Résumé de la 103e partie ■ Chantal continue d'intriguer tous ceux qui lui rendent visite, tant elle est imprévisible. Vous lisez bien, docteur. Je sens que vous finirez par me faire aimer la lecture. Il regarda Chantal avec étonnement : est-elle capable d'avoir du cœur ? se demanda-t-il comme beaucoup d'autres l'avaient fait avant lui. II reprit néanmoins son livre ; sa voix calme se répercutait à travers les minces cloisons, jusqu'à la véranda. Dehors, la nuit était complète. Il s'arrêta subitement un bruit imperceptible, frôlant le mur de la maison, venait de se faire entendre. Le médecin fit signe à Chantal de ne pas bouger et s'avança tout doucement vers la porte qu'il ouvrit d'un geste brusque. Il se trouva face à face avec le lépreux. Fred l'empoigna par les épaules et, après lui avoir fait faire un rapide demi-tour, II l'obligea à descendre l'escalier. Chantal était restée clouée à son fauteuil ; elle y demeura tout le temps que dura la discussion au bas de l'escalier. La voix de Fred montait, terrible : le médecin s'exprimait en fidjien. De temps en temps, la jeune femme percevait un grognement inarticulé du lépreux. Après une bonne minute de silence, l'Américain revint dans le living-room en déclarant — Je pense que cette fois il aura compris ! Rassurez-vous, il est parti.. J'ai attendu sur le chemin pour bien m'assurer qu'il s'éloignait. Ça m'étonnerait qu'il revînt ! — Que lui avez-vous dit ? — Que si je le trouvais une seule fois à rôder dans un rayon de cent mètres autour de votre maison, je le ferais passer immédiatement de-vant le conseil de discipline présidé par le Dr Watson et qu'il serait emprisonné. — Vous avez une prison à Makogaï ? — Il faut bien : les hommes restent toujours les hommes... Après une inspection minutieuse, le docteur s'inclina devant Chantal : — Je vous souhaite une bonne nuit... Fermez bien votre porte derrière moi. J'attends, en grillant une cigarette sous la véranda, que vous vous soyez couchée. Chantal exécuta ponctuelement ces prescriptions.. Quand elle fut dans son lit, elle entendit très distinctement les pas de l'Américain qui s'éloignaient sur le chemin. Elle était de nouveau seule, mais sa solitude morale était moins grande. En quarante-huit heures elle s'était découvert trois nouveaux amis, des amis comme elle n'en avait encore jamais rencontrés en Europe Marie-Ange, le Révérend David Hall et Fred. Trois amis, trois raisons pour Chantal d'être songeuse cela l'empêcha de dormir pendant longtemps. Elle écoutait les moindres bruits de la nuit avec une crainte irraisonnée de percevoir à nouveau le sinistre frôlement d'un corps de lépreux contre la paroi de bambous... (A suivre...)