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De l'insurrection à la Révolution
60e anniversaire du Congrès de la Soummam
Publié dans El Watan le 20 - 08 - 2016

On lit souvent que les Assises de la Soummam, les premières de l'histoire du Front de libération nationale, sont venues pour obvier au débriefing manqué de janvier 1955, prévu le 24 octobre 1954, par la réunion décisive des «Six». Ultime rendez-vous de ces pères fondateurs, qui s'est déroulé dans la demeure de Mourad Boukechoura, ancien chef scout de Bologhine et membre de l'OS, située au 24, rue Comte Guillot (aujourd'hui Bachir Bedidi), à Raïs Hamidou (Alger).
Mais, l'Histoire nous apprend qu'il en va de certains événements, comme des phénomènes physiques ou chimiques.
Ainsi, par exemple, les chimistes nous expliquent les déflagrations par ce qu'ils appellent savamment : les limites d'explosivité. Un gaz ou une vapeur parvient à ce niveau quand leur concentration dans l'air atteint le stade critique de l'inflammation ou de l'éclatement. Le phénomène est borné par la Limite inférieure d'explosivité (LIE) et la Limite supérieure d'explosivité (LSE).
Sous la LIE, le mélange est trop pauvre en combustible pour amorcer une réaction. Au-dessus de la LSE, c'est le comburant qui manque. «L'heure, c'est l'heure ; avant l'heure, ce n'est pas l'heure ; après l'heure, ce n'est plus l'heure», aurait dit Jules Jouy auteur de cette célèbre maxime.
Le Congrès de la Soummam est un événement capital dans l'histoire du pays. Il constitue la fin de la période de maturation politique animée par le mouvement national dans toutes ses composantes depuis, pratiquement, le début du XXe siècle. Le départ de la lutte armée était le point d'orgue de ce mouvement. Ses initiateurs avaient le courage et l'audace de lancer à l'Etat français - et au colonialisme qu'il défendait - un défi qui le marquera à jamais, puisque c'est en Algérie que s'effondrera son empire.
Toutefois, le vaste mouvement indépendantiste né avec l'Etoile nord-africaine (ENA) en 1926, avait certes un objectif qui était l'Istiqlal, mais pas de programme quant à l'après-colonialisme et la construction de l'Etat, pas plus que de stratégie militaire à mettre en branle le moment de la lutte venu. L'histoire s'étant brutalement accélérée à la fin du premier trimestre de l'année 1954 avec la création du CRUA, il a fallu faire et réagir au cas par cas, selon les situations qui allaient naître de la décision de déclencher.
A la différence de ses rivaux, particulièrement les libéraux de l'UDMA et les communistes du PCA, qui eux avaient des programmes. Peu rassembleurs, il est vrai, avec des perspectives de songe-creux, pour ne pas dire utopistes, mais qui entretenaient néanmoins l'illusion d'une solution aux problèmes sociaux de la majorité algérienne, mais assurément pas de terminaison à la domination colonialiste. Cela ne suffisait pas pour allumer des espérances parmi les colonisés qui, dès leur naissance, comptaient les jours qui leur restaient pour mourir de faim, de froid, de maladie ou de violence, du fait du bon vouloir du colon qui avait sur le colonisé le droit de vie ou de mort.
C'est la radicalisation des positions des membres de l'OS, anciens ou qui ont échappé au coup de filet de 1950, qui est à la base du formidable soulèvement. Ils ont invité le fusil de chasse au balthazar, pour déboucher l'ouïe de l'occupant. Celui-ci a répondu par la guerre totale. Tout le monde se souvient quand, le 12 novembre 1954, à la tribune de l'Assemblée nationale, François Mitterrand, alors ministre de l'Intérieur avertissait d'un ton comminatoire : «La rébellion algérienne ne peut trouver qu'une forme terminale : la guerre.» Le ministre de l'Intérieur, qui deviendra président de la République française de 1981 à 1995, a été le premier homme politique à prononcer le mot «guerre», lequel, pourtant, sera banni du langage et presque de la langue français, pour lui substituer une foultitude d'euphémismes les uns plus grotesques que les autres. Il ajoutait dans la foulée, brandissant un titre de propriété : «L'Algérie, c'est la France. Et la France ne reconnaîtra pas chez elle d'autre autorité que la sienne.»
Il aura donc fallu que cette longue et impitoyable guerre, voulue par l'Etat colonialiste français et exigée par le colonat en Algérie, s'installe à demeure et provoque un véritable cataclysme dans la population autochtone, éreintée par 126 ans d'assujettissement et d'oppression impérialiste, avec son terrible décompte morbide, pour que les occupants entendent les plaintes des occupés.
A Ifri, ce fut la toute première fois que des Algériens se réunissaient afin de délibérer sur le devenir de leur entreprise émancipatrice historique et ouvrir de grandes voies qui les canaliseront, de même que les principes qui les guideront vers la restauration de l'Etat national. Un Etat qu'ils ont voulu, ainsi que le proclame l'Appel du 1er Novembre, «démocratique et social».
Tout cela s'est passé dans une masure où étaient rassemblés six politiques et militaires, assis sur des tabourets de fortune. Pourtant, ces décisions majeures, considérables d'importance, qui feront la transmutation de l'insurrection en une Révolution véritable et qui constitueront le levain, auraient aisément pu se dérouler dans un pays voisin frère qui aurait offert son hospitalité à des Révolutionnaires qui faisaient, depuis 22 mois, la fierté des peuples du Tiers-Monde.
