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Investir à la Bourse des actions d'Alger ? (1re partie)
Publié dans El Watan le 15 - 08 - 2017


Préambule
L'économie du pays est à un tournant majeur de son développement. Elle doit continuer de croître pour créer des emplois aux jeunes qui arrivent sur le marché du travail et maintenir ou améliorer le niveau de vie des Algériens. Depuis le début de ce siècle, le financement de l'économie a été en très grande partie assuré par la dépense publique. Ce n'est plus possible étant donné le prix du baril de pétrole qui sera durablement loin de 100 dollars. Le financement doit donc provenir d'ailleurs : épargne des individus et de divers opérateurs économiques et sociaux (publics et privés), création monétaire par la Banque d'Algérie pour refinancer les banques, investissements étrangers, et à terme endettement externe.
L'épargne des individus et autres opérateurs économiques a trois canaux pour financer l'économie du pays : le dépôt (à vue et à terme) de l'argent dans les banques qui prêteront cet argent à l'Etat et à des entreprises pour créer de la richesse ; le prêt direct par l'achat d'obligations émises par l'Etat et les entreprises ; et enfin l'achat direct de parts d'entreprises, en général à travers la Bourse. Dans cette note, nous allons nous concentrer exclusivement sur le dernier point, c'est-à-dire l'investissement des individus et opérateurs économiques réalisé en achetant des actions d'entreprises cotées en Bourse.
Cet investissement aide au financement de l'économie, car l'introduction en Bourse d'une entreprise se fait pour au moins trois raisons : augmenter le capital de l'entreprise pour l'aider à se développer ; fournir de l'argent aux anciens propriétaires pour lancer d'autres activités ; changer de fonctionnement dans la gestion de l'entreprise pour la rendre plus efficace. La Bourse d'Alger est dans un état rachitique et franchement lamentable. Il ne s'y passe pas grand-chose. Il n'y a que cinq sociétés cotées, l'une d'elles affirmant publiquement qu'elle pense sérieusement à se retirer de la Bourse, et le volume de transactions est très faible.
Pourquoi est-ce que la Bourse d'Alger est dans cet état ? Il y plusieurs raisons qui seront développées ci-dessous : l'Etat a peu privatisé et a préféré le faire en dehors de la Bourse. Les sociétés privées d'origine familiale n'aiment pas la Bourse . La cotation en Bourse impose une transparence qui rend la rentabilité plus difficile face à la concurrence déloyale qu'impose l'économie informelle.
Mais il y a des raisons plus profondes. Il y a un vrai manque de culture financière parmi nos concitoyens, mais aussi parmi beaucoup de dirigeants économiques et politiques. La presse spécialisée n'existe presque pas par manque de financements. Ce qui nous amène à nous demander quels sont les indicateurs financiers qu'un investisseur en Bourse devrait évaluer, question qui est au cœur de la présente note. Il y en a plusieurs.
Pour simplifier, les indicateurs les plus standards consistent à évaluer le cours de l'action et ses variations, les dividendes distribués par la société, les revenus nets annuels et le capital de la société. Ces indicateurs seront présentés ci-dessous et nous regarderons de près leurs valeurs pour les cinq sociétés cotées et leurs évolutions depuis l'introduction en Bourse de ces sociétés. Les indicateurs financiers sont très informatifs et nous donnent plusieurs enseignements.
D'abord, la crise économique est bien là. Les revenus générés par certaines entreprises sont en très forte baisse. Les entreprises dont l'actionnaire majoritaire est l'Etat semblent sous-évaluées, mais d'un autre côté cette sous-évaluation est peut-être justifiée par le reflet d'une gestion étatique non-efficace. Pour preuve, une de ces sociétés avait en 2015 un capital proche de celui d'une entreprise privée du même secteur, mais a généré presque quatre fois moins de revenus.
Une entreprise complètement privée semble être sous-évaluée et mène une politique de distribution de dividendes très agressive, probablement au détriment de sa croissance. Enfin, une analyse historique des données suggère que certaines entreprises ont été probablement surévaluées à leur introduction en Bourse . Beaucoup d'investisseurs ont perdu de l'argent à l'introduction de ces entreprises, rendant la Bourse non attractive, constituant une vraie raison de l'état actuel de la Bourse.
