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Un monde virtuel
Réflexion. La déroute du livre
Publié dans El Watan le 08 - 11 - 2007

Alger accueille chaque année le désormais traditionnel Salon international du livre pendant lequel le livre focalise les regards dans un espace encore exsangue.
Des éditeurs exposent leurs livres, permettant ainsi aux férus de lecture, aux étudiants et aux chercheurs de se ressourcer dans un monde quelque peu virtuel. La lecture est devenue en effet une virtualité, une éventualité aléatoire, une quête à la limite de l'impossible. Ces dernières années, après une longue absence ponctuée par de petites expositions itinérantes proposant souvent des invendus ou des vieilleries, cette rencontre a refait surface dans un univers marqué par le vide et le désintérêt pour la chose culturelle. Ce retour pourrait constituer, malgré la pauvreté littéraire et éditoriale ambiante, un premier pas vers une revalorisation de ce produit culturel. Ainsi, peut-on espérer à nouveau discuter du livre, de sa dimension sociologique, de ses circuits de distribution et de ses institutions ? C'est ce qui compte le plus. Dans les années 1980, quelques sessions de la Foire du livre avaient connu un engouement inimaginable, grâce notamment à la subvention du prix des livres par l'Etat. Puis, en 1986, juste après le PAP (Programme antipénuries), l'importation avait été arrêtée. Déjà, avant cette année fatidique, il n'était pas possible de se procurer des ouvrages récents, excepté durant la période faste de la « Librairie du parti » à Alger où l'ENAP en proposait à la vente ou à la commande, assez chers mais disponibles. Le livre est un produit complexe dépendant de plusieurs médiations et paramètres, allant de l'auteur au lecteur en passant par l'éditeur, l'imprimeur, le diffuseur, le libraire et le critique. Or, chez nous, cette chaîne ne semble ni établie ni fiable, même si dans l'enthousiasme des premières années de l'indépendance, il était fortement question d'encourager la production éditoriale. C'est d'ailleurs pour cette raison que les Editions nationales avaient été créées en 1964 avant de devenir laSociété nationale d'édition et de diffusion (SNED). Certes, la production restait insuffisante et discutable sur la qualité, mais elle avait le mérite d'exister en tant que point de départ. Les débats avaient pignon sur librairies et centres culturels. L'Union des écrivains algériens, qui a vu le jour le 28 octobre 1963 grâce à Mouloud Mammeri, Malek Haddad, Jean Sénac et Himoud Brahimi activait régulièrement en organisant des rencontres. L'écriture était considérée comme un espace relativement privilégié. Mohamed Boudia animait sa revue Novembre qui permit à des écrivains, artistes et intellectuels de s'exprimer. Mais le coup d'Etat de 1965 allait arrêter ce type d'expérience et modifier le paysage culturel. Ce qui n'empêcha pas la constitution de quelques cercles comme celui animé par Jean Sénac, entouré de jeunes poètes en colère : Sebti, Tibouchi, Laghouati, Skif, Hamdi… Les librairies jouaient leurs rôles d'espaces culturels. Le président Boumediène voulait exploiter tous les lieux du savoir. Il lança avec M. S. Benyahia l'idée des Mille bibliothèques, opération intéressante abandonnée par ses successeurs. Pendant ce temps, les grands auteurs continuaient à publier à l'étranger, tels Mohammed Dib, Kateb Yacine, Assia Djebar, Mourad Bourboune ou Rachid Boudjedra. Certains d'entre eux ont été obligés de quitter le pays pour disposer de meilleures conditions d'édition mais surtout pour fuir la censure. Boudjedra, après l'édition de son premier recueil de poésie, Pour ne plus rêver avait atterri à Paris pour y faire éditer La Répudiation. Bourboune, proche à l'époque de Ben Bella et président de la commission culturelle du FLN, s'était exilé en France où il édita en 1968 son roman, Le Muezzin. Les choses étaient peu claires. Mostefa Lacheraf, qui lui, était en désaccord avec Ben Bella, s'installa aussi en France où il fit paraître son ouvrage-phare, Algérie, Nation et Société avant