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Industrie : pourquoi l'Etat revient à la case départ
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Publié dans El Watan le 26 - 07 - 2013

Alors même que l'Etat encourage l'investissement par de nouvelles mesures incitatives, il utilise dès qu'il le peut son droit de préemption, entre autres sur les entreprises qu'ils avait cédées à des investisseurs étrangers. Pourquoi ? Paradoxes d'un retour au capitalisme d'Etat.
Des tuyaux et des containers rouillés et abandonnés sur un terrain en friche, un haut fourneau à l'arrêt depuis 2004, une cokerie définitivement fermée. Sur la terrasse du café d'El Hadjar, où se retrouvent les employés et les retraités d'ArcelorMittal, on y discute beaucoup des problèmes dans lesquels s'embourbe le plus grand complexe sidérurgique d'Afrique. Et surtout, du projet de l'Etat de récupérer une partie des actions du leader mondial de l'acier qui, du coup, deviendrait minoritaire. «La privatisation en 2001 n'a pas donné grand-chose, reconnaît prudemment Hamid, cadre de l'entreprise. Les engagements n'ont pas été suivis, ni sur les investissements, ni sur les salaires, ni sur l'entretien des machines... Du coup, on ne peut pas sortir un produit conforme. C'est comme si on roulait en 2 Chevaux.»
Et tout le monde cautionne à demi-mot cette «renationalisation» de secours. Une carte dont l'Etat se sert de plus en plus en faisant jouer son droit de préemption consacré par la loi de finances complémentaire de 2009. Aujourd'hui, il cherche à remettre la main sur l'entreprise Céramique Vaisselle de l'Est privatisée en 2006 au profit de l'italien Eter. En juin, c'est à Cevital qu'il s'est opposé dans le cadre de la reprise de Michelin. En janvier dernier, il a discrètement demandé à Dorsch Holding GmbH de lui rétrocéder ses actions. Pourquoi, après les années de privatisation, le gouvernement cherche-t-il à remettre la main sur ce qui lui appartenait ?
Il faut y voir la nouvelle orientation économique conduite par Rahmani
Le ministre de l'Industrie, Cherif Rahmani, l'a annoncé la dernièrement : «La nouvelle politique industrielle de l'Algérie vise à promouvoir les filières industrielles stratégiques où l'Algérie recèle de potentiels et dispose d'atouts compétitifs.» Objectif : faire de cette politique industrielle «une grande cause nationale» en lui faisant produire 6% du PIB (contre 4,5% actuellement). Mais de nombreux économistes –dont certains rappellent les précédentes et identiques promesses de l'ancien ministre de l'Industrie Abdelhamid Temmar restées dans les tiroirs– restent sceptiques.
«On assiste clairement à un retour du capitalisme national, explique un consultant privé en économie. Le problème c'est que contrairement à la politique industrialisante de Belaïd Abdesselam, qui obéissait à une logique interne, aujourd'hui les décisions de l'Etat obéissent non pas à une stratégie, mais à un réflexe de défense.» Un proche du ministre nuance : «On connaît tous les projets et les idées du ministre, mais il n'a pas d'état-major. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, si la France, l'Allemagne et l'Italie ont pu redresser leur économie, c'est parce qu'il y a eu des directions générales de plan qui ont pensé des choix industriels et qui les ont mis en œuvre.»
Pas de réflexion, juste des intuitions ? «Le projet d'usine Renault en est un bon exemple, explique un cadre proche du dossier. L'industrie automobile est une des filières les plus externalisées. On le sait. Est-on en train de profiter de ce projet pour dynamiser les entreprises sous-traitantes susceptibles d'enrichir le tissu économique de la région ? Non.» Abdelhak Lamiri, économiste et ancien PDG de l'Institut international de management (INSIM), insiste en s'appuyant sur le cas d'ArcelorMittal : «Au nom de quoi devrait-on nationaliser l'acier, alors que partout ailleurs sur la planète, il est aux mains des privés ? Aujourd'hui, l'acier n'est plus un produit stratégique. Il a perdu de nombreuses parts de marché. Nous avons une vision complètement décalée de ce qui se passe dans le reste du monde.»
