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Attentat suicide contre les gardes-côtes à Dellys
Après la boucherie, deuil, consternation et colère
Publié dans El Watan le 11 - 09 - 2007

Sous un soleil de plomb, des camions chargés de ferrailles se succèdent sur la route menant de la caserne des gardes-côtes vers la ville de Dellys. Vingt-quatre heures après l'horrible boucherie, le temps est au déblaiement.
Dellys (Boumerdès) : De notre envoyée spéciale
L'accès à ce qui reste de cette caserne est interdit à tous les civils. Les nombreux militaires qui surveillent les convois semblent abattus et très nerveux. « Circulez, il n'y a rien à voir ici », nous lancent-ils. Nous insistons pour entrer, mais un officier sort de la guérite. « Si vous êtes de vrais Algériens ne cherchez pas à voir le sang de vos compatriotes », nous déclare-t-il. La scène se passe sous l'œil des habitants du quartier La Marine ou des Fonctionnaires. Ils sont en colère et veulent exprimer leur désarroi. L'impact de l'explosion dénote la puissance de l'engin utilisé par le kamikaze. Portes et fenêtres des maisons et des commerces arrachées, les vitres volées en éclats et la toitures éventrées. Seul un ouragan peut laisser derrière lui un tel spectacle. Les habitants n'arrivent pas à sortir de ce cauchemar vécu en ce début de semaine. La maison du vieux Mohamed est mitoyenne avec la caserne ou ce qu'on peut appeler une caserne, c'est-à-dire quelques roulottes entourées par un mur en parpaing sans aucune protection. Les terroristes n'ont pas eu de difficultés à pénétrer dans l'enceinte. Ils ont juste suivi le camion qui alimente les gardes-côtes, mais en choisissant le moment idéal où tout le monde était regroupé dans la cour pour la levée des couleurs, comme tous les samedis. Tous les témoignages recueillis sur place se rejoignent. Les marins ont ouvert le portail pour laisser entrer le camion frigorifique de ravitaillement. Quelques minutes plus tard, une fourgonnette Master blanche est entrée à grande vitesse pour exploser en plein milieu de la cour où les gardes-côtes étaient rassemblés. « C'était une vraie boucherie. Les corps déchiquetés ont été projetés sur une distance d'une centaine de mètres. J'ai trouvé un lambeau de chair dans mon jardin. J'ai vu des blessés se traîner par terre agonisant. J'ai eu très peur. Ma maison a été fortement secouée le jour du tremblement de terre. La fumée noire a enveloppé tout le quartier. L'odeur de la chair calcinée nous a étouffés. C'était un vrai cauchemar », déclare le sexagénaire encore sous le choc. Il révèle qu'il a fallu beaucoup de temps pour que tout le monde réalise ce qui venait d'arriver. Les nombreux blessés étaient acheminés dans des véhicules civils avant que les ambulances n'arrivent sur les lieux. « Une panique générale a gagné les survivants. Traumatisés, ces derniers avaient du mal à retrouver leur sang-froid. Certains étaient pris de crises de larmes, d'autres impuissants se sont planqués dans un coin en tenant leur tête entre leurs mains. C'était affreux et indescriptible. Nous avons couru pour porter secours aux blessés, mais la confusion était tel qu'il a fallu du temps pour pouvoir évacuer le premier groupe. Le nombre de victimes était très important. Tous les membres de la compagnie ont été touchés. La majorité d'entre eux se trouvaient au cœur même de l'explosion. Il faut avoir un tempérament de fer pour supporter la vue de ces lambeaux de chair qui jonchaient le sol et le sang qui recouvrait tous les débris », raconte un autre témoin qui a pris part aux opérations de secours. Il habite à une dizaine de mètres de la caserne. Il a laissé son fils blessé par un un bout de verre pour secourir les victimes qu'il dit avoir côtoyées depuis des années.
