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Pataugas, guerre secrète et désillusions !
Hadj Mohamed Issiakhem. Ancien de la Wilaya III, soldat de l'ombre en Suisse et en Allemagne
Publié dans El Watan le 25 - 06 - 2015

«Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire.» (Albert Einstein)
Dans l'art plastique, il ne fait pas de doute que M'hamed Issiakhem s'adjuge une place de choix dans le top des meilleurs. Son autoportrait grand format trône dans ce salon où nous reçoit l'autre Issiakhem, Mohamed, moins médiatisé, cousin du premier, qui mériterait bien de figurer dans le gotha de la guerre de Libération nationale. Mohamed, 84 ans, bien qu'homme de l'ombre, aime la lumière et la liberté pour lesquelles il s'est vaillamment battu au prix «d'aventures rocambolesques», comme il se plaît à les qualifier.
D'ailleurs, l'une d'elles a été savoureusement rapportée par Pierre Bellemare dans ses «dossiers extraordinaires». d'un abord silencieux, sauf quand il se met à parler comme un guide de musée, il serait malvenu de l'interrompre, car il n'aime pas ça. Il le souligne avec une contrariété enrobée de malice bienveillante. D'entrée, Mohamed annonce la couleur : il n'y a pas de guerre ouverte sans guerre secrète.
Mais avant de plonger dans les arcanes troubles de l'espionnage, faisons connaissance avec Mohamed Issiakhem. Il est né le 29 décembre 1931 à La Basse Casbah d'Alger, à l'emplacement de l'actuel bâtiment abritant le Trésor : «Mon père y avait une maison, mais on nous avait donné une semaine pour quitter les lieux en 1932. On a déménagé pour aller au 7 rue d'Alsace, à Belcourt, où j'ai grandi et où j'ai obtenu le certificat d'études à l'école indigène Olivier, en poursuivant mes études secondaires au Lycée Charles Luteau (actuel El Idrissi) et en les complétant à l'école de commerce Begue, près de l'Opéra (TNA). A Belcourt, j'ai fait la même école que M'hamed Yousfi, on s'est connus et on a travaillé ensemble pendant la guerre. Notre amitié ne s'est jamais démentie jusqu'à sa mort.
A Belcourt, j'ai connu Ahmed El Caba, Mohamed Belouizdad, Ahmed Mahsas, le Dr Aroua, Tazir-Bacha et Ahmed Bouda, notre cheikh à tous. A la rue de la Lyre, où j'ai commencé à travailler dès le 26 mai 1950 en tant que grossiste en textiles et soieries, j'ai fait la connaissance de Belhafaf Nafaa, Mokhtar Bouchafa, les frères Madani, Débih Cherif… C'est là que mon père et mon oncle avaient acheté un immeuble en 1930. Je m'y suis installé 20 ans plus tard. Déjà, en 1902, mon oncle avait élu domicile au 3 rue de la Poudrière en vendant des tissus, louant un local appartement à Douieb, gros propriétaire immobilier de confession juive. J' y ai aussi connu Rebah Lakhdar qui m'a introduit chez Abane Ramdane lors de mon adhésion au FLN en 1955.
J'ai donné d'entrée 500 000 F au Front. J'allais au bled près d'Azeffoun, au village Taboudoucht où j'ai pu apprécier les qualités de Mansour Mohamed (Saïd Boudoukhane), révolutionnaire et lettré, Laskri Mohamed Azzoug, chef de secteur, neveu de Mohamed Abba qui avait hébergé Messali en 1948 lors de sa tournée en Kabylie. Abba Omar, actuel ambassadeur d'Algérie à Londres, avait 10 ans à cette époque. Il m'avait dit : ‘‘Je ne suis jamais monté dans une voiture. Tu es venu dans une berline et tu nous a amenés à Alger dans ta rutilante voiture Buick. C'était pour moi une formidable découverte.''» Mohamed avait contacté Hamadi, chef de région. «Les combattants étaient dans un état lamentable et leur tenue laissait à désirer.
C'est pourquoi on m'a suggéré de confectionner des tenues militaires, des uniformes. Mais c'était risqué. Il valait mieux les avoir prêts à porter. Comme j'étais administrateur, j'ai fait une commande de pataugas et d'uniformes. Comment les acheminer au maquis sinon par le car faisant la liaison Alger-Port Gueydon ‘‘L'oiseau blanc'' appartenant à Aït Ouarab Hadj Belkacem... J'ai vu un fournisseur et j'ai passé commande de 300 tenues à Marseille vendues virtuellement et destinées au… Maroc. Le transitaire a dû changer les étiquettes à l'embarquement.
