Pour briser la grève des corps communs du ministère des Affaires étrangères, l'administration a fait recours à la justice. Un classique. Saisi, le tribunal administratif d'Alger a déclaré le débrayage «illégal». Les grévistes se disent «consternés» par le recours à la justice. Et si le syndicat dit «respecter» la décision de la justice, les grévistes, eux, estiment la sentence «injuste». Le tribunal administratif est «incompétent pour traiter l'affaire de la grève au MAE», selon le syndicat. Les travailleurs dénoncent ainsi une instrumentalisation de la justice. «Nous persistons, néanmoins, à penser que la justice aurait été influencée et instrumentalisée pour porter atteinte à notre droit à la grève», ont-ils dénoncé. Ils jugent que le tribunal administratif «ne devrait pas accepter la requête de l'administration qui s'appuie sur l'article 917 du code civil et administratif, c'est-à-dire le recours au référé». «En tranchant en faveur de l'administration, c'est contraire aux dispositions de l'article 918 du code de procédure civile et administrative qui stipule que le juge des référés ordonne des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il ne tranche pas le principal, le droit de grève en l'occurrence», expliquent certains syndicalistes. «Nous nous battons légalement pour que nous puissions sortir de la précarité sociale dans laquelle nous nous débattons, et l'administration n'a pas trouvé mieux que de ramener le conflit sur le terrain judiciaire au lieu de prendre en charge sérieusement nos revendications… La situation devient intenable», s'indignent des fonctionnaires rencontrés, hier, en marge de leur assemblée générale. Après cinq jours de grève, le tribunal administratif a «invalidé» le préavis de grève déposé par le SAPMAE, le 30 janvier dernier et a «ordonné l'évacuation des locaux professionnels du siège du ministère de Affaires étrangères». Les grévistes, qui se sont réunis hier en assemblée générale, ont décidé de reprendre le travail, tout en accordant un «délai raisonnable» à l'administration d'accéder à leurs doléances. Une seule revendication a été partiellement satisfaite jusqu'à présent : l'obtention de la titularisation de 108 travailleurs. Les autres revendications sont suspendues aux «négociations» promises par l'administration. Le ministre, Mourad Medelci, qui a reçu les représentants des travailleurs, jeudi dernier, leur a expliqué que le Premier ministère a été saisi sur la question de l'application de l'âge de départ à la retraite de tous les cadres à la centrale et à l'extérieur à 60 ans. Seul moyen pouvant dégager des postes pour les jeunes cadres bloqués dans leur carrière par une sorte de gérontocratie diplomatique. Les corps communs du MAE accordent une chance à la négociation, mais ils menacent de revenir à la grève, «si l'administration ne tiendrait pas ses engagements». En tout cas, leur débrayage qui a duré cinq jours, a secoué la tour d'ivoire des Affaires étrangères.