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La crise de l'été 1962 : Des origines à la fracture, les militaires prennent le pouvoir
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Publié dans El Watan le 05 - 07 - 2014

Le 4 juillet 1962, Alger ville héroïque, vit ses premiers instants de capitale de «l'Etat algérien restauré». Le «Peuple-citoyen», souverain mais éphémère, d'une République issante de la gueule du colonialisme finissant, se répand.
Il investit les quartiers européens, jusqu'alors interdits par le racisme ordinaire, et l'apartheid génétique du colonialisme et depuis quelques mois par oukase des sicaires de l'OAS, fanatiques partisans de l'Algérie française. Ils les avaient décrétés zones interdites aux «chiens et aux arabes», sous peine de mort. De tout le pays, ils affluaient par bataillons. Sur les bennes des camions, par essaims agrippés aux wagons des trains bondés ; dans les voitures, sur les voitures ; à pied ; par phratries, entassées sur des charrettes tractées par des bêtes de trait fourbues.
Ils étaient des millions, la citoyenneté conquise, l'indépendance en tête, l'espoir en bandoulière, des chants pleins la gorge. Ils étaient des dizaines de milliers à investir la ville blanche, maculée du sang de ses héros, fouettant, encore de l'odeur acre de la poudre et du plastic. De mémoire d'Algérien, jamais une telle symbiose n'avait réuni ce peuple qui sortait du cauchemar colonial de 132 ans et après 7 ans et demi de la guerre de décolonisation, sans doute la plus meurtrière du XXe siècle. Il est 16 heures, la plèbe, relevant la tête, masse compacte, fleuve humain, se meut plus qu'elle ne se déplace, pour converger vers le siège de la préfecture.
Le Président en exercice du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), Benyoucef Ben Khedda, s'adresse à la nation ressuscitée. Sa voix de fausset grésillante, altérée par les haut-parleurs d'une sono bricolée à la hâte, était bien connue de celles et ceux qui l'écoutaient, à la sourdine en tapinois, à travers les ondes de la Voix de l'Algérie. Bien plus que le discours, c'est l'incarnation même de la République proclamée, qui a aspiré toute l'Algérie, autour de l'élégant bâtiment néo-mauresque, siège de l'igamie d'Alger, qui deviendra celui de la wilaya.
Ceux qui sont là, sur le boulevard Carnot, qu'on baptisera plus tard du nom de Zighout Youcef, légende du Nord Constantinois, donnaient le dos au port, où des navires embarquaient dans l'incuriosité et l'indifférence des vainqueurs, sur le ressac de l'histoire, la géniture des conquérants de 1830. Les uns déménageaient l'âme baignée de larmes, vers la France, cette mère, pourtant inconnue, qu'ils ont préférée à la justice. Les autres, justice faite, s'abandonnaient dans le giron leur mère, retrouvée une fois libérée.
Les nuées grouillantes aperçoivent à peine au balcon du second étage le deuxième président du GPRA, costume sombre, lunettes noires. Le successeur, presque inconnu des foules, du populaire Ferhat Abbas. Pharmacien comme son prédécesseur, il avait quitté Alger cinq ans auparavant, en mars 1957, avec ses quatre compagnons du Comité de coordination et d'exécution, le premier CCE, issu du Congrès de la Soummam du 20 août 1956 (Abane Ramdane ; Belkacem Krim ; Mohamed Larbi Ben M'hidi ; Saâd Dahlab et lui-même). La direction collégiale de la Révolution avait pris la décision, tout aussi collégiale, de s'établir à l'étranger après l'arrestation, le 23 février 1957 et l'assassinat, grossièrement maquillé en suicide, par l'Etat français, de Ben M'hidi, le 4 mars. Dominant la somptueuse baie d'Alger, resplendissante sous le soleil étésien, le Président déclarait : «Le problème de l'heure c'est l'Etat. Il est fondamental que l'Etat algérien repose sur des institutions démocratiques saines et solides». Que voilà un programme exaltant pour les décennies à venir.
Pourtant, en son for intérieur, le président du GPRA n'ignorait pas que des périls létaux pesaient non seulement sur la construction de l'Etat démocratique qu'il appelait de ses vœux, mais sur le devenir immédiat de l'unité nationale elle-même. Le spectre d'une nouvelle conflagration hantait l'Algérie aussitôt qu'elle s'extirpait de la tyrannie colonialiste. Le syndrome de la «congolisation», comme l'écrivaient les journalistes de l'époque. Et des journalistes, ce n'est pas ce qui manquait à Alger en ce juillet brûlant d'un été torride.
