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Hommage à Mahieddine Kamel Malti : L'immensité discrète
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Publié dans El Watan le 14 - 05 - 2011

Cet érudit universaliste a redécouvert la musique andalouse et contribué à la sauver.
Dans la discrétion qui était la sienne, Mahieddine Kamel Malti vient de nous quitter, et, selon l'expression consacrée, de tirer sa révérence. Je m'étais promis d'écrire à sa mémoire. Devant le riche itinéraire qui a été le sien, je me suis, dans un premier temps, détourné de ce projet, car il me paraissait qu'aucun écrit – en tout cas pas le mien – ne pouvait rendre compte de son brillant parcours. Mais, ayant compris que la véritable mort ne pouvait être que celle de l'oubli, à l'égard de ces gens de lumière, qui, même disparus, nous portent sur leurs épaules, je me suis mis à me remémorer certains souvenirs. N'ayant pour seul objectif que le devoir de mémoire pour tous ces Kamel Malti, que notre indifférence parricide, dans son élan suicidaire, occulte, je tente ici d'aménager un petit espace pour la grande passion qui a été la sienne, la musique. A tous ceux qui l'ont côtoyé, aimé et mieux connu, je fais miennes leurs réflexions et critiques.
Je l'ai rencontré sur le tard et su apprécier l'homme et son excellence. S'il y a des mots qui doivent le qualifier, ce serait ceux de simplicité et de grandeur. Il était curieux de nature et son regard malicieux dénotait de la perspicacité et de l'esprit, sans arborer cependant cette arrogance caractéristique des gens suffisants, stupides et indigents. Les choses de l'intellect étaient son univers et le plus beau rameau en était la musique andalouse pour laquelle il vouait un amour sans bornes et une approche désintéressée. N'était-ce pas lui qui, devant les différentes critiques portées contre cet art et les velléités d'y introduire des «réajustements» (en dehors de recherches dûment menées), ne cessait de répéter que «l'héritage qui nous est parvenu, avec ses erreurs, ses imperfections et ses verrues, nous l'aimons» ?
Infatigable dans sa recherche du «mefqoud» (pièces musicales inédites), mais également pour tous les événements liés à la musique classique algérienne, toutes écoles confondues, sa quête n'était en définitive que celle des éléments porteurs de sens. Car, au-delà de l'enivrement qu'elle lui procurait, au titre des muses maghrébines qui excitaient les émotions et nourrissaient les passions, cette quête nous projette dans l'espace temps de grâce où fut conçue, élaborée et léguée, la nouba andalouse et l'intime étreinte de «chadjaret ettoubou'» (l'arbre des modes). Projection vers des univers où la parole était acte, acte de foi et de construction de l'édifice qui allait servir de fondement et nourrir nombre de cultures dans le monde, et pas uniquement dans l'art des muses.
Latin et grec, français évidemment, puisqu'il l'enseigna longtemps, mais aussi arabe et berbère et autres, les langues étaient cette autre passion à laquelle il nous invitait régulièrement au diwan des lettres et des mots, suavement traduits dans la simplicité que requiert la maîtrise, au-delà de la littéralité des poèmes, du sens profond, des métaphores et autres paraboles, incrustées dans cette production de nos aînés. Ses textes ont pris avec bonheur la suite de ceux qui se sont attelés à investir ce chantier fécond de la dimension musicale classique, tels Salvador Daniel, Ghouti Bouali,Boudali Safir, Ahmed Sefta...
Conscient des limites qui étaient les siennes, c'est avec humilité qu'il aborde ce thème, car disait-il, «une grande part du voile ne peut être soulevée que par ceux qui détiennent le savoir scientifique.» C'est avec raison qu'il note que les déperditions constatées dans l'héritage des noubate étaient aussi le résultat de notre perception dévalorisante et aliénante de cette haute production de l'esprit qu'est la musique, un des rameaux des sciences mathématiques. Considérée à l'époque médiévale comme une matière de base, au même titre que l'astronomie, la géométrie et l'arithmétique, «la musique a dû prendre le voile et s'avancer masquée pour préserver son droit à une survie misérable, pour se faire pardonner d'exister». Pourtant, il souligne avec force le caractère universel de cette musique, tant sur le plan de sa genèse et de son développement que sur celui des genres dans le monde qu'elle a enfanté, nourri ou, à défaut, influencé.
Dans leurs différences régionales et leurs diversités géographiques, qui «transcendent les frontières et les préjugés», Mahiedine Kamel Malti montre le rôle joué par le terroir dans le cachet qui est aujourd'hui celui de la musique andalouse, empreinte de sensibilité amazighe. Miracle d'un héritage qui contient dans son essence l'origine de sa permanente revivification, car, comment pourrait-on comprendre que cette musique, en l'absence d'un système de notation, ait pu traverser les aléas du temps et des hommes et arriver jusqu'à nous ? Pourrait-on concevoir un Jean Sébastien Bach ou un Mozart transmis oralement ? Cette dynamique est puisée dans la force contenue dans son système d'élaboration, reconnaissable à son organisation, que Kamel Malti résume avec puissance et simplicité : deux paradigmes, l'un le mode, l'autre le rythme, intimement inscrits dans l'idée de l'universelle analogie. Chaque mode, en fonction de sa tonique et de son architecture, éveille un certain état d'âme, reflet des éléments du cosmos dans le cadre de l'harmonie universelle et de sa scansion (théorie de l'éthos).
Dans cet héritage, la parole est également un autre miracle qui a influencé, en son temps, à travers les troubadours, les pétrarquistes et autres Minnesänger de nombres de pays européens qui se rattachent à la tradition poétique arabe de l'Espagne (France, Angleterre, Italie, Allemagne…). L'amour et l'éternelle jeunesse (printemps) ont été les thèmes récurrents de cette poésie contenue dans les «mouwashahate» et autres «azjal» (genres poétiques inventés en Andalousie musulmane). Kamel Malti nous invite à une relecture de ces thèmes, notamment ceux concernant la femme. La dame est souvent comparée à la lune (el badr essaïd), astre inaccessible et objet de contemplation désespérée de la part de l'amoureux. Chez les néoplatoniciens, la lune est le siège d'une des intelligences à travers laquelle l'homme accède au monde de la divine sagesse.
La contemplation des astres chez les Arabes se confond avec la contemplation du visage lumineux de la bien-aimée. Elles, ils, sont le moyen de parvenir à la félicité parfaite et les intercesseurs auprès de la divine vérité. Mais Mahieddine Kamel Malti, n'était point cet intellectuel renfermé, prostré sur «el atlal» (ruines d'un passé glorieux), mais au contraire, un homme convaincu des promesses de demain et du renouveau apporté par une jeunesse rompue à la musique andalouse. C'est avec bonheur qu'il a perçu les ferments d'une approche plus en rapport avec les exigences et les défis de l'heure, concrétisés par une large socialisation du patrimoine classique et, son corollaire, les multiples enregistrements qui y sont effectués mais également par cette nouvelle dynamique de recherche scientifique et de création.
Ces quelques mots, retracés brièvement, ne sauraient évidemment rendre justice à l'esprit éclectique et fécond de Mahieddine Kamel Malti et à son riche itinéraire. Peut-être qu'une rencontre hommage, dans le cadre de «Tlemcen, capitale de la culture islamique 2011», pourrait être envisagée et concrétisée ? Cette rencontre (à ne pas confondre avec un hommage alibi, dont nous sommes devenus maîtres en la matière) rendra mieux compte du caractère universel de ce digne fils de la cité des Zianides, mais également de son profond attachement aux valeurs civilisationnelles de son pays, dont il était un porteur éclairé.


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