Mouni Boualem, l'actrice montante native de Constantine, accomplit son jeûne au rythme des tournages. Une obligation qui l'éloigne des siens mais qui la fait plonger néanmoins dans un autre milieu, celui de la famille artistique où elle dit s'épanouir. Côté production cinématographique, elle plaide pour l'implication du privé en vue de répondre au mieux aux attentes de la société algérienne. Décrivez-nous votre quotidien durant le mois sacré ? Je passe mon Ramadhan comme tout Algérien. Cette année, mon programme est un peu chamboulé. Je suis prise par mes tournées théâtrales et le plus souvent je romps le jeûne à l'extérieur de la maison. Etant en déplacement permanent, je suis obligée de m'adapter à cette donne, profession oblige. Quand je suis à la maison, la matinée est consacrée aux tâches ménagères. Ensuite, place à la confection des plats du f'tour et à l'accomplissement des devoirs religieux également. La lecture constitue aussi une occupation pour moi. Cette année, mes habitudes ramadanesques ont quelque peu changé, car je suis en tournage la nuit. Quand je ne travaille pas, je pratique un peu de sport et j'essaye de mettre de l'ordre à la maison. Le Ramadhan ne me fatigue nullement, même s'il fait très chaud. Faites-nous connaître les traditions constantinoises La cuisine constantinoise est spéciale. Elle est riche et variée. On prépare quotidiennement le sultan de la table, à savoir « el djari ». Le premier jour du mois sacré, on ouvre avec un plat sucré qui est « chbah sefra ». Le « bourek », quant à lui, est indispensable. Dans la soirée, on consomme des sucreries également accompagnées de café ou de thé. Moi personnellement, j'ai un faible pour les gratins. Le Ramadhan est un mois de pardon et de spiritualité et non pas de consommation. Une occasion également pour renforcer les liens familiaux comme le dicte notre religion. Actuellement vous êtes en tournage... Il s'agit d'un film de guerre, ayant pour titre « Les chroniques de mon village », réalisé par Karim Traydia, qui s'inscrit dans le cadre des films dédiés au 52e anniversaire de l'Indépendance. J'assume le rôle principal et j'interprète le personnage de la mère d'un héros de la Révolution. L'histoire tourne autour de faits qui remontent à la période post-Indépendance. Elle décrit la vie quotidienne d'un village et les rapports sociaux de l'époque. Le tournage se fait à Annaba et Constantine. Etant donné que la première partie du tournage a lieu à Constantine, exactement à El Khroub, cela m'arrange pour passer un peu plus de temps avec mes parents. Je suis originaire de Constantine et j'habite Alger. En tant qu'artistes, on passe souvent le mois sacré loin de nos familles respectives. Dans ce métier noble, on retient beaucoup d'avantages dont celui de retrouver à chaque fois de nouvelles familles de travail. Nos nouvelles connaissances nous permettent à chaque fois de nouer des liens forts qui nous font oublier l'éloignement familial. On ne se sent jamais seul. On construit à chaque fois de nouveaux rapports amicaux et c'est tant mieux pour nous les artistes. Du coup, on se retrouve avec plusieurs familles. En tant qu'artiste, quel regard portez-vous sur notre production cinématographique ? Je n'ai pas beaucoup d'apparitions durant ce mois sacré hormis le feuilleton « Foursan El Hoggar » qui passe sur plusieurs chaînes nationales. Malheureusement, il me semble que les Algériens ne nous suivent pas. Ils sont plutôt intéressés par tout ce qui est occidental ou oriental. Les attentes sont multiples, mais je pense qu'on n'offre toujours pas une production qui soit à leur hauteur. On ignore ou réside le problème. On pensait que l'ouverture du champ audiovisuel allait améliorer les choses, mais hélas le résultat est tout autre. En tant que jeune comédienne, je souhaite que les prochaines années soient plus prometteuses pour notre métier. La production ne se limite pas uniquement au mois sacré. Le citoyen algérien, toujours en quête de films qui traduisent réellement sa réalité, doit trouver sa satisfaction à chaque zapping. On tourne toujours dans un cercle vide en étant confinés dans des sujets consommés et dépassés. On devrait contempler d'autres horizons dans l'objectif de répondre au mieux aux perspectives de la société algérienne. Trouvez-moi un Etat comme le nôtre qui ne cesse de subventionner des films et des productions cinématographiques. Cela ne se fait nullement ailleurs. Il faudrait ouvrir le champ à des producteurs privés en vue d'améliorer le contenu et la qualité de notre production. On a de bons comédiens et de bons réalisateurs. Il faut juste oser. Le comédien est une pâte entre les mains du réalisateur.