Prêt de livres inexistant, absence de numérisation et effondrement du soffite, la Bibliothèque nationale d'Alger semble souffrir de dysfonctionnements qui poussent à bout l'ensemble du personnel. «Je ne comprends pas comment une bibliothèque qui a pour mission d'organiser et faciliter l'accès de ses lecteurs aux ressources documentaires soit dépourvue de services indispensables. Et cela ne convient ni au personnel de l'établissement, ni aux abonnés», peste un employé de la bibliothèque. En effet, le prêt externe des livres serait, selon notre interlocuteur, quasiment impossible. «Depuis plus d'une année, les étudiants ne peuvent plus emprunter de livres. Je trouve inadmissible le fait qu'une bibliothèque ne soit pas au service de ses lecteurs», s'indigne-t-il. Cependant, si le prêt externe est inaccessible, l'emprunt interne, lui, est un dédale sans issue. Le lecteur pourrait passer une journée à chercher par ordre alphabétique l'ouvrage convoité. «Je cherche un livre depuis maintenant quatre jours et j'ai peine à le trouver. Imaginez alors la perte de temps pour un étudiant qui prépare un projet de fin d'études. C'est éreintant», regrette le fonctionnaire. La recherche d'un livre prend donc l'allure d'une chasse au trésor par manque d'une numérisation indispensable et absente selon notre interlocuteur. «La bibliothèque dispose d'un système de numérisation, mais son exploitation fait défaut. Cela paralyse tout le monde. Sans parler de l'acquisition de nouveaux ouvrages qui a été suspendue depuis l'année dernière», explique-t-il. Par ailleurs, à se fier aux employés mécontents, les problèmes dans cette institution publique coulent à pleins bords. Outre les couacs techniques et administratifs, les infiltrations d'eau et les fissures présentes dans presque toute la construction inquiètent ces travailleurs. «La bibliothèque tombe en ruine. L'eau s'est infiltrée partout dans le bâtiment et peut causer des dommages très importants. Le directeur a apparemment les doigts de pied en éventail», dénonce-t-il en incriminant directement le premier responsable de l'établissement et révèle qu'un bout du plafond du premier étage s'est effondré quelques heures avant l'entrée des lecteurs. «Il aurait pu y avoir des blessés. Et je n'arrive pas à comprendre l'attitude du directeur qui, au lieu de faire appel au experts, sollicite l'aide des personnes qui n'ont pas de connaissance dans l'entretien de bâtisses», s'indigne-t-il. Pour sa part, le directeur général de la Bibliothèque nationale, Dahman Madjid, indique que l'établissement est la seule institution de la République qui reste ouverte à longueur d'année jusqu'à 20h. «On ne va pas s'amuser à continuer de recevoir des gens alors qu'on ne dispose d'aucune prestation digne de ce nom», argue-t-il. S'agissant du prêt extérieur des livres, le responsable déclare que ce service existe toujours, mais il se fait de la manière classique, manuellement, en raison d'une panne dans le réseau informatique qui persiste depuis plusieurs années. «Le système informatique (système de gestion du prêt) est obsolescent. Nous sommes en train d'engager une étude pour moderniser cette opération. Et il faut savoir que, techniquement parlant, le système de numérisation n'est pas destiné pour le prêt externe. Ce logiciel est conçu pour créer une copie numérique des ouvrages afin qu'elle devienne exploitable sur les supports modernes, donc plus largement disponible», précise-t-il. S'agissant des inscriptions, Dahmane Madjid souligne que la bibliothèque avait interrompu de façon temporaire les enregistrements afin de créer une base de données qui facilitera la caractérisation des lecteurs inscrits. «Le nombre important des personnes inscrites par jour rend la tâche difficile aux employés. Et c'est la raison pour laquelle on a pensé à créer une base de données qui offre des informations complètes sur le lecteur», affirme le directeur, en ajoutant que la bibliothèque a pris du retard sur tous les plans. Selon M. Dahmane, la bibliothèque dispose de plusieurs projets qui sont en cours de réalisation, entre autres l'informatisation, la numérisation. L'établissement est dans la phase d'exploitation des enveloppes budgétaires pour la réfection et la modernisation du bâtiment. «Le problème réside dans l'absence d'un staff dans tous les domaines», déplore-t-il. Quant au bâtiment, le responsable affirme que de grands travaux ont été réalisés afin d'éviter des problèmes «majeurs» qui risquent de porter préjudice aux lecteurs, au personnel et à l'image de la Bibliothèque nationale. [email protected]