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Le scoutisme, école du nationalisme...
Mohamed Réda Bestandji : 75 ans, doyen des scouts musulmans algériens
Publié dans El Watan le 17 - 11 - 2005

« La fin justifie les moyens. Mais qu'est-ce qui justifiera la fin ? »
Albert Camus
l a la simplicité des grands. Il a toujours été ainsi. Timide, il en convient lui-même, glissant une remarque au fil d'une conversation déliée et vive. Ce qu'il faut dire ? C'est que tout au long de son très riche parcours professionnel - il a été instituteur, professeur d'arabe, journaliste, chef de cabinet, puis directeur d'entreprise - sa vocation de kechaf ne l'a jamais quitté. Même dans sa paisible retraite sur les hauteurs d'Alger, il continue bon an, mal an, à côtoyer l'école du scoutisme « à nulle autre pareille dans la mesure où elle m'a appris à affronter les vicissitudes de la vie, mais aussi à m'inculquer les vertus du nationalisme et l'amour de la patrie ». A 75 ans, Mohamed Réda Bestandji, sans doute le pionnier et le doyen des dirigeants Scouts musulmans algériens, dont il a été commissaire général de longues années durant, reste égal à lui-même. Homme affable d'une grande humilité, il s'étonne presque qu'on le classe parmi les personnages qui ont contribué à leur façon à l'écriture de l'histoire de ce pays. C'est juste s'il revendique ses origines modestes et continue à se présenter, sans angélisme, comme un homme de gauche. Le triomphe modeste et d'un ton calme, il vous conte avec une précision inouïe les péripéties qui ont jalonné sa vie de militant. Car en la matière, il en a à revendre, lui qui s'est identifié très jeune aux luttes menées ici et là pour la reconquête de la personnalité algérienne. Sans doute tient-il cela d'une solide éducation prodiguée par les siens, dont son père Rachid « hazzab » et muezzin à Djamaâ Safir en plein cœur de La Casbah, au début du siècle passé. « Un père très tolérant, mais intransigeant lorsqu'il s'agit de l'éducation et de la bonne conduite de ses enfants », se souvient-il. Si Rachid, rappelle-t-il avec une métaphore, avait illuminé Alger, il était l'un des premiers électriciens de la capitale. Sobre et méticuleux, il insistait pour que sa progéniture acquiert le maximum de savoir. C'est ainsi que le jeune Réda apprit le Coran à Sidi M'hamed Chérif chez Abderrahmane Semmar avant de rejoindre l'école primaire de la rue de Toulon près de Sidi Abderrahmane, qui était déjà le fief du nationalisme, puisqu'il abritait des familles à la pointe du combat comme les Khider, Amrani, Taleb, Sid Ali Abdehmaid... Ce cycle terminé, Réda passa avec succès le concours d'entrée au collège moderne qui se trouvait à la Rampe Valée (annexe du lycée Okba actuellement) avant de transiter par la médersa d'Alger Ethaâlibia, pour enfin décrocher son brevet et son diplôme d'arabe de l'université d'Alger. Les colons nous avaient délesté de tout notre patrimoine. Ils ont tenté d'effacer nos mémoires et notre identité. A l'université, ceux qui nous prodiguaient les cours d'arabe étaient français, alors que la majorité des Algériens de l'époque, ne pipaient mot de la langue d'El Moutanabi. A la fin des années 1940, Réda a été chargé de l'enseignement au collège moderne d'Orléansville. Il y est resté trois ans jusqu'au tremblement de terre qui a ébranlé cette ville faisant des milliers de morts. Ce collège, fierté de la ville, n'était plus qu'un amas de poussière. Réda a été contraint de rentrer sur Alger. « Quand j'étais là-bas, je prenais souvent le train en compagnie d'un illustre personnage Lacheraf en l'occurence,qui enseignait du côté de Relizane. » Réda n'oubliera pas El Asnam : « C'est dans cette ville que j'ai fait mes premiers pas dans l'enseignement, mais c'est aussi à partir de cette ville que Messali a été déporté vers Niort en France. Avant son départ, on a pris le dernier déjeuner ensemble », relève-t-il avec une pointe