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«Le cas libyen ou la guerre des légitimités»
Hugu Roberts, politologue, professeur à la Tufts University
Publié dans El Watan le 25 - 09 - 2011

Pour Hugh Roberts, l'ensemble de ces soulèvements a en commun «un côté subjectif ». «Il y est question du refus de l'injustice, de l'oppression, de la hogra et la demande d'être pris en considération par les autorités de l'Etat. Il y a une forte demande de citoyenneté.»
Entre révolution et contre-révolution : la problématique de la légitimité dans les révoltes récentes en Afrique du Nord à la lumière du cas libyen», tel est l'intitulé de la conférence inaugurale du troisième panel du colloque d'El Watan/Paris VIII, présidé par l'historienne Sophie Bessis. La conférence a été donnée, hier matin, à la salle Cosmos toujours par le politologue britannique Hugh Roberts, professeur à la prestigieuse Tufts University et ancien directeur du projet Afrique du Nord de l'International Crisis Group (ICG).
Hugh Roberts, convient-il de le souligner, est un fin spécialiste de l'Algérie et de l'Egypte. Il a consacré nombre d'ouvrages à l'Algérie, le dernier opus étant : «Berber Government : The kabyle polity in precolonial Algeria» (Le gouvernement berbère dans l'Algérie précoloniale).
Hugh Roberts annonce la couleur en déclarant de prime abord : «Face aux soulèvements qui ont eu lieu en Afrique du Nord, je suis enclin à être prudent.» Pour éclairer son propos, il cite cette boutade du dirigeant de la Révolution chinoise Chou En-Lai : «Quand il a été invité à donner son évaluation de la révolution française, il a répondu que c'était encore trop tôt !» Une manière d'exprimer sa circonspection quant au processus insurrectionnel en cours. «Nous sommes poussés, voire sommés de reconnaître comme de véritables révolutions les soulèvements qui ont eu lieu et à condamner ceux qui ont résisté à ces soulèvements comme étant des contre-révolutionnaires», constate H. Roberts, avant de lancer : «Personnellement, je n'aime pas qu'on me dicte comment je dois évaluer ou apprécier les événements.»
«Pas de proposition politico-constitutionnelle»
Et de poser cette question paradigmatique : «Est-ce que dans chaque cas, le soulèvement a sorti le pays du cadre politique établi par les principes constitutifs de l'Etat en question ? Si on compare les cas tunisien et égyptien, en Egypte, on nous dit : pas encore, ce n'est pas évident qu'on a sorti l'Egypte du cadre établi par la révolution des Officiers libres, en juillet 1952. On est toujours dans la logique de cet état dans la mesure où c'est toujours l'armée qui est maître du jeu politique. En revanche, en Tunisie, il semble que oui. C'est en tout cas mon hypothèse : il me semble que les Tunisiens sont sortis de la logique du parti-Etat. Ils sont donc obligés d'innover politiquement.» Pour Hugh Roberts, l'ensemble de ces soulèvements a en commun «un côté subjectif ». «Il y est question du refus de l'injustice, de l'oppression, de la hogra et la demande d'être pris en considération par les autorités de l'Etat. Il y a une forte demande de citoyenneté».
Poursuivant son argumentaire, le conférencier observe : «L'aspect subjectif a été partout révolutionnaire. Reste l'analyse de l'aspect objectif. Ce qui me frappe est que dans tous les cas, sauf peut-être dans le cas tunisien, le côté négatif a été beaucoup plus développé que le côté positif dans la perspective des manifestations et des mouvements de contestation. C'est-à-dire que la demande de dignité et de citoyenneté n'a pas été traduite dans des propositions politico-constitutionnelles claires. En Tunisie, on a été obligé d'innover. En Egypte, l'union s'est faite dans la négation du statu quo. Tout le monde est d'accord sur le départ de Moubarak. Mais il n'y a pas de proposition pour remplacer le statu quo.»
Hugh Roberts considère que «le rejet de la dictature est le prolongement d'un dogme dont l'origine est l'Occident. On définit le problème comme étant l'autoritarisme et la solution comme étant la fin de l'autoritarisme. Comme si la démocratie allait automatiquement prendre la place du régime autoritaire. On ne veut pas voir que la démocratie et l'Etat de droit sont à construire. Il n'y a rien d'automatique dans la naissance de cette forme de gouvernement».
