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Le financement des industries culturelles et créatives
Publié dans El Watan le 20 - 12 - 2009

Le financement public de la culture a toujours été au centre des débats entre les tenants d'une culture « de qualité, produite à coups de subventions publiques » et ceux plus favorables à une « marchandisation du produit culturel qui ne peut trouver son épanouissement que dans le cadre de règles du marché », même si toutes les théories de l'économie de la culture admettent que certaines branches de la culture ne sauraient survivre sans les aides publiques.
En confiant, vers la fin des années 1960, à un journaliste qui l'interviewait « vous, vous savez ce qu'est la culture ? Moi je ne le sais pas », l'emblématique ministre de la Culture français, André Malraux, avait alors mis le doigt sur une problématique que beaucoup de théoriciens n'arrivent pas encore à cerner, tant la définition de la culture demeure encore un exercice imprécis en raison de l'étendue de ses branches, de la multiplicité de ses acteurs et de la complexité des passerelles avec des secteurs de plus en plus variés, notamment avec la généralisation des outils des nouvelles technologies de l'information. Ce sont les économistes qui ont tenté les premiers de trouver une approche rationnelle pour comprendre le fait culturel, décortiquer les mécanismes régissant l'élaboration de son offre et la construction de sa demande. Le cœur de l'économie de la culture et historiquement son premier domaine, celui observé par les chercheurs, est donc l'étude des beaux-arts et des spectacles vivants (théâtre, opéra). Longtemps considérée comme « activité dispendieuse offrant peu de bénéfice à la société et liée aux péchés d'orgueil et de paresse », la production culturelle verra son image évoluer vers le XVIIIe siècle sous la houlette de penseurs qui parviendront à la présenter comme « une utile incitation à l'enrichissement, et donc à la croissance économique. » De célèbres économistes, dont l'Anglais Adam Smith ,et, plus tard, l'Américain John Kenneth Galbraith, intégreront la culture dans le socle de leurs recherches économiques, ouvrant la voie à l'émergence d'une véritable économie de la culture. C'est au cours des années 1960 que l'économie de la culture se constitue en champ disciplinaire, sous l'impulsion de l'ouvrage de William Baumol et William Bowen Perfoming Arts : The Economic Dilemma. Conçue au départ comme un carrefour de plusieurs disciplines, l'économie de la culture dispose d'une revue spécialisée à partir de 1977, et atteint une pleine reconnaissance académique en 1993 à l'occasion de la publication d'une revue de littérature dans le Journal of Economic Litterature et de deux manuels de référence.
En 1965, les deux auteurs sont chargés par la fondation Ford de produire un diagnostic sur la santé et le fonctionnement économiques des théâtres à New York. Ils souhaitent expliquer les raisons pour lesquelles les salles de spectacles de Broadway connaissent une augmentation croissante de leurs coûts d'exploitation, de leur non-profitabilité chronique et d'une raréfaction de leur public. Leur travail met en évidence un différentiel de productivité touchant les arts et particulièrement le spectacle vivant. En effet, pour jouer la pièce de théâtre Tartuffe, il fallait en 1664 deux heures et douze acteurs. De nos jours, il faut toujours deux heures et douze comédiens : aucun gain de productivité en plus de trois siècles. Le coût d'une pièce augmente donc au rythme de la productivité, tandis que la productivité des acteurs n'augmente pas. Baptisée maladie des coûts par Bowen et Baumol, cette croissance inexorable du coût relatif des spectacles vivants explique la dépendance croissante de ceux-ci à l'égard des subventions publiques sans lesquelles cette activité serait condamnée. Concluant que « le secteur du spectacle vivant ne répond pas à la règle de libre concurrence capitaliste », les auteurs soulèvent un dilemme pour les pouvoirs publics : soit ils financent des spectacles toujours plus coûteux, soit ils laissent de nombreux acteurs sortir du marché en paupérisant l'offre. Et Baumol de conclure : « Au besoin de financements externes, mécénat, fonds publics, prélevés auprès des secteurs modernes. »
A partir de là, les recherches sur l'économie de la culture se développeront dans deux directions essentielles. La première va à contre-courant de la thèse de Baumol et « relève l'existence de gains de productivité réels dans ce secteur. Ainsi, une meilleure conception des salles de spectacle, des micros, la diffusion télévisée ou radiophonique ainsi que les enregistrements font qu'une même représentation peut être vue par un nombre de spectateurs sans commune mesure avec ce qui était possible avant les technologies de la diffusion de masse. Les industries culturelles fournissent ainsi d'importants financements aux spectacles vivants dont elles tirent la matière de leurs produits. Liée à l'économie de l'innovation, ce courant voit dans l'économie de la culture un cas particulier préfigurant des échanges économiques de plus en plus dématérialisés. La seconde, qui tient plus au choix public et à l'organisation industrielle, s'intéresse plus à la manière dont sont ou devraient être employées les subventions à la culture. Ces subventions sont en effet l'objet de critiques portant sur leur enveloppe, leur destination et la façon avec laquelle elles sont gérées, même si tous les écrits tendent à justifier l'existence des subventions en démontrant qu'elles permettent l'accès à la culture à un public plus large et en proposant des modes de contrôle s'assurant que les subventions sont utilisées conformément aux intérêts du public. Depuis, il semble que la culture ait été définitivement intégrée dans le champ, non seulement des chercheurs, mais aussi des politiques qui ont compris son rôle dans l'édification de la nouvelle société du savoir de l'information.