Il n'est plus possible de laisser les étrangers tirer profit des ressources du pays sans contrepartie
Après les scandales de OTH (Djezzy) et GMA (qui exploitait les mines d'or de Tamanrasset), rien ne sera plus comme avant. Abdelhamid Temmar avait prévenu : «Ce n'est pas l'argent des investisseurs qui nous intéresse, mais leur savoir-faire.» Pour Smaïn Kouadria, député et membre permanent de la commission des affaires économiques, du développement, de l'industrie, du commerce et de la planification, le bilan de la privatisation d'ArcelorMittal parle de lui-même. «En 2011, le complexe produisait 1,2 million de tonnes d'acier par an. Douze ans après, il en produit 600 000 tonnes !, relève le syndicaliste. Alors que dans l'accord de cession, ArcelorMittal s'était pourtant engagé à 1,5 million de tonnes la dixième année. Ensuite, le site, qui comprenait 11 200 salariés en 2001, n'en compte plus que 5600 en 2013, alors que, toujours dans l'accord, la direction s'était engagée à préserver les postes. Enfin, si on regarde les investissements, ce n'est pas plus reluisant : ils n'ont fait que financer des opérations de réparation et la création d'un laminoir de ronds à béton. Mais avant la privatisation, toutes les unités fonctionnaient, y compris la cokerie, aujourd'hui à l'arrêt. C'est un échec total. Aujourd'hui, l'Algérie importe de l'acier !»
Les Allemands de Dorsch Holding GmbH, qui viennent de rendre leurs parts aux Algériens, l'ont aussi appris à leurs dépens : selon une source algérienne citée par le site économique Maghreb Emergent, les Algériens ont estimé que le partenariat n'avait pas donné satisfaction en termes de transferts technologiques. A la décharge des investisseurs, les cahiers des charges jouent parfois en leur défaveur, si bien qu'il est parfois plus difficile pour un investisseur de se retrouver dans une société mixte (l'émirati Dubaï Port World, qui gère en concession le port d'Alger, et avec qui le partenariat se passe mal). «Il arrive que leurs investissements soient soumis à un investissement préalable du partenaire public, explique un juriste. Si, pour les raisons bureaucratiques que l'on connaît, la procédure entraîne un glissement dans la réalisation du programme d'investissement, ça peut coûter très cher à l'entrepreneur.»
Mais pour Mourad Ouchichi, professeur d'économie à l'université de Béjaïa, la responsabilité relève des institutions. «Si le cadre institutionnel récompense la piraterie, elles encourageront la piraterie. S'il récompense les activités productives, des firmes seront créées afin de s'engager dans des activités productives. En l'occurrence, chez nous, les investisseurs étrangers connaissent la fragilité du système. C'est la nature des institutions fondées sur le pillage et la prédation, qui explique la nature des IDE.» «Un paradoxe», comme le souligne Smain Kouadria, «alors que l'Algérie est un des rares pays à accompagner l'investissement direct par des abattements d'impôts, des prix préférentiels sur l'électricité, et d'autres avantages». Les dernières mesures en date, publiées au Journal officiel du 9 juin, le confirment (les investisseurs pouvant bénéficier d'exonérations fiscales de trois ans s'ils créent jusqu'à 100 emplois, et de 5 ans s'ils en créent plus de 100).
L'Etat ne fait pas confiance aux privés algériens...