Certains propriétaires majoritaires des entreprises complètement privées se plaignent de sous-évaluations des cours de leurs entreprises et incriminent le fonctionnement de la Bourse. L'analyse faite ci-dessous contredit ces assertions, mais insiste sur la faible demande en actions et actifs financiers pour expliquer des cours relativement bas.
Les pouvoirs publics devraient lancer des plans d'épargne-actions ainsi que des plans de retraite complémentaire avec incitations fiscales pour stimuler la demande d'actifs financiers. De la même manière, nous suggérons d'augmenter les incitatifs fiscaux à l'introduction en Bourse pour attirer plus d'entreprises. Augmenter la taille de la Bourse et plus généralement la taille du secteur financier est un enjeu majeur pour le développement de l'économie et sa diversification que les pouvoirs publics doivent prendre à bras-le-corps.
Dans ce qui suit, nous allons discuter des difficultés de la Bourse d'Alger à être attractive. Nous présenterons ensuite les indicateurs financiers les plus usuels pour évaluer le cours boursier d'une entreprise, et nous les appliquerons dans une étape ultérieure aux entreprises cotées à la Bourse d'Alger.
Nous aborderons ensuite le fonctionnement de la Bourse et proposerons quelques solutions pour l'améliorer et rendre la Bourse plus attractive. La section d'après aborde le problème de surévaluation des cours à l'introduction de certaines entreprises, alors que la suivante rappelle quelques règles simples d'investissement, en particulier en temps de crise économique. Enfin, la dernière section donne une liste de recommandations pour développer la Bourse.
1. Une Bourse d'Alger peu attractive à la taille rachitique
La Bourse des actions d'Alger a du mal à être attractive. Il y a uniquement cinq sociétés cotées, et les volumes transigés sont faibles. Or, cette Bourse doit devenir attractive dans le contexte actuel où l'épargne des individus et des entreprises doit participer plus activement au financement de l'économie.
Il y a évidemment plusieurs raisons à la faiblesse de taille de la Bourse d'Alger. D'abord, l'Etat a peu privatisé et a préféré le faire en dehors de la Bourse. Ainsi, deux sociétés cotées appartenaient à l'Etat qui reste d'ailleurs actionnaire majoritaire. Ensuite, les entreprises privées sont souvent familiales, et il est bien connu de par le monde que ces dernières ont plus de mal à décider de se coter en Bourse.
Notons d'ailleurs que sur les trois entreprises totalement privées, une seule s'est présentée à la Bourse pour une augmentation de capital. L'informel n'aide pas non plus. Une société cotée en Bourse a des obligations de transparence qui sont dissuasives pour les secteurs à fort potentiel informel comme la distribution, l'agroalimentaire, le BTP et l'agriculture. Notons qu'une seule entreprise cotée est dans un de ces secteurs. La contrainte informelle pose deux problèmes aux investisseurs de ces secteurs.
D'une part, les sociétés cotées font face à une concurrence déloyale des entreprises du même secteur qui trempent dans l'informel ; c'est aussi le cas des sociétés non cotées et qui ne sont pas impliquées dans l'économie informelle. D'autre part, comment être totalement sûr que la société cotée ne trempe pas dans l'informel ? Une autre raison est le manque de culture financière. Comment analyser les performances des sociétés cotées ? Plus généralement, il existe dans le pays un manque de culture pour les calculs financiers et l'analyse financière.
Par exemple, étant donné ses propres revenus, quels sont les dépenses et dettes que l'on peut se permettre ? Evidemment, un banquier peut le faire pour vous… Autre question, comment évaluer si le montant de sa retraite sera suffisant pour maintenir le même niveau de vie qu'avant le départ à la retraite ? C'est une question cruciale, car si la réponse est positive, l'incitation à la consommation sera élevée, dans le cas contraire c'est l'incitation à l'épargne qui sera élevée. De combien ?
La culture financière nécessite aussi l'existence de médias spécialisés et compétents dans l'analyse financière. Ces médias ne tombent pas du ciel ; ils ont besoin de financements. Tant que le public ne s'y intéresse pas trop, en plus des difficultés que la presse écrite vit à cause d'internet, il paraît nécessaire que les acteurs de la Bourse et les pouvoirs publics financent le développement de ces médias. Il n'y a pas de miracle, ces aides passent par des subventions et le sponsoring, de la publicité et des incitations fiscales, et par la création de prix de la meilleure revue financière de l'année, du meilleur analyste financier de l'année, etc.
