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L'égalité successorale en Algérie à l'épreuve du dogme : osons le débat
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Publié dans El Watan le 17 - 03 - 2018

Dans le prolongement du dossier consacré par le quotidien El Watan du 25 octobre 2017 et l'interview accordée à l'islamologue Said Djabelkeir dans l'édition n° 8350 du 11 de ce mois sous le titre «Un nouvel ijtihad pour l'égalité en matière successorale est possible», des pistes de réflexion sont suggérées et la critique objective et scientifique reste, plus que jamais malgré la résignation intellectuelle et politique ambiante, nécessaire pour pouvoir soustraire cette question de l'emprise et du seul dogme religieux.
Si le législateur a opéré des innovations certaines en matière de statut personnel et des relations régissant la famille, il s'est par contre montré strictement respectueux des dispositions relatives aux successions, notamment quant au partage.
Plus que toute autre question, celle de l'égalité successorale entre homme et femme pose problème et demeure un sujet tabou, même si des voix s'élèvent, ici et là, pour réclamer publiquement l'instauration d'une totale égalité entre les sexes et d'autres, de plus en plus nombreuses, pour manifester en privé leur inquiétude quant à la dévolution de leur propre succession. Cette angoisse qui est aussi plus qu'un désir ne peut être indéfiniment ignorée. Elle doit être prise en considération.
Les successions occupent une place importante dans le droit musulman peut-être parce qu'elles puisent leur source dans le texte sacré mais aussi parce qu'elles ont été réglées, de telle sorte, qu'elles ne permettent aucune interprétation nouvelle. Pour sa part, Ibn Khaldoun, dans ses Prolégomènes, relativise cette affirmation en constatant que «le partage des successions occupe une place à part dans les traités de droit (…) ; c'est un noble art, parce qu'il exige une réunion de connaissances dont les unes dérivent de la raison, et les autres de la tradition; (…) c'est une science très noble» (Trad. de Slan, III, 23, 24, 139) (à partir de Louis Milliot : Introduction à l'étude du droit musulman, recueil Sirey Paris 5e, réédition 1971, p. 444)
Le principe fondamental autour duquel s'articule le droit successoral est la règle du double : la part de la femme est inférieure de moitié à celle de l'homme de même degré et de même parenté par rapport au de cujus. Cette règle est incontournable en droit algérien de la famille. Elle s'impose aussi bien aux intéressés qu'au juge du fait que le code de la famille n'offre aucune possibilité pour rétablir l'égalité.
Cette règle du double est justifiée par certains auteurs et les commentateurs musulmans par l'interprétation et l'application littérales des prescriptions coraniques très précises sur ce point ainsi que les charges (dot et entretien) dues aux épouses et qui incombent de façon exclusive à l'homme mais aussi parce qu'elle nous renvoie non seulement au registre religieux mais également à celui des pratiques sociales, des habitudes où se mêlent les considérations psychologiques et sociologiques aux intérêts purement matérialistes.
Une justification qui joint l'ordre théologique à une explication au demeurant matérialiste.
Or, l'esprit de l'institution de la dot en islam, souvent évoqué comme argument à cette inégalité, est essentiellement symbolique. Les charges de l'homme en tant qu'époux, père ou fils en vue de l'entretien de la famille, correspondent à une division du travail au sein de la société arabe tribale, patriarcale et patrilinéaire, contemporaine du prophète Mohamed (QSSSL).
De l'avis du juriste marocain, A. Moulay R'chid, plusieurs jurisconsultes musulmans défendent la thèse qu'il n'est pas dit dans le Coran que la femme hérite moins que l'homme dans la totalité des cas. Pourtant l'école malékite a institué des normes visant à diminuer la part des femmes, sinon à les exclure totalement de la succession en privilégiant la lignée agnatique, celle des parents mâles, les aceb, y compris ceux à un degré très éloigné du défunt que le législateur algérien, à l'instar du marocain, a pris en compte dans une certaine mesure.
Les légistes malékites refusent d'accorder la qualité de «successibles» aux cognats, dhaoui al arham. A défaut de parent aceb et en cas de reliquat – ou même pour la totalité – on appelle à succéder l'aceb de la troisième catégorie, c'est-à-dire le beit el mal (le trésor public) qui hérite en cette qualité, alors même qu'il y aurait des parents par le sang très proches, seraient-ils héritiers à fardh. Dans le rite hanafite on attribue le reliquat de la succession – ou sa totalité – aux héritiers fardh au prorata de leur part.