Alors que les statistiques plaident objectivement en faveur du secteur privé algérien (depuis les années 1990, sa part dans le PIB est passée de 19% à 80%, alors qu'il a reçu trois fois moins de crédits que le secteur public), l'Etat persiste à le considérer comme un acteur annexe. L'appel à partenariat industriel national et international pour la création de sociétés par actions avec les Sociétés de gestion des participations (SGP), lancé par Cherif Rahmani ne convainc pas les économistes. «Je ne dis pas qu'il n'existe pas, dans le gouvernement, des individualités qui souhaitent voir le pays se développer, reconnaît un ancien haut fonctionnaire de l'Etat. Mais cette volonté politique reste à ce niveau. Elle ne se concrétise jamais, faute d'institutions matures pour la relayer.»
En faisant allusion au blocage de Cevital sur le dossier Michelin, Abdelhak Lamiri s'insurge : «En Corée du Sud, 7 familles possèdent 70% du pays. Où est le problème ? Si une entreprise est efficace, pourquoi la priver de croissance ? Pourquoi ne prend-on pas exemple sur ce que font les autres ? Lors de relances industrielles, la Chine, la Pologne ou l'Inde choisissent des entreprises privées solides et s'appuient aussi sur des entreprises publiques qui marchent. Pas sur des entreprises boiteuses !» Un consultant privé regrette qu'à la place, le gouvernement mise, «pour des raisons idéologiques», sur des entreprises publiques «qu'on choisit de renflouer, mais sans qu'elles sachent ce qu'elles doivent produire ni dans quel cadre».
«Leurs cadres manquent d'une stratégie claire, ils sont plombés par la bureaucratie et, surtout, traumatisés par Ouyahia qui en a envoyé des milliers en prison sans preuve.» Et même dans les années 1990, «les privatisations ont été minimes, rappelle Mourad Ouchichi. Parce qu'elles ont été engagées suite à une contrainte extérieure (d'après le Plan d'ajustement structurel du FMI, ndlr). Dès que l'argent est rentré dans les caisses, on a assisté au retour du discours idéologique, à la centralisation excessive, bref à un retour de l'économie administrée et le processus de privatisation s'est arrêté aussi net. L'Etat ne veut pas perdre le pouvoir économique au profit du privé. Il en perdrait du pouvoir politique.» Samir Bellal, enseignant d'économie à l'université de Guelma, résume : «Si on regarde de près les mesures de libéralisation des années 1990, elles ont été très timides, très sélectives. Vingt ans de réforme n'ont pas servi à grand-chose. On croit toujours qu'on va trouver une solution avec les entreprises publiques. L'attitude des pouvoirs publics face au privé n'a pas changé depuis les années 1970, il nourrit toujours à son égard la même méfiance.»
...et ne compte que sur lui-même pour préserver la paix sociale
«A El Hadjar, l'Etat est obligé d'intervenir pour éviter les compressions d'effectifs, explique un cadre du complexe. Il ne peut pas se permettre que plus de 5000 familles se retrouvent sur le carreau.» Pourtant, comme le souligne un consultant, «25 ans d'expérience ont montré que ce type de politique a coûté cher aux banques !» Mourad Ouchichi en arrive à la même conclusion : «L'entreprise publique n'a jamais été autre chose qu'une administration chargée des affaires économiques. Elle est le lieu par excellence de la distribution de la rente. Un enjeu pour le pouvoir qui refuse les conséquences politiques de ses réformes économiques.»
Alors que plusieurs économistes préconisent la création d'un Fonds de restructuration des entreprises, comme il en existe dans d'autres pays, qui permette, en cas de faillite d'une entreprise, de revendre les équipement à de petites structures privées, de prendre en charge les employés jusqu'à ce qu'ils trouvent un emploi, etc., en Algérie, rien n'est fait. «Pour l'instant, l'Etat dispose de suffisamment de ressources pour agir au mépris des contraintes économiques, se désole Samir Bellal. Ce matelas permettra d'envisager tous les programmes d'investissement, de réhabilitation... L'économie est réduite au statut de ressource pour le pouvoir politique. On finira par le payer très cher.»


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