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Dr Fethi Benachenhou (Médecin de la santé publique et ancien élève de l'école de criminologie de Paris)
« La politique des années est à l'origine de la criminalité »
Publié dans El Watan le 09 - 06 - 2008

Le docteur Fethi Benachenhou affirme dans l'entretien qu'il nous accorde que telles que conçues, nos villes constituent une des causes principales du dysfonctionnement dans le comportement des jeunes. Pour lui, la ghettoïsation pousse les jeunes à la violence, au suicide, aux mutilations, à la drogue, à l'alcool et au phénomène des harraga.
La criminalité a connu ces dernières années une hausse inquiétante. Y a-t-il une relation entre cette évolution et le terrorisme ?
Pour moi, le terrorisme n'est pas à l'origine de la criminalité, mais il l'exacerbe. La criminalité était déjà un problème pour les autorités post-indépendance. Après 1962, il y a eu toute une politique pour la prise en charge des orphelins de la guerre, que nous appelions à l'époque les enfants en danger moral, parce qu'il y avait la crainte de les voir basculer. El Hadi Khediri, alors patron de la police, avait même créé un bureau de criminologie à l'Ecole supérieure de police de Châteauneuf, à Alger, composé de juristes, de médecins et de psychiatres. Sa mission était d'élaborer des rapports et des analyses sur les maux sociaux sur la base des informations recueillies sur le terrain. Ces rapports ont même prédit les événements de 1988 et restent d'une brûlante actualité. A cette époque, il y avait ce qu'on appelait un droit spécifique des mineurs à tel point que le législateur a institué un juge des mineurs assisté par toutes les institutions. L'Etat a chargé le ministère de la Jeunesse pour prendre en charge tous les problèmes liés à cette catégorie de la population. En parallèle, et pour l'aider dans cette mission, un secrétariat d'Etat chargé des affaires sociales a été mis en place. Mais durant les années 1980, on a enlevé les jeunes à la Jeunesse pour les confier aux Affaires sociales. Mieux, le ministère de la Jeunesse, qui avait créé une école de cadres à Tixeraïne, s'est vu doubler par le ministère des Affaires sociales qui a lui aussi ouvert sa propre école de cadres de la jeunesse à Chéraga (puis à Birkhadem). Nous sommes là devant deux programmes, deux formations, pour un même secteur, qui est la jeunesse. Le ministère des Affaires sociales avait créé par la suite les services d'observation en milieu ouvert (SOEMO) qui étaient très innovateurs puisqu'ils faisaient vraiment dans le travail de proximité au sein des quartiers. Ils activaient en collaboration avec les brigades des mineurs de la Sûreté nationale. Il y avait une parfaite symbiose entre les intervenants. Vous vous imaginez qu'à l'époque nous avions deux types de centres spécialisés de protection (CSP) pour l'enfance. L'un pour la catégorie des nouveau-nés jusqu'à l'âge de 13 ans, et l'autre pour les enfants âgés de 13 à 18 ans. A partir de 18 ans, ils sont placés dans des centres, où ils bénéficient d'une chambre et de toutes les commodités pour leur permettre soit de travailler et de trouver un endroit pour dormir, soit de terminer leur cursus universitaire. Le chef d'orchestre de toute cette prise en charge est le juge des mineurs, souvent une personne âgée qui connaît parfaitement tous les jeunes et leur situation, et travaille en coordination avec les autres intervenants. Ce qui veut dire que le jeune n'avait en face de lui que ce magistrat. Tous ces centres ont été détournés de leur vocation à partir des années 1980. C'est la politique destructrice de cette décennie qui a engendré la criminalité.
Selon vous, le dysfonctionnement dans la prise en charge des enfants en difficulté peut-il être à l'origine de la délinquance juvénile ?
