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Science et réticence(s)
Publié dans El Watan le 15 - 05 - 2010

« L 'encre du savant est plus sacrée que le sang du martyr » Hadith du Prophète (QSSSL)
« La science restera toujours la satisfaction du plus haut désir de notre nature, la curiosité ; elle fournira à l'homme le seul moyen qu'il ait pour améliorer son sort » Ernest Renan
Quelle est la valeur d'une vie humaine ? La réponse à cette question pourrait à coup sûr déterminer la possibilité de faire de la science et du savoir l'unique moment, l'unique espace où l'avenir de l'espèce humaine pourrait se négocier de manière salutaire pour les uns et rédemptrice pour les autres, car c'est pour l'homme que nous vivons et c'est par lui que nous survivrons. Chaque fois qu'un type de gouvernance circonscrit sa politique à un désir obsessionnel de perdurer, un art de gouverner au service de passions égocentriques, au détriment de toutes les autres causes, la promotion de la science et du savoir pour le bonheur des peuples restera à tout jamais un vœu pieux.
C'est un fait pour le moins insolite et inhabituel que des hommes d'Etat rentrent dans la légende après avoir été, leur vie durant, d'ardents promoteurs et protecteurs des sciences, des arts et des lettres, car d'habitude, ce sont des exploits d'un autre genre qui concourent à fabriquer des mythes et faire d'un empereur, d'un roi ou d'un gouverneur un demi-dieu. Néanmoins l'Histoire, ingénue et impartiale, réserve dans son propre panthéon une place de choix pour ces hommes hors du commun qui ont su, à un moment où nul ne pouvait concevoir l'avènement d'un tel prodige, insuffler à l'âme de l'époque des désirs et des priorités moins concupiscents.
Que pourrait retenir l'histoire du règne de Hârûn EI-Rachîd, d'EI-Ma'mûn et de tous les autres rois-philosophes de l'Islam, hormis leur prodigieuse faculté de créer ces environnements propices à l'éclosion du progrès. Qu'est-ce qui a bien pu pousser ces hommes exceptionnels à inaugurer une tradition qui, jusqu'à nos jours, reste une utopie pour de nombreux pays dotés de ressources financières inépuisables. Des souverains désireux de répandre le savoir et d'éclairer la réflexion des élites eurent ce génie de fonder des bibliothèques qui firent de véritables institutions. L'émergence de ces mecques du savoir dans des périodes charnières représentait un tournant culturel qui eut un retentissement universel.
Sous l'impulsion du Calife AI-Ma'mûn, au IXe siècle, la Maison de la Sagesse voit le jour, en authentique centre de la culture arabe et universelle de l'époque. Cette institution fit de Baghdad, capitale du califat, l'équivalent de ce qu'avait été Alexandrie. Un haut lieu d'études et de rencontres pour les savants de toute la terre habitée. Au Xe siècle, à Cordoue, le calife EI-Hakam II constitue une bibliothèque qui s'enorgueillissait de ses centaines de milliers de volumes. Il dépense beaucoup d'argent pour acquérir des livres dans les pays où il avait implanté des libraires-correspondants. Il installe à son service de nombreux libraires-copistes et relieurs et fait rédiger des livres dans les domaines les plus divers. L'intégrisme de nos aïeux réduisit ce temple des lumières en véritable barbecue. Le feu a toujours été là pour contrecarrer l'érudition.
Au XIe siècle, au Caire, le calife fatimide AI-Hâkim fonde une Maison du savoir qu'il pourvoit de nombreux livres de sa collection personnelle, où il place des bibliothécaires et des gardiens qu'il paye de ses propres deniers. On y débat avec ardeur de littérature et de droit musulman. Lorsque le pouvoir passa entre d'autres mains, ses livres furent vendus aux enchères pour alimenter l'effort de guerre. Drôle de destin réservé au savoir.
Un fait remarquable nous est enseigné par l'histoire. L'essor de la science et du savoir est intimement lié à l'inébranlable volonté des hommes et du pouvoir qu'ils exercent, soit dans le cadre de leurs activités politiques, soit au sein de cénacles volontaristes. Leur déclin témoigne indubitablement de la présence d'une politique minée par des urgences autodéfensives et d'une atomisation des élites nationales. On peut tout confisquer à l'histoire sauf ces moments qui la rendent elle-même digne d'intérêt : figer pour l'éternité des faits qui transcendent nos indignes et interminables trivialités.