Résolument contre l'intervention militaire
Diagnostiquant le cas libyen, le conférencier a rappelé, avec insistance, la position de l'International Crisis Group (ICG) – une ONG qui s'est spécialisée dans la prévention des conflits armés – en soulignant que «l'ICG a pris position très clairement contre l'intervention militaire, ceci avant même la résolution du 17 mars. On a envoyé une lettre ouverte au Conseil de sécurité pour proposer une autre alternative à l'intervention militaire». H. Roberts précise toutefois qu'il ne peut plus parler au nom de l'ICG : «J'ai quitté mes fonctions il y a deux mois», confie-t-il. «La Jamahiriya créée par El Gueddafi a été un cadre politique très contraignant qui est devenu insupportable pour beaucoup de Libyens, sinon la majorité du peuple libyen. On peut donc très bien comprendre la révolte contre El Gueddafi. On peut dire que la Jamahiriya était une variante extrême du syndrome d'absence de représentation politique (…). C'est un cadre politico-juridique kafkaïen. A notre avis, il était tout à fait normal de se révolter contre ce cadre», admet-il.
«Ceci dit, nous avons pris position contre l'intervention militaire. Nous avons été très frappés par l'exagération des reportages dans les médias sur ce qui se passait en Libye. Si vraiment le souci était de protéger les civils, ce n'est pas en déclenchant une guerre civile qu'on peut le faire mais en mettant fin aux combats et en obtenant le cessez-le-feu.» Hugh Roberts arguera qu'à la différence des autres pays de la région ébranlés par les mouvements de contestation, la Libye présente une forme de «Gueddafi-dépendance» qui pouvait lui être fatale en cas de chute brutale du dictateur : «Il faut souligner la faiblesse de l'Etat d'El Gueddafi et mesurer à quel point les institutions (libyennes) étaient faibles», appuie le politologue.
«L'Etat égyptien existait bien avant Moubarak. L'existence de l'Etat tunisien aussi n'était pas remise en cause. L'armée pouvait jouer le rôle de médiateur, en quelque sorte, elle n'était pas obligée de s'identifier à Ben Ali ou à Moubarak. En Libye, le danger était que si on mettait fin d'une manière abrupte et précipitée au régime d'El Gueddafi, il n'y aurait plus d'Etat. C'était précipiter le pays dans une situation anarchique qui risquait de ressembler à l'Afghanistan après la chute de Najibullah ou à la Somalie, pour ne pas parler de l'Irak après la chute de Saddam.»
Principe d'autodétermination
Pour Hugh Roberts, le principe de la légitimité a été lourdement malmené suite à la campagne militaire de l'OTAN. «Il est frappant de constater à quel point dans le cas libyen, ce qu'on peut appeler la légitimité internationale a pris le dessus sur la légitimité nationale», dissèque-t-il. «A partir du moment où les puissances occidentales sont entrées en jeu, on a vu comment les dirigeants occidentaux ont exercé le droit de définir qui fait partie du peuple libyen et qui n'en fait pas partie. Avant même le 17 mars, on mettait El Gueddafi d'un côté et tout le peuple libyen de l'autre côté, alors qu'il était évident que l'on était dans une logique de guerre civile et qu'il y avait deux points de vue, chacun avec ses supporters.» «Il y a ainsi substitution des puissances occidentales (à la volonté nationale libyenne, ndlr) alors qu'il n'y avait aucun sondage de l'opinion libyenne. Il me semble que les implications de cette substitution sont très profondes.»
Selon le conférencier, «les puissances occidentales sont entrées en contradiction très claire avec le principe qui était proclamé par ces même puissances il y a 70 ans dans la Charte de l'Atlantique, à savoir le principe de la reconnaissance du droit des nations à l'autodétermination. La mondialisation a rompu complètement avec ce principe. Même si, du bout des lèvres, on prétend respecter la souveraineté nationale, ce n'est pas sérieux. On est dans une situation où l'on insiste sur la démocratisation, mais en refusant le principe du respect de la souveraineté nationale, comme s'il pouvait y avoir démocratie sans souveraineté nationale, la démocratie étant par principe l'émanation de la souveraineté populaire. La légitimation internationale prime désormais sur la légitimation nationale. C'est un élément-clé de cette situation et il faut qu'il y ait une réflexion sur cette question», préconise Hugh Roberts, avant de conclure sur une note pessimiste : «Il faut inverser le rapport entre ces deux sources de légitimité en insistant sur l'importance de la légitimité nationale comme préalable à tout processus de démocratisation. Mais il faut se rendre à l'évidence que les justifications d'un optimisme en ce qui concerne les perspectives de démocratisation sont absentes et que le pessimisme est autorisé.»


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