La religion est parfois invoquée pour expliquer le peu d'engouement de nos compatriotes pour les produits financiers. La possession d'actions est évidemment compatible avec la charia, possédant des actions revenant à être copropriétaire d'une entreprise. Enfin, il faut admettre que certains paramètres financiers très importants ne fonctionnent pas bien dans le pays, à commencer par les taux d'intérêts. Par exemple, le taux de rémunération de l'épargne devrait être au-dessus de l'inflation anticipée. C'est loin d'être le cas. Nous avons des taux d'intérêts réels largement négatifs, ce qui n'aide pas au développement des marchés financiers et pousse l'argent à quitter le circuit financier.
2. Indicateurs financiers pour l'analyse des cours boursiers
Revenons à l'analyse des performances des sociétés cotées qui est le principal objet de cette note. Il y a quatre grands paramètres que les financiers observent de près : les prix, les dividendes, les revenus et les capitaux de l'entreprise. Ce sont ces paramètres et indicateurs qui en découlent que nous présentons ci-dessous. Il y a d'autres indicateurs qui peuvent être pris en compte, certains propres à l'entreprise en question, d'autres propres au secteur et à l'évolution du marché mondial.
Warren Buffet, qui est à la tête d'un des plus grands fonds d'investissement au monde, est très connu pour justement décortiquer les bilans des entreprises qu'il cible. Notons aussi que d'autres indicateurs sont considérés, en particulier dans le milieu académique, comme le ratio de Sharpe (ratio du rendement sur la volatilité de l'action) et le coefficient beta (qui mesure l'exposition du risque de l'entreprise au risque de l'indice global du marché). Nous allons maintenant détailler les indicateurs.
Le prix et ses variations. Le prix d'un actif étant difficile à interpréter dans l'absolu sans regarder d'autres paramètres financiers, il est habituel de présenter la variation du prix en pourcentage. Ainsi, on présente souvent la variation journalière (par rapport au prix de clôture de la veille), la variation hebdomadaire (variation par rapport à la dernière cotation de la semaine passée), et aussi la variation depuis le début d'année. Ces variations sont une bonne indication de la tendance de la cotation de l'action.
Rendement de l'action. Cet indicateur compare la somme de la valeur actuelle de l'action et du dividende de l'année par rapport au prix de l'action de l'an dernier. Il est défini comme le ratio des deux quantités, moins un, et il est donné en pourcentage. Il mesure bien la rentabilité de l'action puisqu'il donne le gain ou la perte (en pourcentage) de l'achat d'une action l'année précédente et sa revente à la date actuelle. Un rendement positif sur une période donnée, par exemple entre décembre 2016 et août 2017, veut dire que si on a acheté une action en décembre 2016 et qu'on l'a vendue en août 2017, alors on aura fait un bénéfice dont le montant est le rendement fois la mise initiale. Si le rendement est négatif, l'investissement serait une perte du même montant.
Le rendement peut être positif ou négatif. Par contre, le rendement espéré d'une action est (en général) positif et plus élevé que le taux d'intérêt des obligations (souveraines) car l'achat d'une action est un investissement plus risqué que l'achat d'une obligation. Cette différence est appelée prime de risque de l'action. Le «dividend-yield» ou le ratio dividende-prix (noté D/P ou DPR). Cet indicateur est donné en pourcentage. Il indique l'argent que l'on pourrait recevoir si on possède une action.
C'est donc une bonne comparaison par rapport à d'autres produits comme les taux d'intérêts. Néanmoins, cet indicateur n'est pas le rendement de l'action, ce dernier incluant la variation du cours de l'action comme indiqué ci-dessus. La distribution de dividendes est faite par la direction de l'entreprise et entérinée par l'assemblée des actionnaires. Cette distribution est donc étroitement liée à la politique de croissance de l'entreprise. Ainsi, la direction de l'entreprise peut moduler le montant des dividendes en fonction d'objectifs stratégiques.