La thèse malékite conduit à reconnaître au beit el mal (le Trésor public) la qualité de parent éloigné successible, mais préféré aux femmes. Ce n'est pas le beit el mal qui hérite, en réalité, c'est la communauté représentée par lui. Dans le rite malékite, elle est appelée en qualité de aceb. Dans le rite hanafite, elle vient au titre de la déshérence. C'est à ce titre que furent créées des institutions telles les habous et les waqf, lesquels dans certaines situations contournent la règle, soit pour diminuer la part des femmes telle que fixée par les textes coraniques ou pour les exclure de la succession et/ou les déposséder.
Moulay R'chid ne manque pas de relever à ce sujet les conflits crées entre les bénéficiaires et les difficultés nées de la gestion et de l'exploitation de ces biens dits habous ou waqf dans la pratique. Nonobstant le fait que dans certaines situations, cela constitue une grave injustice à l'égard des héritières de sexe féminin. Ne constitue-t-elle pas une violation manifeste des prescriptions du texte sacré ?
Les articles 126 à 183 du livre III du Code de la famille algérien régissent les successions selon les diverses et complexes situations qui peuvent se présenter.
Fondée sur la parenté et la qualité de conjoint, l'article 138 exclut de la vocation héréditaire «les personnes frappées d'anathème et les apostats», mais le code reste muet sur la vocation héréditaire de l'épouse non musulmane. Les héritiers se répartissent en trois catégories distinctes et leurs parts varient d'une situation à une autre.
Les héritiers réservataires ou fardh; les héritiers universels ou aceb et les héritiers par parenté utérine ou cognats (daoui el arham). Les parts de succession légalement fixées sont au nombre de six, la moitié, le quart, le huitième, les deux tiers, le tiers et le sixième. Sans entrer dans la complexité des situations, Nouredine SAADI fait observer que le «simple énoncé des principes généraux éclaire sur la discrimination à l'égard des femmes».
Ainsi, le mari reçoit de son épouse décédée la moitié de la succession à défaut de descendance et le quart s'il y a descendance tandis que l'épouse a droit au quart à défaut de descendance du de cujus et le huitième s'il y a descendance (art. 160). Le mari est l'héritier réservataire de la moitié de son épouse défunte sans descendance (art.144 al.1) et du quart lorsqu'elle laisse une descendance (art.145 al.1).
L'épouse quant à elle, est héritière réservataire d'un quart de son défunt mari sans descendance (art.145 al.2) et du huitième de la succession lorsque le mari laisse des enfants (art.146). La réduction est d'autant plus grande que le nombre d'épouses est élevé. En la présence d'ascendance masculine, les filles ne reçoivent que la moitié de ce qui est dévolue aux mâles.
Les parts ainsi fixées sont indiscutables et donnent naissance, dans certaines situations, à des drames et déchirements dans les familles qui se désagrègent à l'issue de la liquidation de la succession. Nous devons nous interroger sur le nombre et le sort de ces femmes qui ont été dépossédées de leurs biens qu'elles ont acquis du vivant de leur époux en son nom, et de biens qu'elles ont contribué à acquérir.
Combien de femmes sans descendance se sont retrouvées dans la rue parce que le domicile qu'elles habitaient devait être partagé avec les autres héritiers de leur défunt mari ?
Alors que faire ? Repenser le droit successoral ou continuer à faire abstraction des usages et de tous ceux qui, dans la réalité, procèdent au règlement de leur vivant des problèmes de succession qui peuvent surgir à leur décès et ce, par le truchement des donations ou de ventes déguisées au bénéfice de leurs épouses et leurs filles ?
Bien des subterfuges juridiques sont imaginés et déployés pour contourner ce dispositif législatif et prémunir leurs femmes et filles des aléas et désagréments que pourrait leur causer la succession. Reformer dans le contexte actuel certaines dispositions du droit successoral est possible. Le législateur peut emprunter la voie tunisienne qui permet d'élever la proportion de certaines héritières grâce à la technique du radd (retour) connue notamment du droit syrien hanafite et d'évincer au profit des filles et des petites-filles du de cujus, les oncles et certains agnats de leur rang.
Le législateur tunisien a introduit plus d'équité en la matière en optant pour l'élargissement du cadre de la vocation de la femme à la succession et en visant l'affermissement des liens intérieurs de la famille conjugale restreinte. En effet, l'article 143 bis de 1959 stipule qu'en l'absence d'héritier, la veuve «unique héritière de son mari défunt» bénéficie de la totalité du patrimoine successoral. Auparavant la veuve était écartée au profit du trésor. Cette règle est également applicable à la fille unique et aux petites-filles de la fille unique et aux petites-filles de la lignée paternelle à l'infini, qui évincent ainsi de la succession leurs oncles paternels et leurs descendants.