Lorsque la bibliothèque d'Alexandrie fut fondée au III e siècle av. J-C. par les Ptolémées, aussi bien ses fondateurs que les érudits et les lettrés qui y exerçaient étaient loin d'imaginer qu'ils allaient avoir autant d'influence pour susciter, 23 siècles plus tard, une certaine nostalgie et faire des émules parmi nos frères égyptiens d'aujourd'hui. Cet Orient toujours pittoresque décide de se réapproprier, par le truchement d'un étrange clonage, un mémorable patrimoine, symbole d'une philosophie de vie qui demeure le substrat à toutes les formes de progrès. Ainsi, cette fameuse bibliothèque d'Alexandrie, dont le fonds livresque avoisinait allégrement les 700 000 volumes ou parchemins, allait être ressuscitée en 1989 par l'Etat égyptien qui décide de lancer le projet d'une nouvelle bibliothèque, édifiée sur l'emplacement même de l'ancienne bibliothèque de Ptolémée. (1)
Il aurait fallu trois formidables brasiers pour venir à bout de ce gigantesque temple du Savoir antique érigé par des gens qui aspiraient à faire de leurs neurones et de leurs papyrus les seuls instruments à même de hâler l'humanité vers ces cimes inaccessibles où l'homme peut enfin se regarder en face. A Baghdad comme à Cordoue ou à Damas, sans ces terreaux, ces pépinières du savoir sponsorisées par l'Etat lui-même (d'obédience abbasside ou omeyade), l'Islam n'aurait tiré aucune gloire et n'aurait guère pu fabriquer sa civilisation, car la vie ne se joue pas uniquement dans les mosquées.
Chaque fois que des sommités comme Ibn-Sina, Al-Ghazali, Ibn-Rochd, AI-Khuwarizmi, Al Biruni, Ibn Tufayl, AI-Kindi avec, parmi eux, d'autres savants comme Yuhanna Ibn Masawayh ou Maïmonide, ont pu faire valoir leurs talent et compétences, ce n'est que grâce au soutien moral et financier que leur manifestait un pouvoir politique favorable. « Quand ces derniers (Hârun el-Rachid et Al-Ma 'mûn) créérent la maison de la sagesse (Bayt al-hikma), les figures scientifiques les plus éminentes de l'époque se groupèrent autour d'elle, de la même façon et pour les mêmes raisons qu'à l'époque hellénistique, on accourait à la bibliothèque et au musée d'Alexandrie. Les scientifiques qui y étaient accueillis non seulement disposaient d'une excellente bibliothèque et de moyens matériels pour poursuivre leurs travaux, mais encore percevaient des traitements dont il nous est difficile d'apprécier la valeur...
Al-Ma'mûn payait les œuvres traduites au poids. Si un ouvrage pesait une livre, on récompensait le traducteur d'une livre d'or. »(2) Cependant, au moindre changement politique qui considérait le savoir comme élément subversif ou futile préoccupation, ces hommes subissaient immanquablement de terribles disgrâces, en dépit de l'aura dont ils jouissaient et de leur extrême érudition.(3) Ailleurs dans le monde, même en temps de guerre, lorsque les pouvoirs en place sont assez futés et clairvoyants pour comprendre que sans la science aucune suprématie n'est viable, un certain espace reste toujours disponible à celle-ci afin qu'elle puisse déployer ses potentialités pour l'objet de ses propres recherches ainsi que pour les intérêts de ses financiers. Peut-on imaginer un seul instant que des militaires partis guerroyer allaient transbahuter avec eux une armada d'érudits ? C'est ce qui se passa lorsque Napoléon entama sa campagne d'Egypte. La défaite et l'immobilisation forcée de cette machine de guerre sur le sol égyptien fut toutefois une aubaine pour les savants qui accompagnaient le général pour d'autres motifs.
Napoléon est mort petit et désespéré inhumé en terre ennemie, mais l'égyptologie est toujours vivante. Une pierre de Rosette qui gisait parmi d'incalculables trésors depuis des millénaires sous les pieds des Egyptiens donnera naissance à cette science grâce à la bienveillance que les pouvoirs politiques successifs ont toujours accordé au savoir. Que subsistera-t-il en fin de compte de ces épopées orientales ? Ce général et sa flotte coulée à Aboukir ou les découvertes scientifiques glanées méticuleusement lors de cette campagne ? Toutes les expéditions et explorations scientifiques motivées par la science ou entamées en guise d'investissements appelés à être rentabilisés à moyen ou à long terme, en temps de paix comme en temps de guerre, ont toujours fait appel à la prodigalité d'un pouvoir politique ou d'un mécénat disposé à relever des défis et à courir certains risques.