En tout, 1645 paires de pataugas, 300 tenues militaires. Au total, la facture s'est élevée à 2 millions 140 444 de francs de mes propres deniers. C'est Mansour (Boudoukhane) toujours vivant qui les réceptionnait. Comment ? Il a fallu inventer un stratagème. Le nommé Aouadi, un gars de Oued Souf, travaillait chez moi. Il avait des parents qui en faisaient de même chez les grossistes importants ; je leur ai demandé de me ramener des étiquettes d'expédition au nom de Borgeaud, Marchina et Jonhatan chez qui ils travaillaient. Avec des ‘‘sommités'' pareilles, les colis n'étaient pas contrôlés.
Quant au destinataire, on a jeté notre dévolu sur un commerçant juif fort connu de Port Gueydon : Joseph Hadjidj, qui évidemment n'était pas au courant. Mais nous devions coûte que coûte éviter l'arrivée de la marchandise à Port Gueydon. C'est Askri et Mansour (Boudoukhane) qui l'interceptaient à Ighil Mahni, à quelques encablures de la ville. On m'avait apostrophé : ‘‘Et les armes ?''. ‘‘Ce sera pour bientôt'', répondis-je. Ce qui est évident, c'est que ce seront les premières tenues de l'ALN, ici au niveau de la wilaya III.» En septembre 1956, recherché, Mohamed quitte les lieux pour les bases de Tunisie et de Libye.
«Arrivé à Tunis, j'ai été surpris par une sorte de cacophonie. A Genève, j'ai rencontré Ahmed Francis, originaire de Relizane, et ami de la famille qui s'y était établie au début du siècle dernier. Il y avait aussi Ferhat Abbas, Ahmed Boumendjel, Adda Benguellat, Aït Ahcène qui sera assassiné par La Main rouge en Allemagne fédérale. Je pars sur Tripoli, où je trouve mon ami Ahmed Mahsas et Bachir El Kadi, responsable FLN.»
Famille aisée
«Ce départ à l'extérieur s'est effectué à la suite de la création de l'Union générale des commerçants algériens que m'a confiée Lebdjaoui. Nous avions reçu ordre de créer des syndicats corporatifs (coiffeurs, hôtels, cafés, hammams...) pour éviter les fiches des nuitées pour les combattants qui, comme on le sait, sont directement transmises à la police. J'avais un avocat en Suisse du nom d'Ellenberger, un Bernois que j'ai constitué pour défendre les 5 arrêtés après l'arraisonnement de l'avion en 1956 (Ben Bella, Khider, Aït Ahmed, Boudiaf et Lacheref) ; mon avocat avait pris contact avec le commandant Giraud, juge militaire chargé de cette affaire qui lui a sorti un vieux texte disant qu'un étranger n'a pas le droit d'accès au dossier tant que l'instruction n'est pas terminée.
Finalement, c'est Boumendjel qui a été désigné par Abbas. A cette période, j'étais avec Abderrahmane Seri qui était pilote d'essai à Bretigny. Zidi était avec nous. Je n'omettrai pas de signaler l'apport de l'ambassade égyptienne en Suisse et particulièrement le Dr Abderrahmane Badaoui, ami de Taha Hussein qui officiait en qualité d'attaché culturel, un érudit qui avait une chaire de philosophie à l'université de Aïn Echems. Il est intervenu à plusieurs reprises en notre faveur en nous livrant passeports et laisser-passer.
Touhami rentré en Libye, je suis en Allemagne où je travaille dans l'armement du FLN avec des techniciens, dont le regretté Aïssa Abdessemed. Un jour, je suis parti avec Aïssa Boudiaf de Ngaous à Hambourg pour essayer l'armement. Il y avait Henri Gueinand, ressortissant suisse avec Marcel Leopold son compatriote, tous deux fournisseurs d'armes.