En mars 2000, au sommet européen de Lisbonne, lorsque les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne se sont mis d'accord sur l'objectif très ambitieux de « faire de l'Union européenne, à l'horizon 2010, la société de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde, à même de générer une croissance économique soutenable, des emplois plus nombreux et meilleurs et plus de cohésion sociale », un constat s'est vite imposé à eux : « Le rôle du secteur culturel et créatif dans ce contexte reste largement ignoré. » Les experts expliquaient alors que « ce n'est que récemment que l'on commence à s'intéresser à mesurer les performances socioéconomiques du secteur. Et l'exercice est loin d'être consensuel. Pour beaucoup, la fonction de la culture est d'éclairer ou de divertir et son apport économique est considéré comme marginal, confiné au domaine de l'intervention publique. » Et l'Union européenne de lancer alors une vaste étude sur la culture qui a permis de montrer comment la culture tire le développement économique et social ainsi que l'innovation et la cohésion. Le secteur culturel et créatif est un secteur de croissance qui se développe plus rapidement que le reste de l'économie. La même constatation s'applique à l'emploi culturel. Le secteur pourvoit en effet de nombreux emplois, divers et requérant souvent un haut niveau de qualification. Là encore, le secteur présente de meilleures performances que le reste de l'économie. Le secteur tire aussi la croissance d'autres secteurs de l'économie européenne et en particulier le secteur des NTIC. Hormis ces conclusions, l'étude de l'Union européenne présente des éclairages intéressants au plan de la méthode d'approche du secteur de la culture, particulièrement le champ d'investigation, à savoir le secteur culturel et créatif, subdivisé en trois grandes catégories :
Les secteurs non industriels produisant des biens et services destinés à être consommés sur place (comme un concert, une foire artistique, une exposition). Il s'agit là des arts visuels (peinture, sculpture, artisanat, photographie), du marché de l'art, des arts du spectacle (comprenant l'opéra, les orchestres, le théâtre, la danse, le cirque) et le patrimoine (incluant les musées, les sites patrimoniaux et archéologiques, les bibliothèques et archives).
Les secteurs industriels produisant des biens et services destinés à être reproduits en vue d'une dissémination de masse (par exemple un livre, un film, un enregistrement sonore). Ils constituent les « industries culturelles » incluant le film et la vidéo, les jeux vidéo, la radiodiffusion, la musique, l'édition.
Le secteur créatif : au sein du « secteur créatif », la culture devient un « input » dans la production de biens non culturels. Ce secteur inclut des activités comme le design (mode, design intérieur, conception de produits), l'architecture ou la publicité. La créativité est considérée dans cette étude comme l'utilisation de ressources culturelles sous la forme d'une consommation intermédiaire au cours du processus de production dans les secteurs non culturels et, partant, comme une source d'innovation.
Une classification qui englobe les deux secteurs économiques schématisés par William Baumol : le secteur progressif qui se caractérise par une forte progression des gains de productivité, une forte intensité capitalistique ainsi qu'un haut niveau des salaires, le secteur archaïque qui se caractérise à contrario par une faible progression, voire une stagnation des gains de productivité, une faible intensité capitalistique ainsi qu'un bas niveau des salaires. Si l'on peut indexer les industries culturelles et créatives dans le secteur progressif, il est à coup sûr, Baumol le reconnaît pour ce qui est du spectacle vivant, les activités culturelles non industrielles sont inscrites au secteur archaïque et requièrent l'intervention de fonds publics pour leur pérennité. Au-delà, l'argument est valable pour les biens culturels dans leur ensemble, on peut avancer que la consommation de biens culturels produit des effets bénéfiques pour l'ensemble de la société qui ne sont pas pris en compte par le marché. Une population mieux éduquée, dont le sens critique est entretenu par la lecture régulière, sera plus à même de prendre de bonnes décisions lorsqu'elle est consultée qu'une population ignorante, par exemple. Un peu comme la fameuse réflexion de Victor Hugo qui disait : « Ouvrir une école signifiait fermer une prison. » De ce fait, la société peut être fondée à subventionner la consommation de biens culturels ainsi que leur production, soit directement ou indirectement. Le produit culturel présente des spécificités qui le distinguent des autres biens industriels et le condamnent à faire face à des défaillances des règles du marché et de la loi de l'offre et de la demande. Partant de là, et au regard, notamment du lien entre le produit culturel et la conservation et l'expression de l'identité, les pouvoirs publics interviennent pour accompagner la création, la production et la diffusion culturelles. Ces interventions prennent généralement l'une des trois formes suivantes :
Les subventions directes : pour des établissements, des associations, ou pour des programmes culturels ;
les dispositions d'ordre fiscal : baisse de TVA (les livres bénéficient d'un taux de TVA réduit dans de nombreux pays), abattements pour les entreprises mécènes, crédits d'impôts pour des investisseurs ou pour des donations. Pour les beaux-arts, les œuvres sont souvent exclues de l'impôt sur la fortune ou de l'évaluation des successions ;
les dispositions régulant les rapports dans une chaîne (ou une filière) entre les différents acteurs qui y interviennent et en particulier entre les producteurs et les diffuseurs (par exemple, les organismes de télévision devant consacrer une partie de leur chiffre d'affaires (entre 1 et 5% selon les pays) à investir dans la production audiovisuelle et cinématographique. Dans le domaine du livre, dix pays en Europe ont une forme de prix unique du livre. A travers la classification des secteurs culturels et créatifs, il apparaît clairement que, si pour les activités non industrielles, le financement public doit se faire de manière directe et soutenue, il peut en être autrement pour les industries cultuelles et créatives, génératrices de revenus, mais dont les spécificités requièrent d'autres formules d'intervention des pouvoirs publics, induites par une politique culturelle qui viserait notamment à mettre en place les conditions de développement d'une véritable industrie culturelle et créative et concevrait ainsi des mesures d'incitation et de régulation pour ce faire.


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