El-Hadj Ahmed est âgé de près de 70 ans, il a commencé à fumer à 21 ans lorsqu?il a été emprisonné pendant la Guerre de libération. «A l?époque, je fumais environ dix cigarettes par jour, pendant deux années de détention, avec tout ce que cela comportait, les interrogatoires qui n?en finissaient pas, les séances de tortures et l?isolement. C?est la prison qui a fait de moi un fumeur invétéré. Il se trouve que je fumais de plus en plus après l?indépendance. J?en suis arrivé à deux paquets par jour, à raison d?une cartouche, de dix paquets de cigarettes blondes, tous les cinq à dix jours», a expliqué ce septuagénaire. «J?ai tenté à plusieurs reprises d?arrêter, mais je n?ai réussi qu?en 1993, à l?âge de 58 ans, avant que je me rende aux Lieux-Saints. Je peux dire que j?ai arrêté à temps, puisque cette même année, à l?occasion du pèlerinage, j?ai assisté à un prêche de l?éminent savant en théologie, l?imam Aboubakr El-Djazaïri, à Médine, lorsqu?il a décrété que la cigarette était un péché au même titre que la drogue et l?alcool.» «Avant cet épisode, j?ai séjourné à plusieurs reprises à l?hôpital pour une phlébite, une séquelle des tortures que j?ai subies par l?armée française.» Cependant, aux séquelles de la torture, El-Hadj refuse de reconnaître que la cigarette était associée. D?ailleurs, sept ans après qu?il a arrêté définitivement de fumer, il sera hospitalisé à la suite d?une attaque cardiaque qui a failli l?emporter. «En 2000, il a fait un infarctus du myocarde. N?eût été son évacuation par voiture vers l?hôpital de Aïn Naâdja, il aurait pu y rester», nous confie sa fille. Et de poursuivre : «Mon père fumait sans modération à la maison et à son travail. Il ne fumait que des blondes, des Craven, des Marlboro, des Winston, des Dunhill même des Cogaréos.» «Je me souviens qu?il prenait sa première cigarette après le petit-déjeuner avec un café très sucré. En tout cas, après le déjeuner, il lui fallait une cigarette accompagnée d?un bon café.» Interrogé sur la période de sevrage, El-Hadj a répondu : «Le jeûne était le meilleur moyen de la surmonter. J?avoue qu?à ce jour l?envie de fumer n?a pas disparu totalement.» El-Hadj Ahmed a relevé qu?au sein de sa famille, ni son épouse ni ses quatre enfants, filles ou garçons, ne supportent l?odeur de la cigarette. Il nous dira enfin : «La cigarette est bannie chez nous.»