Le procureur général de la confédération helvétique avait signé des mandats d'arrêt contre Aïssa et moi alors que nous étions en Allemagne. Il a outrepassé le droit, d'autant que je n'avais commis aucun délit en Suisse. En rentrant, on n'a pas été arrêté, mais un mois après on devait partir à Tripoli avec Boudiaf Aïssa, Gueinand et Marcel avec, dans nos bagages, 60 kg d'explosifs. On a été arrêtés à l'aéroport. J'avais un P 38. Je l'ai sorti. J'ai menacé de rayer l'aéroport de Contrains de la carte du monde. Aïssa m'en a dissuadé avec cette pointe d'ironie : ‘‘Tu veux que nos camarades de la prison de la santé entendent la déflagration ?'' On a été emprisonnées à Saint Antoine…
Le procureur général est venu m'interroger en prison. ‘‘Cela me fait un grand honneur de voir un homme de votre rang se déplacer, lui dis-je, alors qu'un officier de la police judiciaire aurait suffi !'' Mohamed savait que le procureur travaillait avec le SDECE et La Main rouge et notamment avec le colonel Mercier, attaché militaire à l'ambassade de France à Berne. J'ai pris contact avec mon avocat qui a appelé le correspondant de l'Associated Press. Pierre Bellemare en a fait part dans son livre en signalant qu'il manquait un maillon : eh bien, ce maillon je vais vous le révéler : j'ai fait dire dans la presse que d'après une source d'Amérique latine (pour éloigner les soupçons) le procureur général collabore avec le colonel Mercier.
Aussitôt le procureur dément. Dans mon réseau, il y avait un Algérien qui travaillait à l'ambassade américaine à Paris. Il m'a ramené une photo montrant le procureur Dubois et le colonel Mercier attablés dans un restaurant. Alors qu'il jurait ses dieux ne l'avoir jamais vu ! La photo a fait un ravage et le procureur s'est suicidé quand l'affaire a pris de l'ampleur. Que voulez-vous ? C'était la guerre secrète, la lutte entre les services français et le renseignement du FLN...».
Au front en 1955
Dans le journal La Suisse du 30 janvier 1957, on y lit : «Les recherches entreprises par la police fédérale ont été poursuivies avec toute l'énergie nécessaire. Les recherches les plus récentes ont permis de découvrir des indices sérieux établissant qu'il était possible que le procureur de la confédération aurait pu communiquer lui-même, contrairement aux dispositions légales, à un organe étranger, des informations qui ne concernaient toutefois pas des affaires suisses.» Mohamed reprend le fil de l'histoire : «On s'est donné rendez-vous avec Marcel dans une rue de Genève.
En y allant, je sentais qu'on me suivait. Arrivé près de l'endroit fixé, je vois à l'autre bout du trottoir Marcel que je n'ai pas voulu réjoindre. Il avait compris. L'intention des suiveurs était que nous soyions ensemble pour nous éliminer, laissant croire à un règlement de comptes. Constatant le piège, Marcel est parti, moi j'ai réussi à les semer.
Quelque temps après, j'apprends qu'ils ont eu la peau de Marcel. Voici comment Leopold qui fournissait les armes du FLN a été assassiné. Cela s'est passé le 19 septembre 1957, Cours de Rives à Genève. Marcel Leopaold pénètre dans l'immeuble où il occupe un appartement. Il traverse le hall, entre dans l'ascenseur, un homme y pénètre avec lui, assez robuste, porteur d'une serviette qui pourrait appartenir à un encaisseur quelconque. Il est 12h10. L'ascenseur commence à monter.
Quelques secondes plus tard, Lola, la femme de Marcel, une refugiée russe dont on voit qu'elle a été d'une très grande beauté, entend un petit coup de sonnette à la porte de l'appartement. Elle ouvre : son mari est devant elle, blême, appuyé au chambranle, haletant, la main posée sur le cœur : ‘‘Ils m'ont empoisonné'', dit-il, aussitôt il vacille, s'affale entre les bras de sa femme épouvantée et glisse sur le sol. Marcel Leopold est mort.
La police, appelée, récolte trois indices : les propres paroles de la victime (‘‘Ils m'ont empoisonné''), le signalement très précis de l'assassin donné par un jeune homme qui entrait dans l'immeuble un peu avant le meurtre, et un instrument extrêmement bizarre : une pompe à vélo ! Cette pompe a été abandonnée dans l'escalier par où l'assassin présumé est descendu précipitamment, d'après le témoin. En examinant l'instrument, les policiers s'aperçoivent qu'il est pourvu d'une détente, les policiers portent donc leur trouvaille à leurs supérieurs, qui viennent eux d'apprendre que Marcel Leopold a peut-être été tué avec une fléchette retrouvée au 2e étage de l'immeuble et démunie de sa pointe.
