Enfant des planches depuis plus d'une trentaine d'années, Lamri Kaouane a pris plaisir à divertir son public, dimanche soir, au palais de la culture à travers un hilarant one man show intitulé 100% redjla. C'est devant une assistance nombreuse que cet humoriste versatile à souhait, à l'accent typiquement sétifien, a prouvé, encore une fois, qu'il imite non pas dans le sens de nuire, mais tout simplement pour faire rire. Son humour plaît dès la première seconde. Pour faire rire son public, Lamri Kouane s'inspire de sa vie et des petits travers de la société. Démarche chaloupée et accent qui swingue vers divers dialectes régionaux, il maîtrise la scène avec aisance et assurance à la fois. Pantalon shangai bleu, avec bretelles ajustées, chemisette bleue à carreaux, béret légèrement visé à la Che Guevara et lunettes de soleil, Lamri nous parle d'emblée d'un jeune homme, fraîchement sorti de l'université. Versé dans la vie active, ce détenteur d'un magistère n'arrive pas à trouver un travail stable. Ayant frappé à toutes les portes, il pense se mettre à la vente informelle de cigarettes, il change d'avis entre-temps en empruntant le chemin du multipartisme. Son programme présidentiel fictif est des plus farfelus et loufoques. Il propose ainsi que la musique raï soit introduite dans le système scolaire avec pour coefficient 44. Dans le secteur de la santé, les vaccins doivent être supprimés pour mieux laisser les gens pourrir. La télévision se doit elle aussi de faire une grande mue, à commencer par les présentatrices qui ne sont pas recrutées pour leurs diplômes mais pour leur beauté, ironise-t-il. Le sport doit également être dirigé par des hommes de fer, à l'image de Jacky Jack ou encore de Robot Coq. Non satisfait par cette incursion dans ce parti, il entrevoit une autre impasse en se lançant dans le chemin incertain et mafieux du trabendiste entre Alger, Marseille et la Turquie. Après des déboires de taille avec la douane, il est convaincu que son salut est l'exil définitif en France. Arrivé dans la ville lumière, le travail fait défaut. Il rencontre un ancien ami qui l'intègre dans le réseau mafieux des vols. Au cours d'un cambriolage, il est arrêté et incarcéré durant quatre ans dans une prison de «luxe», le confort est tel qu'il ne veut plus quitter cet endroit au moment de sa délibération. Il est reconduit à la frontière avec amertume. Alors qu'il pense que l'avion s'envole vers Panama, ironie du sort il atterrit à l'entrée de son ancienne université. En l'espace d'une heure trente, cet artiste à l'humour inimitable a brossé des tableaux sociaux réels. Les danses exécutées à sa manière, tout en gardant jusqu'au bout son énergie, témoignent d'un jeu théâtral certain bien mûri. Cet homme aux multiples rôles nous a confié en aparté qu'il considère son humour comme une arme avec laquelle il tire sur les maux sociaux. « Je suis un éveilleur de consciences. Je ne peux pas faire un théâtre sans politique. Je me contente de pointer du doigt un problème qui existe, car je n'ai pas le pouvoir politique de changer les choses», précise-t-il. Lamri Kaouane sera à nouveau sur scène, en septembre prochain, avec un one man show intitulé MS pour le président. Faisant partie de la troupe El Ghosto, il annonce que les répétions du Café Bonheur II commenceront dès la rentrée prochaine. .