de fierté. Muté à Tizi Ouzou, Réda va désormais évoluer dans un tout autre environnement. « C'est là que la révolution m'a rattrapé ». Il n'avait que 23 ans, mais le scoutisme l'avait forgé et en avait fait un militant prêt à tous les combats, à tous les sacrifices. C'est précisément en cette qualité, que la soldatesque coloniale est venue l'arrêter le 9 novembre 1954 pour des interrogatoires musclés. « Je n'étais pas le seul, d'autres camarades comme Keddache, Omar Lagha, notamment avaient subi le même sort. Mais ils ont insisté sur mon cas, car j'avais fait quelques mois auparavant un voyage au Caire qui les intriguait ». A partir de là, Réda se sentait traqué. « J'ai eu l'opportunité d'obtenir un poste à Saint-Louis au Sénégal, en qualité de prof d'arabe au lycée Faidherbes. C'est là que j'ai connu Ould Dada, futur président de Mauritanie et Abdou Diouf qui allait présider aux destinées de son pays. J'y ai connu des personnalités, notamment les nationalistes dont j'étais très proche. J'ai rejoint le Maroc en 1957 en poursuivant mon militantisme et en m'occupant de la propagande à Casablanca ». A l'indépendance, Réda rentre en Algérie pour faire du journalisme et contribuer à la relance de l'APS en qualité de secrétaire général de l'Agence aux côtés du regretté Benmehel « C'était une période inoubliable, on était guidés par notre enthousiasme, on a tout fait pour accompagner cette jeune agence dans son élan. On était domiciliés à l'Aérohabitat avec des moyens vraiment dérisoires. » Réda se souvient de ses sorties sur le terrain avec Amar Ouzzegane, alors ministre de l'Agriculture. « J'ai fait des reportages sur la campagne des labours. On avait sillonné la Kabylie. C'était vraiment une expérience enrichissante. » « A l'époque, et dans l'euphorie générale, tout était à construire, comme par exemple l'élaboration de la charte de l'assemblée constituante à laquelle j'ai participé. » Après ses passages au niveau de quelques ministères, Réda prendra les rênes d'une entreprise nationale, avant de goûter à la retraite, non sans avoir eu quelques ennuis de santé, qui ne sont plus, Dieu merci, qu'un mauvais souvenir. Depuis, il est partagé entre le scoutisme, dont il est le pionnier et la musique andalouse dont il est un fan. A ce dernier titre, il a été plébiscité président de l'association de musique andalouse Mezeghena que les enfants du quartier ont créée en hommage à un des leurs, disparu, ancien professeur au conservatoire d'El Biar. Pourquoi avoir accepté cette mission ? « D'abord, parce que je suis un mélomane, ensuite n'est-ce pas notre vocation de préserver ce pan de notre culture partie intégrante de notre patrimoine national ? Il faut perpétuer les traditions, en incitant les jeunes sans distinction de classes, à développer ce riche butin. Et puis, n'oubliez pas que la musique est une forme d'expression savante, riche qui a fleuri en Andalousie, mais qui est en fait, l'œuvre d'Algériens. » Le virus du scoutisme ? Il l'a attrapé à la fleur de l'âge, lorsque la jeunesse était en quête d'identité, de repères. En l'introduisant en Algérie au milieu des années 1930, Mohamed Bouras a voulu donner un caractère algérien musulman à ce mouvement, influencé qu'il était par les maîtres de l'époque comme Ben Badis, El Okbi, etc. Par la suite, le scoutisme s'est avéré être une véritable école de nationalisme. Je sais que dans les avant-projets, élaborés par le regretté Bouras, il était question de formation paramilitaire, ce que l'administration coloniale a catégoriquement refusé. Bouras a dû changer les statuts. « Ma passion pour le scoutisme vient du fait que le premier groupe des SMA qui s'appelait El Falah a vu le jour à la rue Marengo près de chez moi. Vous voulez les noms de jeunes scouts qui sont devenus des personnages illustres. Citons Bouras, Keddache, Lagha, Demaghlatrous, Bentoumi, Amimour, Chibane... »
Comment le virus a-t-il pu prendre ?
