Réda Taliani, 30 ans, le chanteur algérien de raï, révélé en 2004 par le succès Joséphine, est censuré à la radio et la Télévision algérienne depuis trois ans, à l'issue d'une déclaration qu'il aurait fait sur la marocanité du Sahara occidental. -Pourquoi êtes-vous censuré à la radio et à Télévision algérienne depuis 3 ans ? Apparemment, c'est à l'issue d'une rumeur, il y a presque trois ans. Soit disant, j'aurai clamé la marocanité du Sahara occidental. C'est une histoire politique. Je ne fais pas dans la politique. Je suis un artiste. Je n'ai jamais dit ça. Jusqu'à aujourd'hui, je suis censuré. -Vous n'avez jamais fait cette déclaration… Non, non, jamais de la vie ! De toute façon, je n'ai pas le pouvoir de dire des choses relevant de la politique. Quand je chante dans un pays, je chante un point c'est tout. Là où réside le problème, c'est que personne ne m'a contacté avant d'écrire, publier et confirmer l'information quant à ces allégations. Personne ne m'a contacté pour infirmer ou confirmer. Quand j'ai découvert cette information sur internet, je n'ai rien compris. -C'est à l'issue d'un spectacle que vous avez donné au Maroc… C'est lors d'un festival. On représente le raï, une musique algérienne. On est ambassadeur du raï dans tous les pays et où l'on s'y rend. C'est le même spectacle que je donne partout, là où je me produis à travers le monde. Je suis trop pris entre le studio et les concerts, je ne suis pas dans la politique, je ne pourrais jamais dire cela. C'est impossible. De toute façon, je suis avec l'Algérie Dalem oula madloum (à tort ou à raison). Je chante l'Algérie, le peuple algérien, la jeunesse et même des sujets délicats (harraga, le chômage…), la vie quotidienne. Transmettre un message positif. Les jeunes prennent de gros risques (harraga), il faut en chercher la cause. Le jeune ne demande qu'à avoir un travail. Sans démagogie, je suis nationaliste et patriote à 500%. L'Algérie, c'est tout pour moi. -Vous avez chanté sur l'album Maghreb United en featuring avec le groupe 113 et Rim'K … Bien sûr, nous n'avons pas de problème. Maghreb United est un concept fédérant tout le Maghreb à travers le raï (raï'n'b), et pour que le raï aille plus loin. Un Maghreb United par la musique. Tout ce qui est politique, cela ne nous intéresse pas, il y a des politiciens pour cela. Nous, nous sommes des artistes, des chanteurs, des musiciens… On fait de la musique, et cela s'arrête là. -La musique est universelle… Je vais vous dire. Cette histoire (les allégations), c'est une manipulation médiatique, tout simplement, c'est clair et net. On ne m'a jamais appelé, demandé mon avis, ni d'entretien téléphonique ni par dictaphone ni écrit ni rien du tout. Quand c'est un Algérien qui confirme la rumeur, c'est plus malheureux que celle émanant de l'extérieur. On est lynché quoi ! -Et cette décision de censure permanente à votre endroit ? Je ne passe plus à la radio et à la télévision (algérienne), alors que je fais de «gros» concerts à l'étranger. A la télévision, on achète des spots publicitaires qu'on censure parce que Réda Taliani y figure comme tête d'affiche. Les organisateurs (de spectacles) sont stupéfaits. Je suis «bousillé» de tous les côtés. -Vous ne tournez pas non plus en Algérie… Je tourne dans le monde entier sauf en Algérie, mon pays. Mon succès, je le dois aux Algériens. Il est issu d'Algérie. Avant et après Joséphine (hit), les Algériens étaient là. Mon succès ne vient pas de l'étranger, mais d'Algérie. Je ne travaille qu'avec les privés (par opposition aux organismes étatiques), malheureusement. Alors, je suis obligé de donner trois concerts consécutifs pour satisfaire le public. Cela fait mal au cœur. Tu regardes le Festival panafricain, mais tu n'y es pas… Même, par rapport à cette rumeur, cela a semé le doute. Alors, je me dit : ‘'Peut-être que les gens ont cru à cette rumeur''. Cette histoire n'est pas facile. Comme si tu disais : cette personne est devenue un harki (traître, collaborateur). C'est un préjudice moral terrible. Mes parents en sont affectés. Maintenant, même si l'on m'appelle pour des festivals, je ne peux pas y aller. Il faut tout refaire. Faire un matraquage pour effacer tout cela pour démontrer que je suis victime des médias. Il faut que je récupère la confiance du public et la mienne envers lui. Je n'ai pas envie de monter sur scène et que les gens doutent de moi. Je préfère que le public vienne comme avant, pour moi, pour ma musique. Je suis sociable et je ne joue jamais la ‘'star''. Maintenant, il y a des réflexions, vous vous sentez cassé, mal à l'aise. Tu ressens que tu es un Algérien qui n'a pas le soutien de son pays. Maintenant, je n'ai que la presse indépendante pour m'exprimer, le seul moyen pour clamer mon innocence et non pas ‘'clamer la marocanité du Sahara occidental''. Là, c'est comme si je venais en Algérie, en tant que touriste, et puis je repars. Je suis mêlé à une histoire qui ne me concerne pas. La rumeur a pris de l'ampleur. Il faut que je puisse passer à la télévision algérienne pour me défendre et stopper la rumeur. Un entretien en direct, pour que tout le monde regarde. Il faut que j'arrange cela, je ne vais pas m'arrêter là. -L'appel est lancé… Ben, oui ! Jusqu'à quand ? la censure dure depuis trois ans. Je vais attendre jusqu'à quand ? Cela me torture. Je suis victime d'une cabale. -Etabli en France, vous faites dans le raï'n'b, surtout aux côtés de la formation 113… Nous travaillons pour évoluer. Quand je suis ‘'monté'' en France, à la fin 2004, j'ai fait le Zénith de Paris avec 113 sur scène. Ils m'ont envoyé leur manager pour faire un titre. Depuis, je travaille avec les 113 sur leurs albums, leurs titres rap. Quelquefois, je participe à l'élaboration de textes et de compositions. Ils me concertent sur la conception d'un titre. On fait des tournées ensemble. Après El Babor, on a fait Famille nombreuse, Daâoua (Célébration in Maghreb united). -Un album en chantier… Oui, je prépare en ce moment un album avec des feats (participation) de rappeurs américains, des chanteurs de raggatone. Mais je prends mon temps. Cela fait trois ans que je travaille dessus. C'est mon album où j'y j'invite mes amis. C'est Réda Taliani and guests (mes invités). Il sortira en 2011 inch'allah !