Constat ■ En dépit de la disponibilité des sites Internet spécialisés dans la rédaction des différentes correspondances administratives, les écrivains publics à Blida sont toujours sollicités par de nombreux clients, dont des personnes lettrées. Le métier, apparu depuis les premières années de l'Indépendance, n'a donc nullement été entamé par les évolutions technologiques et la croissance démographique des intellectuels au sein de la société. «Je ne travaille pas uniquement avec les citoyens illettrés. Bien au contraire, même des personnes ayant des diplômes universitaires et qui exercent dans divers domaines viennent solliciter mes services», affirme à l'APS Izzeroud Fayçal, écrivain public à Bab Ezzaouia. Devant son modeste local d'à peine 20 mètres carrés et équipé d'un ordinateur, d'une petite table et deux chaises, il dit recevoir en moyenne une vingtaine de clients par jour. «Il y a quelques jours, j'ai reçu un couple de médecins, qui voulait introduire un recours concernant le refus de leur dossier au logement AADL. L'épouse m'a dit clairement qu'elle maîtrisait parfaitement son domaine, mais non la rédaction de lettres administratives», révèle cet écrivain public, en activité depuis 1986. Des universitaires en quête d'emploi viennent également le solliciter pour la rédaction de curriculum vitae (CV), ajoute-t-il. «Certains de ces universitaires me proposent plusieurs modèles téléchargés d'Internet, mais finissent toujours par accepter ma formule simple et complète en même temps. Ces jeunes ne font pas confiance aux sites spécialisés», poursuit M. Izzeroud. De son côté, Ahmed Halimi, qui exerce son métier d'écrivain public à la place Souk Laârab, au centre de Blida, estime que les citoyens sont en quête d'un «connaisseur des concepts juridiques» pour faire aboutir leurs doléances. «Une demande bien ficelée, et contenant tous les détails représente 50% de son aboutissement, surtout lorsqu'il s'agit de plaintes, de recours ou de requêtes adressées aux instances judiciaires», explique-t-il. Pour lui, l'élévation du niveau intellectuel chez les citoyens a entraîné un effet boule de neige sur son activité. «Les gens lettrés comprenant la valeur de gens spécialisés, sont de potentiels clients, ce qui arrange parfaitement nos affaires», se réjouit-il. Dans son local, situé au sous-sol d'un vieil immeuble, plusieurs ouvrages de sciences juridiques et administratives sont éparpillés çà et là, dont certains sont altérés par la forte humidité des lieux. «Je ne peux rien faire face à cette situation, car mes revenus suffisent à peine à pallier les besoins élémentaires de ma famille constituée de sept membres», avoue-t-il. Pour sa part, Mustapha Ben Ali Khodja a commencé son métier d'écrivain public en 1979. A 76 ans,il continue de rendre un précieux service aux citoyens n'ayant pas connaissance des secrets des lettres administratives. «En 35 ans de service, j'en ai vu de toutes les couleurs», lance-t-il, comme pour donner un aperçu sur l'ampleur du travail effectué jusque-là, estimé, dit-il, à «des milliers de documents». Selon lui, ce métier résistera encore aux temps modernes, surtout avec «le niveau de plus en plus bas en langue française de la jeune génération».