de rentrer au pays après le 1965 où il fut « adopté » par Boumediène qui aimait recevoir certains écrivains. Mammeri et Djebar avaient publié à la SNED leurs pièces Le Foehn et Rouge l'aube, à l'instar de nombreux autres écrivains qui firent leurs premiers pas à Alger : Djaout, Mimouni, Mouleshoul, Rézagui, Ouettar, Benhadouga, Khellas, Djemaï, etc. Mais la plupart se tournèrent vers des maisons d'édition françaises ou du Machreq, plus compétitives et plus libres. A Alger, au niveau des droits d'auteurs, les écrivains étaient pourtant gâtés : on leur accordait 25% sur le tirage et non sur les ventes comme cela se pratique dans le monde entier ! D'où ces situations tragi-comiques qui ont vu des livres médiocres « pistonnés » tirés à des dizaines de milliers d'exemplaires. Ainsi, des ouvrages invendables emplissaient les stocks de la SNED. A la même période, Alger aidait un éditeur parisien, Pierre Bernard, ami de l'Algérie, à écouler son catalogue, intéressant et original, dans notre pays. Les éditions Sindbad en effet faisaient un travail de qualité, notamment sur le patrimoine éditorial arabe et musulman. Mais parallèlement, les ouvrages des Algériens édités en France étaient interdits d'entrée en Algérie. Editer à l'étranger était considéré comme une « trahison » alors que les entreprises publiques d'édition monologuaient avec la médiocrité et la censure. Il fallut l'arrivée de Rédha Malek au ùinistère de la Culture et la nomination de Rachid Boudjedra à la sous-direction du livre pour voir les romans de certains écrivains apparaître dans les librairies.
Prendre des risques
Par la suite, notamment après 1986 et la chute du prix du pétrole ainsi que du déclin certain de la chose culturelle, un terme fut mis à la subvention des prix par l'Etat. L'expérience des Mille bibliothèques fut oubliée. On freina l'importation des ouvrages, à tel point que les bibliothèques universitaires et nationales vivaient quasiment de la charité. Le livre n'était donc plus une nécessité. Aujourd'hui, l'environnement ne semble pas plus propice à la création littéraire et scientifique. Après la dissolution irresponsable de l'ENAL (Entreprise nationale du livre, héritière de la SNED), certes médiocre, mais ne justifiant pas son « assassinat », le territoire éditorial s'est encore appauvri. Il y eut, au début des années 1980, des expériences intéressantes dans le secteur privé, avec les belles et plutôt éphémères aventures des éditeurs Bounab et Bouchène. Par la suite, avec l'ouverture du secteur à l'initiative privée, l'édition a connu une sorte de déferlante qui a poussé beaucoup de monde à se convertir en éditeurs. Aujourd'hui, on compte parmi eux, un nouveau type d'éditeurs qui excelle dans la réédition et les créneaux dits porteurs comme l'art culinaire, en développant une certaine manière de « vendre » la politique, la religion et l'Histoire, avec peu sinon aucun risque, même s'ils n'arrêtent pas souvent de quémander l'aide publique. Cette manière de faire risque de condamner des disciplines et des écrivains au silence, surtout ceux qui ne sont pas édités à l'étranger. Le roman, la poésie, le théâtre, les essais sérieux ne trouvent pas facilement preneur, du fait des limites de lectorats. Ces dernières années, la situation politique et sécuritaire de l'Algérie a incité plusieurs maisons d'édition européennes, notamment françaises et moyen-orientales à publier des romans, des poésies et des essais. Le territoire éditorial actuel, encore travaillé par de vieux réflexes et le gain immédiat, pourrait dramatiquement orienter la production vers des voies extrêmement étroites, celles de la rentabilité rapide et de la facilité. Et, en l'absence d'une politique du livre comme il en existe ailleurs, il est vrai qu'il n'est pas toujours évident de prendre des risques, les maisons d'éditions étant aussi des entreprises. Mais aujourd'hui, la conviction éditoriale, indispensable au métier d'éditeur, existe chez certains d'où les tentatives intéressantes menées par quelques individualités au rang desquelles on peut citer