Sans les fonds de Ferdinand V, roi de Castille, et la reine Isabelle, Christophe Colomb n'aurait jamais monté son expédition ce qui permit par la suite à l'Europe et à l'Occident d'en récolter d'incalculables dividendes, un investissement qui s'est avéré considérablement précieux sur tous les plans : culturel, politique, économique et géostratégique. Diagnostic de la Science du terroir L'incommensurable saignée qu'a connue l'Algérie dans ce qu'elle a de plus précieux en termes de capital humain est là pour nous rappeler l'impardonnable négligence que nous avons commise à l'égard de cette précieuse élite que nous n'avons pas pu et su mettre à profit pour le service du développement national.
« Nous avons actuellement entre 40 000 à 60 000 cadres algériens vivant aux USA et au Canada, 7000 médecins et 3000 informaticiens établis en Europe. Il y a également 100 000 entrepreneurs recensés en Europe. En somme, les compétences algériennes génèrent aux pays d'accueil 45 milliards de dollars », déclare le représentant du Réseau Maghtech, Abdelkader Djetlat .(4)
Lors de la 1re Conférence nationale de la recherche scientifique, qui s'est tenue au mois de juillet 2009 aux centres et aux unités de recherche d'Alger, le président Abdelaziz Bouteflika a déclaré aux participants de la conférence que « l'Algérie souhaite bénéficier de toutes les compétences dans les domaines de la recherche scientifique, de l'expertise, des avancées technologiques, ainsi que des investissements financiers réalisés dans des secteurs variés », et que « l'Algérie œuvre sans relâche pour mettre un terme à l'exode des scientifiques algériens, des talents et des innovateurs dans le pays ». Pour ce faire, le gouvernement algérien décide d'augmenter les salaires des chercheurs et de créer un système de primes visant à encourager les chercheurs à rester et à travailler dans le pays.
Patriotisme oblige, certaines initiatives œcuméniques, rassemblant finalement une matière grise algérienne disséminée à travers le globe et les instances supérieures nationales, illustrent de part et d'autre, et surtout chez l'intelligentsia algérienne en exil, cet amour-propre qu'on croyait disparu et qui ose enfin transcender les blocages et réticences d'antan et tenter une percée qui, à défaut de trouver dans l'immédiat toute l'assistance (politique et logistique) nécessaire et complète pour déboucher sur une phase productive, aurait au moins le mérite de jeter les bases d'une nouvelle culture qui, tôt ou tard, trouvera les managers qui lui conviendraient : (hommes d'Etat, élites et hommes d'affaires). Ainsi, en décembre 2008, à l'hôtel Mercure d'Alger eut lieu une rencontre de troisième type : des centaines de chercheurs algériens en exil regroupés au sein de l'ACA (l'Association des compétences algériennes) en collaboration avec le FOREM, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique et d'autres structures décident, lors d'un colloque, de plancher sur les possibilités du « Transfert du savoir-faire, de la modernisation et du développement économique ».
Tous les thèmes sensibles et d'avant-garde seront abordés : micro-électronique, nanotechnologie, cybernétique, TIC, énergie, marché du carbone. Toujours dans la même optique, l'Etat algérien, désormais plus conscient que jamais des profondes carences de l'économie algérienne, entame à son corps défendant une nouvelle approche plus lucide, plus humble et forcément porteuse de grands espoirs. Au début de l'année 2009, l'ambassadeur d'Algérie en France, Missoum Sbih, s'attelle à cette tâche à laquelle tout le monde devrait s'adonner : faire du prosélytisme scientifique au sein du vivier le plus approprié pour les besoins de la cause.
Le représentant de l'Algérie au sein de l'Hexagone rappelle à notre diaspora intellectuelle, lors d'une rencontre sur « La nouvelle économie algérienne », organisée à Paris par le Réseau des étudiants algériens diplômés des grandes écoles françaises (REAGE), l'urgente nécessité d'une forte mobilisation de la part de cette élite, sollicitée désormais par sa mère patrie « à mettre son savoir-faire et son expérience au service du développement national ». La diplomatie algérienne balisera même les multiples et éventuels champs d'intervention de ce SAMU économique : « L'enseignement supérieur et la recherche scientifique », « L'amélioration de la compétitivité des entreprises nationales et le développement des IDE », et enfin « La réalisation d'analyses et d'études pouvant assurer l'essor du pays dans tous les domaines ».
Ces rendez-vous d'une importance capitale auxquels l'Etat algérien semble désormais plus attentif, et dont il est probablement en partie l'instigateur, ont pour ambition de faire profiter le pays de cette matière grise d'origine algérienne essaimée à travers le globe et qui serait appelée, en partenariat avec les compétences nationales, à contribuer au développement de l'économie du pays si l'Algérie faisait l'effort de prospecter, de conquérir et de valoriser ces sources de savoir inestimables restées inexploitées pour des raisons extrêmement futiles et indécentes.