Ben Khedda, le «centraliste» qui avait tenu tête à Hadj Messali aux heures noires du PPA-MTLD, était aussi à Tripoli entre le 27 mai et le 7 juin 1962. Il avait assisté à l'irruption des sombres et épaisses nuées ardentes dans la capitale libyenne. Une poussée fulgurante d'un contentieux historique multidimensionnel. Un maelstrom dans lequel s'enchevêtraient les ambitions antithétiques des uns et des autres ; des projets de pouvoir contrariés ; des rêves de grandeur inassouvis. Une guerre d'egos hypertrophiés pour une pensée politique parfois, hélas, atrophique. «J'y étais, par conséquent je dois en être». Une implacable logique égocentrique et simpliste bouffait gloutonnement, de l'intérieur, comme un cancer vorace, cette prestigieuse Révolution. Elle qui avait suscité la sympathie des forces de paix et de liberté de par le monde, encore éblouies par le courage de ses artisans.
Jusque-là, les luttes étaient certes âpres mais ouatées, assourdies délibérément. Parfois, montaient de quelque réunion, tenue dans un pays voisin, des tonitruances inquiétantes, messagères de drames fratricides. Mais la terrible tragédie de l'intérieur primait toujours sur les grenouillages prolixes mais étouffés, à l'extérieur. Et dans cette lugubre partie de carré arabe, les militaires, seule force organisée, conservaient leur primauté sur les politiques avec l'assentiment des politiques, prééminence affirmée depuis la réunion du Caire d'août 1957. Peu à peu, les abréviatifs FLN et ALN commuent en «politique» et «militaire».
Le processus de phagocytose du premier par le deuxième s'accélère. On militarise. La révolution se radicalise. La plupart des historiens s'accordent pour dire que la session du CNRA qui s'est déroulée au Caire en août 1957 est un tournant dans l'évolution du FLN. En effet, certains membres issus des «22» du Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action (CRUA), générateur du Front de libération nationale, dont Lakhdar Bentobbal et Abdelhafid Boussouf se sont coalisés avec Krim Belkacem, Amar Ouamrane et Mahmoud Cherif.
Des personnalités qu'on désignait traditionnellement par «les militaires», opportunément appuyés par des figures émergentes, étaient partisanes de la remise en cause de la plateforme du Congrès de la Soummam, dans la lettre et dans l'esprit. Abdelhamid Mehri, membre du CCE issu des assises du CNRA de la rue Sarouet, dans la capitale égyptienne, précisait à ce propos dans un entretien avec El Watan : «...Après des discussions acharnées, on a accepté le maintien des structures dirigeantes de la Révolution et bien des décisions issues du 20 août 56, mais en changeant ou plutôt en enrichissant la composante humaine du CNRA, en particulier et du CCE. Tout comme on a mis en veilleuse, sinon gommé d'autres résolutions, notamment la classification entre ceux de l'intérieur et ceux de l'extérieur et la primauté du politique sur le militaire, etc. C'était en quelque sorte un compromis.»
Un arrangement qui balayait les principes «Abaniens» et réduisait, par conséquent, l'influence au sein de la direction de la révolution d'Abane Ramdane, jusqu'alors chargé de la coordination du CCE. Ainsi déclassé, ses prérogatives sont accourcies à celles de directeur du journal El Moudjahid, organe central de la révolution. A son élimination politique, succédera en décembre 1957 le terrible épisode de son assassinat physique lors d'un traquenard qui lui a été tendu par ses «frères», dans la campagne nord-marocaine, non loin de Tétouan.
Puis, à partir de septembre 1958, le GPRA va se substituer au CCE, puisqu'il deviendra l'organe d'exécution des décisions du CNRA. Le FLN cessera d'être le référent immédiat de la révolution, pour devenir une abstraction idéologique transcendantale de la Révolution. L'esprit politique de la guerre de libération, en quelque sorte, même si la littérature des journalistes du monde entier conservait la terminologie.
Les autorités françaises et leurs négociateurs, qui n'ont jamais reconnu le GPRA quant à eux, se gardaient bien de ne mentionner que le FLN, souvent pour le diaboliser mais aussi dans les correspondances ou plus tard les accords. Ce pouvoir des militaires va définitivement s'installer et perdurer après la réunion du «Comité des dix» colonels, dite des «100 jours» (Tunis, août à décembre 1959). Un étrange et interminable synode, destiné, disait-on, à apaiser le malaise politique qui s'est emparé subitement du GPRA. En effet, de graves troubles ont commencé à agiter la jeune institution quelques mois seulement après sa proclamation triomphale le 18 septembre 1958.