Ainsi, elle peut décider de ne pas donner de dividendes soit parce qu'elle est en difficulté ou parce qu'elle préfère garder l'argent pour investir ou pour d'éventuelles acquisitions d'entreprises. Par exemple, à partir de 2005, le défunt PDG d'Apple, Steve Jobs, était opposé à distribuer des dividendes afin de garder cette manne pour les investissements et les acquisitions de start-up et de brevets.
Les choses ont bien changé depuis sons décès, puisque Apple a recommencé à distribuer des dividendes en 2012, soit une année après le décès de Steve Jobs, les financiers ayant repris le dessus du management, surtout que les montants accumulés étaient très élevés. Par contre, la direction d'une entreprise peut estimer que la valeur de son action est sous-estimée et qu'en distribuant un dividende élevé elle peut attirer des investisseurs, cette distribution pouvant être au détriment de la croissance de l'entreprise.
Enfin, il est aussi important de noter qu'il est très utile de comparer des entreprises du même secteur. Un «dividend-yield» peut être faible car le secteur est en pleine expansion avec une croissance des prix élevée, par exemple le secteur des nouvelles technologies, ou il peut être élevé car l'industrie est bien en place (banques ; services publics). On peut dire que toute chose égale par ailleurs, plus le ratio «dividend-yield» est élevé, plus l'action est attractive. Le ratio «price-earning» ou le ratio prix sur résultat net par action (noté P/E ou PER).
A la fin de chaque année, l'entreprise cotée calcule ses revenus nets de tout, incluant les impôts, pour obtenir le résultat net (earnings) de l'année ; parfois, il est aussi calculé semestriellement, voire trimestriellement pour les Bourses les plus développées. Ce résultat net annuel est divisé par le nombre d'actions pour obtenir le résultat net par action. Ensuite, le cours de l'action est comparé par rapport à ce résultat net en calculant le ratio noté PER. Ce ratio mesure le nombre d'années qu'il faudrait garder l'action pour pouvoir en acheter une autre si on suppose que tout le résultat net est donné en dividendes.
En pratique, ce n'est jamais le cas car une entreprise fait des investissements et des provisions, mais ce ratio donne une bonne indication de l'état de santé de l'entreprise. Notons aussi que cet indicateur peut être négatif si l'entreprise fait des pertes. C'est l'indicateur préféré de beaucoup d'analystes financiers. Comme pour le «dividend-yield», il est important de comparer des entreprises du même secteur. On peut dire que toute chose égale par ailleurs, plus le ratio «price-earning» est bas, plus l'action est attractive.
Le ratio «price to book» ou le ratio prix sur capital par action (noté P/B ou PBR). Chaque fin d'année, une entreprise publie le montant de ses capitaux propres. Ces capitaux incluent le capital émis, le capital non appelé, les primes et réserves, les écarts de réévaluations, le résultat net de l'année, et tous autres capitaux. C'est la valeur du livre comptable (book) de l'entreprise. Cette valeur est divisée par rapport au nombre d'actions pour obtenir la valeur comptable d'une action.
Le PBR compare donc la valeur de marché de l'entreprise par rapport à sa valeur comptable. Un ratio bien plus faible que le chiffre 1 suggère une sous-évaluation de l'entreprise, alors qu'un ratio bien plus élevé que 1 suggère une surévaluation de l'entreprise. Néanmoins, il faut être prudent quand le PBR est trop élevé, au moins pour deux raisons. D'une part, le livre de comptabilité est régi par des règles bien précises. Par exemple, la valeur de beaucoup d'actifs (comme l'immobilier) est souvent celle de leur acquisition, et qui peut-être bien en dessous du prix actuel.
De la même manière, un livre comptable traite de la même manière toute les dépenses, par exemple pour l'achat de voitures ou pour la recherche et le développement ; ce n'est pas le cas des marchés financiers. Plus important, le livre de comptabilité ne tient pas compte de ce que l'on appelle les actifs non tangibles d'une entreprise, par exemple son nom, sa réputation, son lien avec sa clientèle, ou la réputation de son directeur général. Ces actifs non tangibles ne sont pas pris en compte dans le livre de comptabilité, alors que c'est le cas du pris boursier.