Aussi, faudrait-il, toutefois, permettre à la recherche scientifique d'aller jusqu'au bout de sa gestation et bien au-delà de manière à s'incarner dans des projets tangibles vecteurs de croissance et de richesse. Il ne s'agit pas de s'évertuer, d'une part à allouer de bonne foi de conséquentes enveloppes financières afin de booster la recherche scientifique et toutes les campagnes de marketing afférentes, et finalement s'arrêter à mi-chemin caparaçonnés de brevets et de découvertes qui ne trouvent pas preneurs et qui finiront, telles des archives, par achalander les rayonnages de structures telles que l'lNAPl ou d'obscures administrations parce que certains oiseaux de haut vol, ces manipulateurs chevronnés des hautes sphères n'arrivent pas à se soustraire de leur terrible addiction pour tout ce qui est « clé en main » et « produit fini » ; cette véritable manne pour laquelle ils se sont toujours prêtés à tous les machiavélismes, même au risque de garder la société algérienne otage d'un sous-développement endémique.
Nous ne pouvons, par ailleurs, que saluer certaines décisions entamées par l'Exécutif en vue de protéger l'appareil productif national visant à mettre fin à cette frénésie d'importation de produits, dont le pays est amplement disposé à assurer la production. Il est impossible de réaliser l'ancrage d'une stratégie nationale qui aurait pour but de faire de la recherche scientifique un élément incontournable et fondamental dans l'essor économique et industriel du pays si on n'arrive pas à neutraliser ces lobbys criminels assistés par certaines institutions, et dont les puissants intérêts consistent précisément à garder le pays dans une forme de dépendance totale vis-à-vis de l'import/import .
Beaucoup d'universitaires n'hésitaient pas, dans un passé récent, à dresser un tableau assez sombre sur l'état des lieux. Ils étaient tous unanimes à reconnaitre que le pays avait, jusqu'à récemment, manifesté beaucoup de réticence(s)(5) à mettre en place une véritable stratégie nationale qui prendrait en charge des projets d'envergure, visant à promouvoir l'activité intellectuelle, particulièrement la recherche scientifique, et être notamment en mesure de dégager l'outillage idoine de planification pour la valorisation et l'exploitation effective des résultats. Sachant pertinemment que, d'une part, l'impact de la recherche doit de manière tangible et quantifiable transparaitre à travers toutes les activités sociales et humaines, et afin que, d'autre part, nous puissions à travers la résultante de ces processus, être en mesure de jauger la cohérence et la pertinence de ces volontés politiques mises en œuvre, et justifier l'ensemble des efforts consentis et des ressources financières engagées.
Néanmoins, la volonté politique affichée par l'Etat algérien à travers une législation ambitieuse incite à beaucoup d'optimisme(6). Le nouveau programme 2008-2012 est venu consacrer la recherche scientifique et le développement technologique comme priorité nationale et traduire la volonté de l'Etat de promouvoir le savoir et la culture en tant que facteurs déterminants dans le développement socio-économique et culturel du pays.
Il s'agit seulement de rendre transparent, vérifiable et intelligible pour la société algérienne, la configuration de ces lois sur le terrain, et procéder à une assez large démocratisation de ces opportunités liées à ces programmes de recherche pour l'ensemble de la communauté scientifique et intellectuelle, afin que la société civile puisse s'assurer de la sincérité des promoteurs de cette politique et de la mauvaise foi de leurs détracteurs. Une enveloppe de l'ordre de 100 milliards de dinars a été allouée à la recherche scientifique. Ces ressources financières s'inscrivent dans le cadre du plan quinquennal 2008/2012 qui se propose de mener à terme 34 projets après une évaluation des besoins dans toutes les wilayas du pays, où beaucoup de chercheurs seront mobilisés. Le ministre Haraoubia avait annoncé à cet effet que « la recherche fondamentale sera renforcée dans les années à venir par la recherche d'application, afin de répondre aux besoins socio-économiques de l'Algérie, développer le compter sur soi et le transfert de technologie ».
Dotées d'un pouvoir attractif sans précédent, la bibliothèque d'Alexandrie, en Egypte, et celle de Bayt eI-hikma, à Baghdad, avaient réussi l'exploit de faire converger, à l'intérieur de leurs cités, les matières grises de toutes les nationalités. L'ironie du sort fait que l'Algérie doit relever le défi de seulement rapatrier ses propres savants quant elle n'aura plus à empêcher ceux qui sont déjà là de prendre la clé des champs. Espérons que les 10 millions de livres que l'Egypte compte fourrer dans sa nouvelle bibliothèque d'Alexandrie contribueront à rendre les esprits des autochtones plus tolérants et arriveront·à réduire la misère indescriptible qui règne dans ses ghettos.
