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Sarah Haidar : Aphasie bavarde
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Publié dans El Watan le 04 - 09 - 2015

Un tas de chair nue, jeté tristement sur un lit toujours trop grand. Elle interroge les murs, défie la rigidité de ses rideaux, essaie de comprendre ce Dehors étranger, cet amas de choses qui s'accumulent en dehors de son corps. Une vie, ce n'est rien au bout du compte.
Il suffit de consentir à voir la ligne qui sépare l'être en tant que chair de l'être moral, celui qui naît et meurt dans un lieu futile. C'est la durée séparant ces deux moments qui définit la vie. Mais lorsque le corps, nu et seul, se retrouve face à lui-même, sans avoir besoin de miroir, se contentant de sentir sa lourde présence, deviner les plis des draps, entendrele silence qui l'entoure dans l'indifférence de l'air et de la nuit. Lorsque vient ce moment sans vie où toutes les pensées perdent leur or, où le vide sidéral englobe l'esprit et donne naissance à la torpeur originelle. Lorsque le long chemin parcouru jusque-là se dévoile dans toute son insignifiance. Lorsque se produit cette énorme découverte de soi, existence solitaire au milieu des ombres sans identité, s'installe alors l'idée atroce de la mort. Cette mort qui n'est plus seulement un arrêt définitif des fonctions vitales, mais la simple conscience de son inexistence morale face au brouillard. Ce brouillard qui se densifie à mesure que l'absence du sens devient la seule vérité absolue…
Elle sait à présent que tout ce temps qu'elle a gaspillé en croyant vivre, aurait dû servir à faire autre chose. Quelque chose d'infinimentplus important. Mais quoi ? Sortir de son âme pour tenter l'expérience du non-être, transformer celui-ci en une possibilité de vie invisible, inconcevable. Liquéfier son existence dans la seule idéedu corps. Résumer la vie dans un flux et reflux de sang qui court dans les veines. Abandonner la parole. Tuer l'esprit. Flotter…Elle passe sa main entre ses cuisses, remonte vers le ventre puis les seins, s'immobilise sur son cou, tâte sa jugulaire, enfonce un doigt dans sa bouche. Elle ne connaît rien de ce corps. Son seul bien, sa seule preuve d'existence. Mais le factice l'emporte. Elle ne se contente plus de ce souffle qui entre et sort sans rien lui dire.
Elle veut aller au-delà des signes. Mais comment comprendre tout en dénigrant le pouvoir de l'esprit ? Elle prend une bougie et laisse couler la cire le long de sa poitrine. La douleur est physique. Mais ce cerveau qui se mêle de tout, cette peste rationnelle qui veut résister à la souffrance en enclenchant un mécanisme mental… Comment y échapper ? Son corps parle mais ne peut pas crier.
C'est sa raison qui lui impose des gémissements somme toute ridicules puisque la cire n'est rien d'autre qu'un dialogue entre deux chaleurs qui se comprennent. Parvenir à recevoir cette prétendue douleur avec le plus de sérénité possible, c'est cela plonger dans le corps, n'être plus rien que corps. Mais elle pense, entend ses pensées défigurer le silence.
Comment déglinguer la machine ? Comment parvenir à cette ultime délivrance ; celle du non-cérébral, du non-humain ? Des images se bousculent : un linge qui pue la moisissure, un enfant qui pleure, un gros sac plein d'on ne sait quoi et dont le poids se voit et ne se sent pas, un livre vide, un vieillard qui se gonfle, se gonfle, monte au plafond et explose, une petite fille aux yeux rouges et aux cheveux verts, une lettre anonyme ou un mot illisible trône sur un espace vide… Ce sont là des fulgurances qui ne renvoient à aucun souvenir, à aucune idée…
Elles viennent comme la parole d'un fou, s'approprier l'espace de la réflexion, anéantissant la réflexion. Elles instaurent l'ordre parfait : l'absence de tout ordre jusque-là connu, médité et compris. Elle vit ce moment d'étrangeté où elle-même ne se reconnaît pas, ne retrouve aucune trace de ce qu'elle avait l'habitude de résumer comme étant Soi. Elle perd son essence factice et découvre l'existence d'un autre corps, celuiqui ne parle plus mais sent, s'étouffe de sensations jusqu'à ne plus exister en dehors de cette folie.
Son corps se résorbe, devient grain de poussière mais tellement seul qu'il en acquiert un poids, une présence bien plus imposante, bien plus réelle.
Ce moment, elle le voit devant elle. Elle le touche. Mais elle sait que demain déjà sera un autre jour. Le jour de la reprise. Elle se remettra à marcher, à parler, à voir et à sentir ce qui, en réalité, n'existe pas. Les rues, les gens dans les rues, les regards des autres, leurs paroles, leurs odeurs, leurs actions. Elle sera de nouveau étrangère à son corps. Elle tentera de se remémorer ce moment, cette révélation muette ; mais les images s'estomperont, les mots fuiront et même le silence se taira, apeuré par les bruits des autres, la «vie» des autres.
Elle ne fait pas le moindre effort pour garder en mémoire les détails de ce moment. Elle sait qu'il ne se laissera jamais dire, que sa seule raison d'être est justement cette incapacité éternelle de le décrire, de le comprendre. C'est parce qu'il lui échappe complètement que cet état de non-réception du monde est réel est terriblement authentique. Mais comment pourra-t-elle dormir avec cette conscience éphémère ? Comment pourra-t-elle ne pas dormir avec cette même conscience ? Même l'idée de la mort voulue paraît ridicule à côté de cette trouvaille qui va, elle aussi, mourir. Mais comment mourir lorsque l'on sait que l'on ne vit pas ?


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