Les causes sont multiples et d'entre elles les plus graves liées à la situation alarmante et dangereuse que traversent les maquis du territoire national. Les effets du déploiement du terrible plan Challe, initié par le général dont il porte le nom, à compter de l'année 1959, se font ressentir par les pertes considérables en hommes. A ce désastre, il convient d'ajouter le mauvais climat de suspicion né de la bleuite et des purges, principalement dans les Wilayas III et IV enclavées qui subissaient de plein fouet le manque d'armes, de munitions et souvent de ravitaillement.
En outre, les barrages électrifiés est et ouest hermétisent pratiquement les frontières et rendent non seulement aléatoires les approvisionnements en armes, munitions et nourriture, mais transforment en hécatombe chaque tentative de franchissement.
Des responsables de l'ALN parlent de 80 à 90% de pertes en hommes. Bref, la situation dramatique des maquis conduit à la convocation, à l'initiative du colonel Amirouche de la wilaya III, d'une rencontre au sommet des responsables de l'intérieur.
Elle se tiendra à Oued Asker, dans la presqu'île d'El Qoll, du 6 au 12 décembre 1958. Elle regroupera les colonels El Hadj Lakhdar, de la Wilaya I (Aurès) ; Ali Kafi, chef de la wilaya II (Nord Constantinois), ne participera pas, bien que la réunion se tienne sur son territoire et sous ses auspices. Il déléguera, en tant qu'observateur, Lamine Khène fraîchement désigné comme secrétaire d'Etat au premier GPRA (septembre 1958). Le colonel Ali Kafi expliquera dans ses mémoires que son absence était due à son refus de cautionner les purges engagées par le chef de la Wilaya de Kabylie. Cette dernière sera justement représentée par Amirouche. La IV (Centre), par Si M'hamed ; la V (Oranie) n'assistera pas non plus et enfin Si El Houès, pour la VI (Sud).
«Amirouche et les participants à la rencontre affirmaient qu'ils espéraient redonner de l'avenir aux maquis». Un rapport accablant contre «l'extérieur» sanctionnera les travaux de ces assises qui seront souvent comparées, au congrès de la Soummam, la dimension politique en moins. Un cahier de doléances sera élaboré pour «secouer» le GPRA. «Le malaise des Wilayas ne peut pas ne pas gagner les bases arrières. Les quelque dix mille hommes postés à la frontière tunisienne rongent leur frein», indique Rédha Malek.
A l'extérieur, une sombre affaire de «mort suspecte» d'un de ses collaborateurs amène le ministre des Affaires étrangères, Lamine Debaghine, à claquer la porte du gouvernement le 14 mars 1959. Le chef de la diplomatie du FLN impute la mort de son assistant aux services d'Abdelhafid Boussouf, responsable du ministère des Liaisons générales et des communications, aïeul de la Sécurité militaire et de l'actuel DRS. L'anémie du GPRA ne fait plus aucun doute. Ses carences sont criantes. En juillet 1959, chacun y va de son couplet. Krim
Belkacem (vice-président du Conseil et ministre des Forces armées), parle de «l'isolement de l'intérieur, du mécontentement général».
Boussouf (liaisons générales communications) déplore, de son côté, le fait qu'il y a «des gens pour l'indépendance et d'autres qui ne le sont pas».
Ce que conteste Ahmed Francis (Affaires économiques et des finances), qui a vu dans la charge du puissant patron du MALG une attaque contre les militants issus de l'UDMA (Union démocratique pour le Manifeste algérien), sa famille politique d'avant avril 1956, date de son ralliement au FLN au Caire en compagnie du Président Abbas, fondateur de la formation. L'ancien bras droit du leader historique rétorque que «l'objectif est le même pout tout militant du FLN. Quiconque adhère à ce mouvement est pour l'indépendance de l'Algérie.»(4)
Ferhat Abbas dit de lui-même qu'il est «un Président qui préside mais ne gouverne pas».
Mahmoud Cherif (ministre de l'Armement et du Ravitaillement), lui aussi ancien membre de l'UDMA, contesté par la wilaya des Aurès, sa wilaya d'origine, appelle à la nécessité d'une «autorité ferme, solide, homogène, révolutionnaire et restreinte pour diriger le pays et la guerre». Il enfonce le clou en proposant que le GPRA s'installe en Algérie pour diriger le combat. Tewfik El Madani (ministre des Affaires culturelles) en arrive à la conclusion que «le premier GPRA est mort le 1er juillet à 18 heures...Krim Belkacem et Mahmoud
Cherif, nouveaux Bossuet, en ont prononcé l'oraison funèbre».


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