Espérons aussi que chez nous, les milliards de dinars injectés dans des plans quinquennaux, ainsi que tous les symposiums feront de l'Algérie un endroit où il fera bon vivre, avec moins d'émeutes, moins de bidonvilles, moins d'exclusion sociale, une santé publique digne de nous et un enseignement de haute qualité. Là où, depuis longtemps, les concepts de société de savoir et d'intelligence économique font l'objet d'un véritable culte, chez nous, on n'ose même pas imaginer les multiples métamorphoses générées par ce type nouveau de carburant du progrès.
« Aujourd'hui, nous évoluons, incontestablement, dans l'époque de la connaissance, une époque qui ne reconnaît point de place à celui qui ne tient pas les rênes du savoir et de la technicité. L'approche de la société du savoir que nous avons adoptée nous a amenés, à juste titre, à accorder un intérêt singulier à la formation du facteur humain sans lequel toute entreprise de développement et de progrès serait une pure chimère. » (7)
Notes de Renvoi :
1) Financée avec les soutiens du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), de l'Unesco et de plusieurs pays arabes et européens, la nouvelle bibliothèque d'Alexandrie est inaugurée en octobre 2002. Avec ses 240 000 ouvrages- elle devrait à terme en accueillir 10 millions - avec une salle de lecture de dimensions exceptionnelles, elle se veut avant tout au service des Egyptiens. Plusieurs musées et centres d'exposition sont intégrés à la bibliothèque, dont un musée des Sciences, un musée des Antiquités et un planétarium.
2) Jules Vernet - Ce que la culture doit aux arabes d'Espagne, 28- (Collection Sindbad).
3) *Ibn-Ruchd (Averroès) cadi de Séville en 1169 et grand cadi de Cordoue en 1171 ; en 1182, il devient premier médecin à la cour d'Abu Yaqub Yusuf, le calife almohade du Maroc et de l'Espagne musulmane, L'hostilité que suscite sa doctrine sur le primat de la raison et sur la religion lui vaut cependant d'être envoyé en exil en 1195, sur ordre d'Abu Yaqub Yusuf . *Ibn-Sina, connu en Occident sous le nom latinisé d'Avicenne, étudie la médecine et la philosophie à Boukhara. A l'âge de dix-huit ans, il est nommé médecin de la cour auprès de l'émir de Boukhara. Il demeure à ce poste jusqu'à la chute de l'empire des Samanides, en 999. Il jouit d'une telle influence qu'il devient l'objet de pressions, sollicitations, jalousies, tantôt poursuivi par ses ennemis, tantôt convoité par des princes adversaires de ceux auxquels il veut rester fidèle. Il est obligé de se cacher à maintes reprises, vivant alors de ses seules consultations médicales. Il mène une vie itinérante et mouvementée, parsemée de fuites, d'emprisonnements et d'évasions.
4) Ces chiffres alarmants qui témoignent d'une situation préoccupante ont été annoncés lors des débats qui ont eu lieu pendant le deuxième séminaire national portant sur « Les compétences algériennes à l'étranger : remobiliser et transférer les connaissances, quels enjeux ? ». Ce séminaire a rassemblé, en avril 2008, le réseau Maghtech, l'association A2T2 et le groupe Algérie sur l'économie du savoir, en partenariat avec l'ISGP.
5) Je me suis farouchement et délibérément abstenu à employer le vocable « difficultés » à la place de « réticences », car dans un pays aussi riche que le nôtre, aucun déterminisme insurmontable ne peut être envisageable, et que par conséquent tout ce qui serait susceptible de s'apparenter à une forme de fatalité n'est en fait qu'un complot dont nous sommes incapables de dresser les contours. *« Réticences » m'a paru d'avantage convenir à un certain esprit retors qui a toujours été à l'avant-garde pour asservir le pays.
6)* Loi n° 98-11 du 22 août 1998 portant loi d'orientation et de programme à projection quinquennale sur la recherche scientifique et le développement technologique 1998-2002. *Loi n° 08-05 du 23 févrir 2008 portant loi d'orientation et de programme à projection quinquennale sur la recherche scientifique et le développement technologique 2008-2012.
7)Allocution du président A. Bouteflika lors des Assises de l'Enseignement Supérieur. (Alger, 19 mai 2008 ).


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