Par ailleurs, à titre indicatif, il faut signaler que le code de la famille irakien du 30 déc. 1959 (sous le régime de Kacem) qui avait adopté certaines règles de l'école hanafite, avait retenu le principe d'égalité entre l'homme et la femme en matière successorale dans tous les cas où le droit musulman a édicté la règle du double.
Selon Moulay R'chid, cet écart entre la loi et le Coran a été justifié par l'idée que la règle coranique à cet égard n'a pas de caractère impératif. Cette règle n'est qu'une simple recommandation qui n'a pour but que de permettre l'inégalité des sexes devant le partage des successions et non de l'imposer. C'est dans cette perspective que se sont également inscrits les articles 158 et 161 du code somalien de la famille du 11 janvier 1975.
Indubitablement, l'ordre successoral, tel qu'institué par le code de la famille, contredit l'approche égalitariste préconisée par le système normatif international. L'islam, ne donnant pas aux femmes une image plus discriminée que les autres religions, ne peut être invoqué à l'appui de cette iniquité. Le Coran ne s'oppose pas à l'évolution. Le risque de figer dans une règle immuable et intangible l'esprit, qui au temps du Prophète avait suscité des réformes novatrices et en avance sur les pratiques primitives de l'époque est grand.
Le régime successoral musulman résulte probablement de la convergence de coutumes généralement en vigueur dans l'Arabie préislamique, et notamment à Médine, avec les usages particuliers qui avaient survécu ou s'étaient introduits dans la ville de La Mecque. A cette époque, la famille proprement dite ne comprend que les mâles.
Selon Louis Milliot, «la femme n'a, pour ainsi dire, pas de personnalité juridique; elle est, plus ou moins, un élément du patrimoine de sa famille. Une fois mariée, elle ne compte pas davantage dans la famille du mari et, au décès de celui-ci, elle passe aux héritiers du mari avec les autres biens de la succession».
On comprend pourquoi le Coran insiste sur le respect des femmes et de leur quote-part dans la succession que l'on voudrait figer définitivement. Il faut savoir, comme le souligne A. Moulay R'chid, que «le souci de l'islam a été de libérer la femme dans une perspective d'égalité avec l'homme. L'islam n'a pas voulu brusquer les mentalités de son temps (…) l'esprit du message islamique a toujours emprunté la voie progressive».
Ce qui faire dire à Said Djabelkhir dans son interview citée plus haut que «ce genre d'hypothèse perturbe la cohérence du système et prouve que les textes coraniques régissant le droit (c.à.d. la charia) ont été édictés uniquement selon les besoins urgents d'une société arabe bédouine et patriarcale dont les conditions socioculturelles ne peuvent être les mêmes que celles de nos sociétés modernes ou de toute autre société qui sort du contexte historique qui a vu naître le texte coranique», et de rajouter plus clairement et, à juste titre, «ce qui donne entièrement le droit au législateur musulman et algérien de revoir, relire et réinterpréter ces textes à la lumière des conditions de nos sociétés modernes».
Assurer à la femme une part égale à celle de l'homme dans un contexte hostile et primitif eut été difficilement acceptable. Ce n'est qu'après avoir proclamé le droit de la femme à la succession que le texte sacré a précisé les parts d'héritage en tenant compte des conditions socio-économiques et des structures mentales et des réactions de l'époque. De fait, la religion musulmane avait bouleversé, dans un sens favorable et émancipateur, la situation de la femme au regard de la société antéislamique; force est de constater qu'aujourd'hui cette situation a très peu évolué.
Pourtant, la perspective finale de l'islam, comme défendue par Amine Kacemen Egypte et Tahar Haddad en Tunisie n'est-elle pas l'égalité successorale entre les sexes ? C'est pourquoi il est nécessaire de «dépasser la lettre pour atteindre l'esprit» et de faire l'effort d'interpréter les prescriptions coraniques en «ayant toujours à l'esprit leur caractère progressif et le contexte social dans lequel a évolué le Prophète» comme l'écrit sans ambages le juriste marocain A. Moulay R'chid.