La tragédie a affecté tous les jeunes du quartier
« Pour moi, ce sont mes voisins tout court et non pas des militaires en caserne. Il n'y avait aucune différence entre eux et les copains du quartier », nous dit-il d'une voix nouée. Il regrette de ne pas pouvoir assister à l'enterrement de certains avec lesquels il entretenait une relation d'amitié, mais il notera que leur souvenir ne le quittera jamais. Tous les jeunes de cette cité semblent affectés par cette tragédie. Ils racontent avoir été réveillé en sursaut par l'explosion en pensant qu'il s'agissait d'un séisme. Ils ont ressenti la même sensation que celle provoquée par le tremblement du 21 mai 2003. Ce n'est qu'une fois dans la rue, et après avoir remarqué la grande fumée noire qui s'élevait de la caserne, qu'ils ont réalisé ce qui s'est passé. Si certains s'occupaient de leur famille prise de panique, d'autres se sont dirigés tout droit vers la caserne pour prêter main-forte aux blessés. Les scènes décrites dans le détail par les témoins laissent croire que la tragédie n'est pas uniquement celle des gardes-côtes, mais surtout celle des habitants qui résident aux alentours de la caserne. La consternation se lit sur tous les visages, des jeunes et des moins jeunes. Les enfants sont traumatisés par les scènes d'horreur qu'ils ont vécues. Le regard froid, regroupés non loin de leur maison, ils scrutent les militaires qui travaillent comme des fourmis pour nettoyer la cour, transformée en champ de bataille. Leurs parents, en plus de la terreur, vivent le mépris des autorités locales. Aucun des responsables de la commune de Dellys n'est venu les voir pour s'enquérir de leur sort. « Regardez nos maisons dans quel état elles sont. Le souffle de l'explosion a tout emporté. Je dormais lorsque l'explosion m'a projeté du lit. Mes enfants ont été blessés par la projection de verres et ma femme a échappé de justesse à l'effondrement d'un mur. Nous n'avons même pas où dormir. Pourquoi ne viennent-ils pas s'enquérir de notre sort ? Ne sommes-nous pas des Algériens nous aussi ? », lance en colère un père de famille. Il nous fait visiter sa maison, déjà lourdement affectée, dit-il, par le séisme du 21 mai 2003. « Nous vivions en paix ici. Nous n'avons jamais connu de tels actes. Lorsqu'une bombe a été mise dans une des vedettes des gardes-côtes, il y a quelques années, pour nous c'était très grave parce que dans notre quartier il n'y a pas de terroristes. Mais personne ne s'attendait à ce que cette caserne fasse l'objet d'un attentat suicide. Nous connaissons presque tous les jeunes gardes-côtes qui vivaient à l'intérieur. Ils vivaient parmi nous et vice versa, nous n'avons jamais eu de problème avec eux », raconte d'une voix triste Ahmed, un jeune d'une trentaine d'années. Pour lui, l'après-attentat sera difficile à vivre. L'ambiance au sein de la cité de la Marine ne sera plus comme avant. « Les fils de chien ont transformé un havre de paix en cauchemar », lance Rachid. En quelques minutes, tous les riverains se sont rassemblés dans la rue. Ils veulent à tout prix dénoncer l'absence des autorités locales. « Cela fait presque trente heures que nous sommes debout. Nous n'avons pas où aller. Nos maisons risquent de s'effondrer sur nos têtes et aucun des responsables de la commune n'a eu le réflexe de venir constater les dégâts », note Mourad, un sexagénaire, père d'une famille nombreuse. Il regrette néanmoins que les jeunes marins qu'il avait l'habitude de rencontrer et de côtoyer partent chez eux dans des cercueils à la veille du Ramadhan. « Eux aussi ce sont nos enfants. Ceux qui ont commis cet acte ignoble n'ont rien de musulmans », relève notre interlocuteur. Lui aussi nous guide vers sa petite maison de campagne, lourdement endommagée, avant de nous mener vers l'appartement de son fils, également touché par l'explosion. Les mêmes dégâts sont constatés dans toutes les maisons. Les familles rongées par la colère menacent de recourir à l'occupation de la rue si les autorités continuent à adopter cette réaction d'inertie. « Que veulent-ils, que nous sortions dans la rue pour les faire venir ici ? Si nous ne l'avons pas fait jusqu'à maintenant, c'est par respect pour ces jeunes marins morts samedi », crie une mère de 5 enfants, dont la maison n'a ni vitres, ni portes, ni toit. « J'ai passé la première nuit à la belle étoile et demain lorsque les premières pluies commenceront à tomber que ferais-je avec mes enfants ? Je n'ai pas les moyens de faire les travaux. Je n'ai pas attendu les autorités en 2003, après le séisme, pour refaire ce qui a été détruit, mais aujourd'hui cela est impossible », note-t-elle d'une voix coléreuse. Les mêmes propos sont tenus par ses voisins qui jurent de passer aux actions de rue si leur situation persiste. Un climat de deuil mêlé à un sentiment de colère pèse lourdement sur la cité de la Marine, à Dellys. Cette tragique journée du samedi 8 septembre sera désormais gravée dans la mémoire collective.


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