Mais «c'est ici qu'est la rose, c'est ici qu'il faut danser», aurait dit Karl Marx. C'est au cœur de l'Algérie, elle-même, au cœur de la guerre, que s'est forgé le destin de son peuple. Ce Congrès d'abord prévu comme une simple réunion de coordination et, dans certains cas, l'occasion pour les uns et les autres de se découvrir et de faire connaissance, a trouvé dans l'expérience et la pratique sur le terrain ce dont il allait se nourrir. En d'autres termes, il s'est agi de théoriser une pratique, de tirer de l'acquis, des règles et de créer des normes et des formes d'organisation pour en assurer la pérennité, ou à tout le moins la durée, en tous les cas le succès.
Nous ne disposons pas, ou pas encore, de documents en quantité ou en qualité suffisantes qui permettraient au chercheur ou à l'historien d'analyser les débats qui se sont déroulés dans la maison forestière d'Ighbal, et encore moins de données qui rendraient fidèlement compte sur «qui a dit quoi» ou encore «qui a proposé quoi».
Aussi, attribuer aux seuls Larbi Ben M'hidi et Abane Ramdane l'exploit, car c'en fut un et un grand, serait une gageure, mais aussi cela équivaudrait à minimiser l'importance de personnages comme Krim Belkacem, Zighoud Youssef, Amar Ouamrane, Lakhdar Bentobbal. Ces personnalités de légende ayant été les seules admises aux débats. La règle en était que chaque zone, dont l'appellation deviendra «Wilaya», serait représentée par son responsable, son responsable seul, à l'exception de la zone 2, pour laquelle Bentobbal, l'adjoint de Zighoud, participera.
Chaque chef conférait après chaque séance avec ses adjoints pour les informer de l'évolution des travaux et prendre leurs avis. L'axiomatique révolutionnaire dégagée par les travaux du Congrès nécessitait la mise à plat de la praxis de chacun des responsables et la discussion pour élaborer une stratégie commune. Pour un certain nombre de chapitres, le texte qui a été rédigé au préalable et présenté aux congressistes (voir le document ci-après), ne pouvait pas préfigurer des travaux de l'assemblée. Il est de notoriété publique que deux points ont fait l'objet d'empoignades électriques et d'explications querelleuses.
Des propos drus ont opposé Krim et Abane à propos de l'opération «Oiseau Bleu», laquelle aurait «traîné en longueur», de l'avis du second, mais qui s'est soldée par un «un franc succès», selon le premier. Il y eut aussi l'insurrection généralisée du Nord Constantinois décidée par Zighout Youssef après avis de ses adjoints et collaborateurs, de l'année précédente, qui aurait soulevé des critiques d'Abane qui allait imposer son leadership à l'issue de ce rendez-vous avec l'Histoire. Certaines sources citent aussi les soldes consenties par les états-majors locaux à leurs djounoud. La très forte personnalité du tandem Abane-Ben M'Hidi va peser sur le Congrès au point peut-être pas d'atrophier, mais assurément d'étrécir le rôle tout aussi important des autres dans la tradition populaire et les exégèses des spécialistes.
D'aucuns parmi les analystes et les commentateurs ont estimé aussi que l'on a assisté à Ifri à un compromis historique qui a donné naissance à la Plate-forme de la Soummam. Qu'un certain nombre de concessions aient été accordées par l'une ou l'autre des personnes présentes, quoi de plus naturel lors d'une réunion d'une telle importance et d'une telle portée historique ? On peut arguer que les participants, tous issus de la même matrice politique, pour le coup, le PPA-MTLD, tous patriotes nationalistes et tous indépendantistes, quels auraient pu être les points d'achoppement sévères susceptibles de raidir les pentes au point de nécessiter des compromis ? Tout plaide pour le contraire si on considère le sort qui fut celui de l'équation que l'on attribue à Abane, qui préconise «la primauté du politique sur le militaire et la primauté de l'intérieur sur l'extérieur». Une formule qui traduit on ne peut mieux sa pensée de politique méfiant à l'égard des militaires, qui sera balayée d'une chiquenaude, une année après jour pour jour, lors de la rencontre du Caire.
Certaines sources affirment que Krim Belkacem aurait proposé au Congrès une direction militaire intérieure unifiée et pourquoi pas sous le commandement synoptique d'un général en chef. Abane lui aurait opposé sur un ton amusé : «Et bien entendu tu serais ce général.»
Ce qu'il redoutait était en fait le bicéphalisme de l'exécutif qui entraînerait la déchirure au sein du commandement de la Révolution et donc de la Révolution elle-même. Le Congrès s'en est tenu au CNRA et au CCE. Un Parlement qui siège et qui décide et un exécutif qui applique
L'histoire lui donnera raison, connaissant le conflit de compétence entre l'Etat-major général (EMG) et le GPRA, cinq ans après, au vu des lésions profondes que ces divergences ont laissé, et dont la gouvernance du pays n'est pas encore guérie.
Quoi qu'il en soit, la rébellion de 1954 s'est métamorphosée en une lame de fond qui allait foudroyer l'ordre colonial établi, bousculer sérieusement l'Etat colonialiste dans ses fondements. Un putsch militaire va installer de Gaulle, présenté comme le fils prodige, sur le trône de France. Il fera adopter une Constitution qui instaurera la Ve République. L'armée, colonne vertébrale de la République depuis Napoléon Bonaparte, est déstabilisée au point qu'une partie va désespérément tenter un coup de force pour garder l'Algérie française. Les prisons militaires se peupleront de généraux présentés jusque-là comme des «héros».
D'un autre côté, c'est l'Esprit de la Soummam qui gardera serrés et unis les rangs de la Révolution et cimentera à jamais la Nation algérienne.


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