la revue Algérie, littérature, Action qui fait un travail extraordinaire, malgré ses limites et ses moyens, Dar el Gharb, Barzakh et, à un degré moindre, Casbah éditions et d'autres qui s'efforcent plus ou moins de produire des textes intéressants et de ne pas négliger la littérature. Certes l'édition nationale s'est diversifiée et enrichie par rapport à la situation de désert antérieure. Mais il ne faut pas oublier que l'écriture littéraire algérienne vit encore grâce à l'étranger. Ainsi, de nombreux écrivains n'auraient jamais été édités en Algérie. Malgré le niveau de production et les conditions politiques de l'époque, la SNED avait édité de nombreux romanciers et poètes, aujourd'hui mondialement reconnus. Que nous apporte la grande majorité des éditeurs privés d'aujourd'hui ? Trop peu de textes de qualité et un autre type de censure, économique, qui ne dit pas son mot. La production est l'otage d'une édition encore balbutiante, d'autant plus que des espaces d'édition publics, disposant de moyens d'impression, comme l'ENAG, après la disparition de Mohamed Benmansour, et l'Office des publications universitaires, semblent aphones. La production éditoriale est partout prisonnière des contingences commerciales et économiques, mais il est, comme dans de nombreux pays, possible de ne pas réduire le champ à quelques « créneaux » dits porteurs en tentant parfois quelques aventures. L'intérêt soudain en France et ailleurs ces dernières années pour tout ce qui touche l'Algérie, montre comment se font les choix éditoriaux et comment l'édition arrive à orienter la production à tel point que de nombreux universitaires, journalistes et romanciers se sont convertis, de manière extraordinaire, en « spécialistes » de l'Algérie.
UNE SORTE D'OMERTA
Mais, il a toujours existé des éditeurs innovants et courageux. On ne peut que donner l'exemple des maisons françaises Maspero et Minuit qui ont édité de nombreux textes d'Algériens liés à la torture et à la lutte de libération. Sans les éditions de Minuit, on n'aurait vraisemblablement jamais parlé du « nouveau roman » qui a valu le prix Nobel à Claude Simon qui avait été refusé auparavant par Gallimard. L'édition peut influer sur l'orientation idéologique, les genres, les « créneaux » et l'écriture littéraire. On ne peut que se souvenir de la relation de nombreux écrivains algériens avec leurs éditeurs parisiens. Kateb Yacine a vu transformer l'ordre de Nedjma par le Seuil, avec la complicité de Jean Cayrol, Jean Daniel et Chodkiewicz, avant d'être publié. D'ailleurs, certains passages, disparus de ce roman, se retrouvent dans Le Polygone étoilé (1966). Mouloud Feraoun s'était vu supprimer deux chapitres considérés par l'éditeur comme superflus avant qu'ils ne réapparaissent après sous leurs formes initiales. Le champ littéraire est lui aussi prisonnier des contraintes économiques et idéologiques. Des écrivains ne se laissent pas faire. C'est le cas de Mohamed Dib qui, ne pouvant supporter certaines attitudes quelque peu condescendantes du Seuil, finit par claquer la porte après un compagnonnage de plus de 35 ans pour ouvrir celle de la petite maison Sindbad. La réalité du livre reste encore marquée d'une sorte d'omerta des pouvoirs publics qui ne se décident pas encore à s'impliquer résolument dans une entreprise d'intérêt général permettant la revalorisation de la lecture dans un pays où des librairies se sont transformées en papeteries ou pizzerias. Contrairement à une idée préconçue, les Algériens lisent énormément. Ce Salon, malgré la cherté des ouvrages et ses problèmes d'organisation, permettra encore à beaucoup d'Algériens de retrouver une part de rêve et, peut-être, poussera, les médias à s'intéresser davantage au livre. Un livre est un espace de communication, sa promotion demeure le point nodal de sa diffusion. Il faut espérer que nos universitaires, dont beaucoup ont divorcé avec la lecture depuis très longtemps, et les Algériens trouveront à l'avenir des facilités pour redécouvrir le livre.


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