Quand on était jeune, on voyait les jeunes en tenue scout flambant neuve entonner des chants patriotiques. Cela nous stimulait et la tentation était grande de figurer parmi ces louveteaux. De grands révolutionnaires y ont fait leurs classes comme Didouche, Debbih, Ben M'hidi et beaucoup d'autres... Vous savez, sur les 22 qui ont déclenché la révolution, 18 étaient issus du mouvement scout et s'étaient réunis chez le chef scout du Clos Salembier, en l'occurrence Lyès Derriche. Pourquoi spécialement chez lui, parce que c'était un scout tenu par la parole donnée et qu'il inspirait confiance. Une grande partie des combattants pour la cause nationale, particulièrement les cadres, étaient issus du scoutisme imbriqué totalement dans le mouvement national. L'OS, par exemple, était formée d'anciens scouts qui se réunissaient dans les locaux des SMA, pour ne pas éveiller les soupçons de l'ennemi. Réda souligne aussi que le scoutisme a largement profité de l'apport d'intellectuels, singulièrement les instituteurs, qui en leur qualité de pédagogues, ont beaucoup apporté au mouvement. Je cite Tedjani Tahar, Bouzouzou, Cheikh Bouamrane, Mohamed Farès, Mohamed Djijeli, Mohamed Derouiche, Hadj Ali etc.Il rappelle que l'émergence de ces activités scoutes furent laborieuses, voire difficiles lorsqu'il y a eu une sorte de scission entre les scouts musulmans d'un côté et les boy scouts de l'autre : « J'ai vécu cette période. C'étaient tous des Algériens, dont la majorité était des nationalistes. » Il est vrai que l'idéologie avait voulu prendre le dessus et que certains ne voulaient pas que le scoutisme prenne une couleur trop verte. Ce qui est vrai aussi, c'est que l'administration coloniale a longtemps voulu jouer sur cette différence, en favorisant par exemple les autres en leur attribuant des subventions au détriment des SMA. Les disparités, nous les avons vécues. La marche du scoutisme en Algérie ? Il en sait beaucoup. « Même si je suis de tempérament optimiste, je regrette une certaine époque où la politique de l'Algérie était plus à gauche. Je déplore la mise en veilleuse de notre mouvement dans les années 1970, où pour éviter toute contestation et sans doute pour diviser, le pouvoir de l'époque avait fondu toutes les activités de la jeunesse dans une même union. C'était plus politique qu'autre chose, mais on avait attenté à un symbole du militantisme et de la lutte pour le recouvrement de la personnalité algérienne. Le scoutisme, à notre grand dam, était réduit à sa plus simple expression. Il est devenu une petite section sans importance dans une union (UNJA) qui englobait les jeunes de tous secteurs et de toute obédience. Le pouvoir pouvait ainsi tout contrôler. » A la faveur du soulèvement d'octobre 1988, un groupe d'anciens des SMA, dont notre interlocuteur, avait décidé d'organiser un congrès qu'on avait baptisé Congrès de la relance (Inbiaâth). A l'époque, Mehri était aux commandes du FLN. Nous avons pu nous émanciper et redevenir le mouvement fort que nous étions auparavant. Au cours de cette période troublée, les SMA furent l'objet de convoitises politiques. Sans doute misait-on sur le rôle qu'ils pouvaient jouer et la masse électorale qu'ils renfermaient. A défaut de les accaparer, certains ont même eu la tentation de créer d'autres organisations parallèles. Réda se souvient des luttes et des déchirements qui faillirent mettre en péril l'organisation. Quelques mois après la remise sur les rails de l'organisations des SMA, se souvient M. Bestandji : « Le FIS qui avait le vent en poupe à l'époque, par l'entremise de son président M. Abassi, voulait créer sa propre organisation kechaf. J'ai été le voir pour l'en dissuader et lui rappeler la place des SMA dans l'histoire du mouvement national. Il ne voulait rien entendre parce qu'il pensait qu'on était toujours inféodé au FLN ». Ce qui n'était pas le cas. Il a fallu du temps pour le raisonner. Pour Réda, le scoutisme et la politique partisane ne pourront jamais faire bon ménage. Même s'il le laisse entendre à demi-mot, la situation actuelle des SMA chapeautés par un commandant partisan n'est pas de nature à instaurer la sérénité parmi la famille kechaf plurielle.
Parcours
Naissance en février 1930 à La Casbah d'Alger. Après l'école coranique et le cycle primaire près de Sidi Abderrahmane, il entre au collège moderne à la Rampe Valée, puis poursuit ses études à la medersa d'Alger (Thaâlybia). Il décroche le diplôme d'arabe à l'université d'Alger, qui lui ouvre les portes de l'enseignement. Son premier poste est à El Asnam puis il sera muté à Tizi Ouzou. Il trouvera ensuite un poste au Sénégal, où il côtoiera des personnalités. En 1957, il rejoint le Maroc où il continue de militer en s'occupant de la propagande. A l'indépendance, il occupera plusieurs postes importants, dont le secrétariat général de l'Agence de presse, avant de transiter par plusieurs ministères en qualité de cadre supérieur. Sa passion du scoutisme le happera dès son jeune âge. Il gravira les échelons pour devenir commissaire national et représentera l'Algérie à de nombreux congrès mondiaux. A ce titre, il contribuera à faire admettre les SMA au sein de l'Association internationale des scouts et guides dont le siège se trouve à Bruxelles. Il est membre du comité directeur de l'Union arabe des anciens scouts. Après une carrière professionnelle bien remplie, Réda prendra une retraite bien méritée en 1988. Il continue de s'occuper de scoutisme et les actuels dirigeants des kechefs le sollicitent souvent pour ses conseils. Comme c'est un féru de musique, il n'a pas hésité à rejoindre le groupe Mezeghena de musique andalouse, dont il est le président, à la demande de ses membres. Pour lui, le scoutisme est une école de militantisme et a contribué au mouvement national, dont bon nombre de ses composants ont été scouts. Réda compte écrire un livre pour témoigner et surtout mettre en exergue la fabuleuse histoire des SMA, un des leviers de la révolution algérienne.


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