C'est l'une des causes principales. Vous savez qu'un enfant battu deviendra lui-même auteur de violence quand il sera adulte s'il n'est pas soigné. Nous avons des unités de dépistage et de suivi (UDS) au niveau de l'ensemble des écoles du pays qui peuvent jouer un rôle extraordinaire dans la prévention de la violence juvénile, en repérant les enfants battus, les éventuels fugueurs, les violents, etc. C'est à l'école que nous pouvons intervenir quotidiennement en touchant le maximum de la population infantile et juvénile. Aujourd'hui, rien ne se fait et les conséquences nous les subissons à travers la criminalité.
Ne pensez-vous pas que la famille a aussi un rôle à jouer ?
Il y a une donnée universelle qu'il faut prendre en compte : les conditions de temps et de lieu. La famille algérienne est laminée par les problèmes socioéconomiques et sécuritaires. Elle ne peut jouer son rôle pleinement. Pour l'instant, il ne faut pas trop compter sur elle. A défaut d'intervenir au sein de la famille, nous pouvons accéder aux écoles pour faire le travail de réparation avec l'aide des associations des parents d'élèves, des enseignants et des médecins scolaires.
Mais beaucoup estiment que l'école est un espace pour apprendre le savoir et non pas pour éduquer qui est du ressort de la famille ?
Comment l'école peut-elle être détachée de la vie quotidienne des enfants. Si un élève ne mange pas à sa faim, est battu par ses parents, n'est pas en sécurité ou souffre d'une quelconque anomalie, il ne peut avoir une scolarité normale. Les conditions font que l'école devient plus importante que la famille et doit, de ce fait, faire un effort supplémentaire. C'est à cet âge-là que l'enfant acquiert les bases de la conduite sociale, et lorsque cette formation est perturbée, c'est son comportement futur qui en pâtira.
Comment expliquez-vous ce passage à un niveau supérieur de violence chez les jeunes ?
Les enfants ont besoin de sécurité et lorsqu'ils sont obligés d'intégrer eux-mêmes ce besoin, prendre un couteau et égorger un autre enfant, ou le dépecer, devient un acte tout à fait normal pour eux. Je regrette de dire que nous sommes face à un réveil hypocrite de la société, parce que tout le monde sait que tout dysfonctionnement dans le développement d'un enfant aura des conséquences très lourdes sur son comportement. Nous semblons oublier que des gosses ont assisté aux massacres de leurs familles et proches durant la décennie écoulée et aujourd'hui ils vivent une situation de terreur avec les kidnappings. L'imaginaire devient pour eux une réalité. Nous ne sommes plus dans ces contes de grands-mères qui parlent de ce « ghoul » (l'ogre) des forêts qui vient manger les enfants méchants et indisciplinés, mais dans des histoires vraies de kidnappeurs qui les attendent à chaque coin de rue et à la sortie de l'école. Le terrorisme est maintenant dépassé, et il faudra que les autorités et les parents sécurisent les enfants en les mettant à l'abri de ces actes.
D'après vous, pourquoi la criminalité a envahi nos villes ?
Ce sont la taille et la densité de ces villes qui font que la criminalité augmente chaque année. Construites en l'absence de normes urbaines, nos villes sont de véritables ghettos ou centres d'isolement des populations. Imaginez que nous nous entassions à 20 personnes dans un bureau pendant une durée donnée, inévitablement, notre comportement va connaître un déséquilibre. Il faut revoir totalement la conception de la construction urbaine parce que telle qu'elle est réalisée depuis des années, elle constitue un des facteurs de déséquilibre comportemental du citoyen qui développe une agression contre sa propre personne, à travers le suicide, la drogue, l'alcool, l'automutilation et le phénomène de « harraga ». Les clignotants sont au rouge. Notre situation n'a rien à avoir avec celle de la France ou d'ailleurs, parce que notre niveau de vie diffère du leur. La criminologie ne doit pas être l'apanage uniquement des services de sécurité, mais de la communauté scientifique, juridique et médicale. C'est bien de créer un institut national de criminologie et de criminalistique, mais il ne faudra pas que ses activités dans la recherche analytique et expérimentale soient réservées uniquement aux gendarmes. L'institut doit être un espace de recherche et d'application pour tous les universitaires qui s'intéressent à cette branche très méconnue et combien importante pour la société.


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