Encore une fois, il est toujours utile de comparer cet indicateur pour des sociétés du même secteur. Typiquement, les entreprises des secteurs des services ont relativement peu d'actifs physiques et donc un PBR élevé. On peut dire que toute chose égale par ailleurs, plus le ratio «price to book» est bas, plus l'action est attractive. Avant d'aller plus loin, il est important de discuter de quatre points très importants : la valeur intrinsèque d'une action, les anticipations, l'information et l'immobilier.
Prix intrinsèque d'une action. Quelle est le prix d'une action d'une entreprise ? Pas très facile à déterminer. On pourrait dire que l'action est un bien comme un autre et son prix devrait être obtenu comme prix d'équilibre entre l'offre et la demande. Ce qui est vrai, mais implique qu'il faut connaître tous les paramètres de l'économie (qui veut acheter ; leur richesse, etc.). Trop compliqué. La théorie financière s'est donc développée pour donner des prix. Mais ces théories font appel à des hypothèses.
Une des théories est l'actualisation des cashflow futurs de l'entreprise, avec un taux d'actualisation à fixer. Cette théorie suppose qu'il n'y a pas de frictions (imperfections) dans les marchés, incluant le manque de liquidité des actifs. Ce n'est clairement pas le cas sur la Bourse d'Alger, alors que cette théorie a été utilisée pour fixer les cours d'introduction des Bourses cotées. Nous reviendrons sur ce point plus loin.
Les anticipations. L'acte d'investir dans l'achat d'actions d'une entreprise ou tout autre investissement (comme l'achat d'un appartement pour une location) est d'abord basé sur les anticipations que l'on a de l'évolution de l'entreprise (appartement). Le prix du marché reflète ces anticipations. Il arrive souvent que trois indicateurs mentionnés ci-dessous, à savoir le DPR, le PER et le PBR soient mauvais mais que le marché anticipe un bon développement de l'entreprise et donc une augmentation des prix. C'est typiquement le cas des entreprises naissantes et les start-up.
Par exemple, les entreprises Facebook et Google qui sont parmi les plus grandes capitalisations boursières des Etats-Unis ont de mauvais indicateurs financiers. Par exemple, pour Facebook, on a : DPR=0 ; PER=45 ; PBR=7,95. Par contre, pour Apple, ces indicateurs sont DPR=1,56% ; PER=18,5 ; PBR=5,8, alors que pour Microsoft ces indicateurs sont DPR=2,1% ; PER=22,3 et PBR=7,8. Pour IBM, nous avons DPR=3,9% ; PER=12 et PBR=7,3. Chez nos voisins tunisiens, la moyenne de ces chiffres pour 2017 sur les 20 plus grandes capitalisations boursières sont DPR= 3,6% ; PER=14,4 et PBR=1,8.
Informations et nouvelles. Un corollaire de l'importance des anticipations dans la formation des prix des actions est l'importance de l'information et des nouvelles. Les nouvelles influent sur les prix. Si on a une gestion active de son portefeuille financier, on doit être l'affût des nouvelles qui concernent l'entreprise et son secteur. Ce qui montre encore une fois l'importance de l'existence de médias spécialisés et de qualité. Par ailleurs, il faut nuancer l'interprétation des nouvelles.
Une nouvelle n'est pas bonne ou mauvais en soi. Elle est bonne ou mauvaise par rapport à ce qui était anticipé par le marché. Si le marché anticipe que les revenus d'une entreprise vont augmenter de 20%, cette anticipation étant intégrée dans le cours de l'entreprise, alors une annonce d'une augmentation de 10% des revenus sera prise comme une mauvaise nouvelle (par rapport à une augmentation anticipée de 20%), ce qui fera baisser le cours de l'action.
A contrario, si l'anticipation est une baisse de 20% des revenus alors que l'annonce est une baisse de 10%, la nouvelle sera prise comme bonne et le cours va augmenter. D'où l'importance encore une fois de l'existence de médias spécialisés pour informer le public sur les anticipations du marché avant les annonces de bilans financiers.
Immobilier. Tout ce qui est écrit ci-dessus sur les indicateurs financiers de l'évaluation du cours d'une société cotée en Bourse s'applique à l'immobilier, soit l'investissement préféré des Algériens. Le prix du bien est sa valorisation de marché (pour simplifier, nous dirons qu'il y a une seule action). Le loyer annuel (moins les frais et les impôts) représente le résultat net de l'actif. Une partie de cet argent peut servir à améliorer l'état du bien immobilier ; le reste constitue le dividende.