L'innocente pompe à vélo serait donc une sarbacane. Et l'on cherche immédiatement à savoir quel poison a pu être utilisé pour provoquer une mort aussi rapide ! Il s'agit d'un empoisonnement au curare. 17 ans exactement après au bout desquels, dans un numéro de septembre 1974, un mensuel affirme tenir d'un informateur qui entend garder l'anonymat la version définitive et véridique de l'affaire. Leopold était devenu ‘‘le plus important fournisseur d'explosifs du FLN''. Il n'aurait tenu aucun compte des avertissements envoyés par les services spéciaux français, au courant de ses activités… le SDECE aurait donc songé à l'éliminer.»
Guerre secrète
Mohamed avait informé l'Egyptien Badaoui que toutes les informations et les communications de Gamal Abde Nasser étaient interceptées à Berne, enregistrées et transmises à Mercier. «Il y avait une collusion entre le SDECE et le Mossad contre la Révolution algérienne», soutient Mohamed qui avait écopé de 8 mois de prison qui l'ont «rendu malade suite aux tortures subies, et ce, dans la ville d'Henri Dunant, fondateur de la Croix Rouge ! Par la suite, je voulais quitter Genève.
Ferhat Abbas m'en a dissuadé : ‘‘Genève est une tribune importante pour le FLN, tu dois y rester''. J'ai obtempéré, car je croyais en Abbas qui me soufflait les termes que je devais dire à mes geôliers lorsque j'étais privé de liberté. J'étais condamné avec Boudiaf Aïssa à 10 ans d'interdiction de séjour. J'avais donné la preuve des écoutes contre les Egyptiens. Avec mon réseau, j'ai donné des informations sur l'armement suisse livré à Israël.
Cela suffisait pour me clouer le bec ! Celui qui a assassiné Marcel était sous-lieutenant à Service action. Il est devenu directeur général du SDECE et haut gradé dans l'armée française. Il a accompagné Mitterrand lors de sa visite en Algérie. Après l'indépendance, au cours d'une collation, j'ai posé la question à Ben Bella : ‘‘Lorsque on a détourné votre avion en 1956, pourquoi ne l'aviez-vous pas détourné à votre tour puisque vous étiez armés à ce que je sache ?'' Il n' y a pas eu de réponse, mais son regard m'a mitraillé…».
A l'indépendance, Mohamed est président d'un groupement d'achat des textiles en Algérie, assesseur au tribunal d'Alger : «J'ai prêté serment devant le président du tribunal d'Alger M. Ahmed Drif, père de la moudjahida Zohra en 1968», puis conseiller au ministère du Commerce et directeur de plusieurs sociétés, avant de prendre sa retraite en 1976. «J'avais repris la ‘‘Boom'', société en faillite qui avait perdu les 3/4 de son capital, elle s'en est sortie avec 550 millions de bénéfices nets», ajoutera Mohamed.
Originaire d'Azzefoun, la famille Issiakhem, versée dans l'agriculture, a émigré à Orléansville en 1890, puis Oran, mais c'est à Relizane que la famille s'est fixée où elle a ouvert des hammams, dont le célèbre Merakchi et une medersa qui a eu un grand rayonnement avec de grands noms : Abdelkader El Yadjouri, Ali Megherbi, Larbi Tebessi, Mohamed Salah Ramdane, Cheikh Naïmi, Abdelmadjid Meziane et cheikh El Ibrahimi, cheikh Hamani, la visitaient souvent.
L'air mélancolique, Mohamed confie : «Avant, j'avais le passeport français, j'ai donné à l'époque plus de 2 millions et demi à la Révolution. J'ai pris les armes pour avoir la citoyenneté algérienne. Aujourd'hui, on vend son pays pour 50 euros, se désole-t-il. Les mentalités ont changé, on a tout fait pour éclater la cellule familiale, on s'est employé à corrompre les gens, à les abrutir. Moi, je suis d'une autre trempe. J'aurais pu être milliardaire et me la couler douce. Je mentirai en disant que tout va bien aujoiurd'hui.
On aurait pu être un grand pays, car nous sommes la porte de l'Afrique. Je termine par cette anectode : l'ancien maire de Saint-Eugène, Raymond Laquière, qui a également été président de l'Assemblée algérienne, est venu dire un jour à Ferhat Abbas : ‘‘Une hirondelle ne fait pas le printemps''. La réplique de Abbas a été cinglante : «Sûrement, mais elle l'annonce…''»


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