Dans le but de faire face à une situation jugée par d'aucuns inéquitable et relativement injuste, le législateur algérien, à l'image des tunisien et marocain, a institué la technique de représentation dite «Tenzil» ou l'héritage par substitution qui n'est pas prévue dans le droit musulman classique. Selon la stricte tradition, les petits-enfants (hommes ou femmes) n'ont pas qualité pour hériter de leurs grands-parents si leur père ou leur mère est décédé(e) avant eux.
En vertu de l'article 169 du Code de la famille, le législateur algérien a adopté une solution qui permet aux descendants d'un fils décédé avant ou au même temps que le grand parent de prendre lieu et place du défunt père ou mère dans la vocation à la succession du de cujus. Cet héritage par substitution est assorti de trois conditions. La quote-part réservée aux petits-enfants équivaut à celle qui aurait échu à leur défunt père ou mère s'il(elle) était resté(e) en vie.
Cette quote-part ne doit pas dépasser le tiers de la succession (art.170). Cette restriction rapproche singulièrement cette institution du legs obligatoire. Cette dernière technique est, également, une autre institution que la plupart des législations des pays arabo-musulmans ont instauré aux fins de faire bénéficier les petits-enfants d'une quote-part dans la succession des grands parents décédés après leur fils.
En outre, en vertu de l'article 172 du CF, ces petits-enfants ne peuvent venir à la succession du de cujus en lieu et place de leur «auteur» s'ils ont déjà hérité de leur père et mère une part de succession égale à celle qui échoit à leur auteur de son père ou de sa mère.
Cet exemple montre, si besoin est, que les règles successorales lorsqu'elles touchent des situations jugées inéquitables et/ou injustes peuvent être contournées. Loin d'être immuables et absolues, ces règles sont à même d'être réexaminées et reconsidérées à la faveur de l'évolution de la société, de la famille et du rôle nouveau des femmes dans l'entretien et la prise en charge de la famille.
Autre exemple à méditer ; le législateur algérien s'est départi de toute contrainte s'agissant des pensions de retraite, de leur réversion et de la sécurité sociale dévolues exclusivement à la veuve et à ses enfants conformément aux textes internationaux et au principe de l'égalité.
Enfin, il faut relever que le substrat idéologique religieux imprègne de manière prégnante et constante le corps du droit de la famille.
L'article 222 précise qu'en l'absence d'une disposition dans la présente loi, il est fait référence aux dispositions de la chari'a. Cette disposition ouvre en réalité la voie à toutes les interprétations et confère au juge un éventail normatif et référentiel non cerné dans la recherche de solutions aux contentieux qui lui sont soumis.
Ce genre d'hypothèse atteste, on ne peut mieux, que certaines prescriptions doivent être réinterprétées et précisées par le législateur, non pas en fonction d'une lecture littérale mais selon l'esprit du message et conformément aux valeurs universelles d'équité, d'égalité et de sécurité juridique, pour en résoudre les contraintes d'application pratiques qui s'étalent au grand jour.
Aussi, la corrélation entre le principe constitutionnel de l'égalité des sexes (art.29 et 31) et celui de l'article 2 érigeant l'islam comme religion d'Etat restitue avec acuité la complexité de la situation juridique civile de la femme.
Il faut relever, comme le fait avec pertinence Nouredine Saadi, que «le fondement islamique de l'Etat ne trouve en effet sa pleine application juridique (…) que dans le droit de la famille. Alors que dans d'autres domaines, le droit algérien s'élabore à partir d'éléments étrangers à la chari'a grâce à ses emprunts au positivisme juridique, notamment occidental». Et d'ajouter que «le droit familial ne connaît pas ces phénomènes de sécularisation et récuse toute séparation du civil et du religieux».
Force est de constater qu'à l'exception du droit de la famille qui continue de dépendre exclusivement du droit musulman, l'Algérie, comme la majorité des pays musulmans, pour se hisser au rang d'une société moderne et faire face aux exigences du développement et de l'industrialisation s'est dotée d'institutions et de législations nouvelles dans divers secteurs (pénal, travail, droit public, droit international, commercial, assurance, banques…) qui n'ont presque aucune attache avec la loi musulmane.
Le droit musulman stricto sensu est loin de s'appliquer à tous les domaines. Des dispositifs juridiques empruntent certes au corpus religieux dans certains cas limités. Mais c'est le droit moderne et positif dans sa diversité qui prédomine. Autrement dit, le seul domaine où le politique et l'institutionnel soumettent le religieux, le «domestiquent» dans le but de légitimer l'iniquité et l'exclusion, c'est précisément à travers le statut juridique de la femme.


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