Enfin, le capital du bien immobilier est aussi son prix de marché (ce qui donne un PBR de 1). Nous ne disposons pas de données pour situer le PER de l'immobilier en Algérie. Une évaluation sur certains exemples à Alger donne à l'auteur de cette note un PER entre 20 et 30, ce qui est élevé. L'immobilier est cher en Algérie, en particulier à Alger.
3. Les indicateurs financiers des sociétés cotées à la Bourse d'Alger
Dans ce qui suit, nous allons analyser les indicateurs donnés ci-dessus pour les cinq entreprises cotées afin de se faire une idée de l'évaluation actuelle de ces entreprises. Certains actionnaires historiques (et majoritaires) des entreprises totalement privées qui sont cotées prétendent que leurs entreprises sont sous-évaluées par la Bourse. Ils se plaignent souvent du mauvais fonctionnement de la Bourse d'Alger pour expliquer la baisse des cours de leur entreprise constatée sur plusieurs années. Les indicateurs financiers vont nous éclairer sur cette évaluation.
Nous prendrons la cotation du 1er août 2017 comme dernière cotation. Nous présenterons les entreprises par ordre décroissant de leur capitalisation boursière en date du 1er août 2017, et qui sont : Biopharm : 29,3 milliards DA ; Saidal : 6,7 milliards DA ; El Aurassi : 3,2 milliards DA ; NCA Rouiba : 2,8 milliards DA ; Alliance Assurances : 2,4 milliards DA. Toutes les données financières utilisées ci-dessous proviennent de documents disponibles sur le site internet du régulateur du marché financier qui est la COSOB (http://www.cosob.org/etas-financiers-des-emetteurs/) et de la Bourse d'Alger.
Pour chacune des entreprises, le tableau 1 donne : le cours du 1er août 2017 ; le cours de fin d'année 2016 ; le dividende distribué en 2017 pour l'année 2016 ; la variation du cours entre fin décembre 2016 et début août 2017 ; le rendement défini comme le ratio de la somme du cours du 1er août et du dividende distribué en 2017 (pour le compte de 2016) sur le cours de fin 2016, ce ratio étant soustrait de un et exprimé en pourcentage ; le «dividend-yield» calculé comme le ratio du dividende distribué en 2017 (pour l'année 2016) par rapport au cours du 1er août 2017 ; le ratio «price-earning» calculé comme le rapport de la cotation du 1er août 2017 sur le résultat net (earning) par action de l'année 2016 ; le ratio «price to book» calculé comme le rapport de la cotation du 1er août 2017 sur la valeur comptable (book) par action de l'année 2016.
Notons que l'entreprise Saidal a reporté son assemblée générale et n'a pas communiqué les résultats de l'année 2016 (dividende, résultat net, capitaux propres). Ce report est motivé par la délocalisation du site d'El Harrach pour utilité publique. Elle a communiqué les résultats du premier semestre 2016 qui sont en nette hausse par rapport à celui de 2015 (près de +50%), mais comme le second semestre de 2015 était particulièrement mauvais, nous préférons utiliser le résultat annuel de 2015 et non pas annualiser le résultat du premier semestre de 2016. Le tableau 1 utilise les chiffres de 2015 pour le résultat net et capitaux propres afin d'obtenir les indicateurs PER et PBR et un dividende nul pour calculer le rendement sur l'année 2017 de l'action Saidal.
Variation du cours. Les variations sur l'année 2017 des trois entreprises totalement privées (Biopharm, NCA Rouiba et Alliance Assurances) sont négatives, alors qu'elles sont positives pour les deux entreprises partiellement publiques (Saidal et El Aurassi). Certaines de ces entreprises ont distribué des dividendes au début de l'été, ce qui a impacté leur cours.
En effet, quand une société distribue un dividende, une décote égale au dividende est faite du cours de la Bourse, l'idée est que le prix de marché avait intégré le dividende. Par exemple pour Biopharm qui a annoncé lors de son assemblée générale des actionnaires du 20 juin 2017 une distribution d'un dividende de 66 DA par action, une décote de 65 DA a été faite sur le cours en date du 12 juillet. (A suivre)


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