté. Les politiques en sont réduits à jouer du tambour. Faire du bruit pour la campagne électorale permanente. C'est assez malsain, parce que cela cantonne le personnel politique à faire des promesses vides de sens. Les études de Transparency International sur la défiance sont intéressantes de ce point de vue. L'Algérie et la Belgique ont des situations similaires avec 67% des citoyens qui pensent que les partis sont corrompus ou extrêmement corrompus. En Algérie, le parti est considéré comme la troisième instance la plus corrompue de l'Etat. Ce qui est dangereux et inquiétant, c'est que ce scepticisme est assez largement partagé dans le monde. Les partis devraient s'en méfier. Il y a un parallèle avec l'aristocratie prérévolutionnaire. Les leaders de formation politique sont les nouveaux marquis ou vicomtes du système. Ils doivent prendre garde à ce que nos démocraties ne deviennent pas des «partitocraties».
– Comment renouer la confiance et tisser à nouveau le lien entre dirigeants et administrés ?

Une précision : je suis en faveur de la démocratie représentative parce que j'ai conscience qu'il faut une délégation de pouvoir pour rendre un pays gérable. Le problème est que la seule représentation que nous connaissons c'est la représentation élective. Je propose de lui en ajouter une autre : le tirage au sort. A côté des 462 députés algériens élus, il pourrait y en avoir autant choisis de manière aléatoire. Si on arrive à mettre ensemble ces deux représentations, une cohabitation et un dialogue fructueux pourraient naître. Ce que je dis n'est pas farfelu : cela a été testé en Irlande. 33 élus et 66 citoyens tirés au sort ont été chargés de remanier huit articles de la Constitution. La dynamique obtenue était très différente de celle obtenue par la politique ordinaire, parce que cette assemblée n'était pas préoccupée par sa réélection. Cela a apporté de la fraîcheur au débat.
– Dans ce cas, pourquoi ne pas imposer un mandat unique ? Cela aurait pour avantage de déconnecter le politique de l'élection ou du moins de la réélection.

Certes, le mandat infini crée une caste d'élus dont l'enjeu primaire est de se faire réélire. Mais imaginons un pays avec des parlementaires élus une seule fois. On risque de perdre en compétence à la faveur de chaque renouvellement. Il faut trouver un équilibre entre remanier le personnel politique et conserver la mémoire d'une équipe parlementaire. Ça c'est pour le pouvoir législatif. En ce qui concerne l'Exécutif, maintenant, du sommet de l'Etat, il y a un point qui n'est pas assez soulevé, celui de la retraite des présidents. Pour accepter de lâcher son pouvoir, il doit y avoir une perspective de reconversion, de seconde carrière. C'est un point sur lequel les pays africains doivent travailler.


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