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quand les tabous se brisent
la chronique de Maurice Tarik Maschino
Publié dans El Watan le 28 - 03 - 2013

On pouvait encore espérer, il y a une quinzaine d'années, que le racisme et l'islamophobie ne recueilleraient jamais l'approbation d'une majorité d'intellectuels. On pouvait encore penser, se rappelant la longue tradition de Voltaire à Sartre et à Foucault, des intellectuels qui se battaient pour la liberté, l'égalité et la démocratie, qu'un écrivain comme Renaud Camus, ouvertement antisémite, ou qu'une Oriana Fallaci, pour qui «les fils d'Allah se reproduisent comme des rats», étaient des exceptions. Ignobles, mais rares.
On constate aujourd'hui qu'ils furent des précurseurs. Loin de provoquer l'indignation, leur «audace» suscita l'admiration et éveilla des vocations. Balayant toute pudeur, oubliant toute intelligence, leurs propos firent tomber les résistances et libérèrent la parole d'écrivains et de journalistes qui, jusque-là, n'osaient pas déclarer publiquement leur haine des Arabes et des musulmans.
Intimidés par les tabous de la «pensée correcte» – égalité des hommes, respect des différences, antiracisme… – ils se crurent autorisés à les dénoncer. Pire : ils s'en firent un devoir. Et se spécialisèrent dans «la stigmatisation de l'autre» – du non-chrétien, du non-européen, du non-blanc. Non pas, évidemment, en se déclarant islamophobes ou antisémites, mais en clamant, au contraire, qu'étaient racistes les non-racistes, que s'indigner, par exemple, qu'il y eût si peu de Noirs, d'Arabes ou de musulmans dans les lieux de pouvoir, c'était percevoir les hommes en fonction de leur couleur ou de leur religion, et par conséquent faire preuve de racisme. Extraordinaire tour de passe-passe idéologique ! L'antiraciste devenait raciste et le raciste un humaniste.
Dans cette entreprise de truquage des signes et de falsification des concepts, le «philosophe» Alain Finkielkraut joua et joue toujours un rôle de premier plan. N'hésitant pas à approuver une Oriana Fallaci qui, dit-il, «s'efforce de regarder la réalité en face» en estimant que «les mosquées grouillent jusqu'à la nausée de terroristes ou d'aspirants terroristes», s'indignant qu'une équipe de France soit «Black-Black-Black», célébrant dans un journal israélien les «bienfaits» de la colonisation française en Afrique, ce vulgarisateur de la haine anti-arabe a largement ouvert la voie à tous ceux qui jusque-là n'osaient guère extérioriser leur détestation des musulmans. On lira donc avec le plus grand profit l'ouvrage qu'un journaliste, Sébastien Fontenelle, consacre aux médias comme aux personnalités qui, par leurs déclarations ou leurs pseudo-questions – «l'islam a-t-il vraiment sa place dans la République?» –entretiennent, confortent et légitiment l'islamophobie(1).
Une islamophobie qui ne sévit pas seulement chez les excités de la droite chrétienne et franchouillarde, mais qui innerve, à quelques exceptions près, l'ensemble de l'intelligentsia française.
Rappelant les propos débiles et souvent très grossiers de nombreux écrivains et politiciens, Sébastien Fontenelle montre à quelle profondeur s'enracinent chez nombre d'intellectuels, ou déclarés tels, la haine de l'islam et le mépris des musulmans.
Telle la remarque ordurière de Michel Houellebecq sur l'islam, «la religion la plus con», ou d'un Michel Onfray pour qui parler d'islamophobie «installe celui qui choisit ce terme du côté des religieux intégristes», ou encore les déclarations de l'académicienne Hélène Carrère d'Encausse à la télévision russe, où elle dénonce ces pseudo-Français qui ont «trois ou quatre femmes et vingt-cinq enfants».
Tel encore Claude Imbert, le fondateur de l'hebdomadaire Le Point, pour qui «l'islamophobie ne mérite en rien d'être ostracisée» et qui se revendique lui-même islamophobe : «J'ai le droit de penser que l'islam – je dis bien l'islam, je ne parle même pas des islamistes – apporte une certaine débilité qui, en effet, me rend islamophobe.»
Répandre et justifier l'islamophobie semble la fonction principale de ces «dossiers» que publient régulièrement la plupart des hebdomadaires français. Faisant mine de s'interroger sur la nature de l'islam et sa compatibilité avec la démocratie, ils concluent tous que, dans l'immédiat, cette religion doit accomplir de grands progrès pour que les musulmans s'intègrent sans difficulté dans les pays européens. Tous ces «dossiers» aboutissent aux mêmes conclusions – au même rejet névrotique de l'islam et, partant, des musulmans.
Au fil des années et grâce à la complaisance des médias qui, sous prétexte d'objectivité, ont constamment offert aux Le Pen père et fille une tribune, les éructations les plus insensées passent pour des vérités, les élucubrations les plus nauséeuses pour un signe de santé mentale. On peut soutenir aujourd'hui n'importe quelle insanité – sur «l'invasion des immigrés», n'importe quelle stupidité – sur «l'infériorité» de l'islam par rapport au christianisme – sans passer pour un imbécile, un raciste, un obsessionnel ou un psychopathe. Plus le propos est «énorme», plus il paraît vrai et séduit.
La libération du discours raciste, sa promotion au rang d'évidence indiscutable ont les conséquences dramatiques que l'on sait : refus d'embauche, de logement, d'emploi, sans parler des agressions et des crimes ou du saccage des tombes musulmanes. Pour tous les Arabes ou ceux qui ont «l'air arabe», pour tous les musulmans comme pour tous les Africains, pour tous ceux qui sont ou paraissent étrangers, la France est devenue plus inhospitalière, plus hostile et plus dangereuse que jamais.
1) Sébastien Fontenelle, Les briseurs de tabous, intellectuels et journalistes «anticonformistes» au service de l'ordre dominant, La Découverte, 2012.


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