Evocation - L'enfant de Bab El-Oued, le lycéen du lycée Okba, le houmiste prêt à épauler ses copains de quartier, le fan d'El-Anka, le pagsiste, le féru de lecture, de théâtre, de peinture et d'architecture, Krimo Djillali le journaliste de l'hebdomadaire Algérie Actualités a été tout cela et bien plus encore. Lors d'une rencontre à librairie Chaïb-Dzaïr organisée en hommage à Krimo Djillali, Sid-Ali Sekhri a évoqué les années ados avec tous les petits riens et les grands moments qui cimentent si bien l'amitié et resserrent la fraternité entre natifs du même ilot d'habitations. On a franchi le seuil des Djillali, fait la connaissance de la mère, du père et son ouverture d'esprit, du climat bon enfant qui régnait et des brassées d'affection inondant le foyer des Djillali. Une personne respectueuse de ses idéaux, Krimo Djilali. Jusqu'à rejoindre dans les années de terreur les groupes de patriotes et prendre le chemin des justes. «Juste» voilà le mot que porte à merveille l'enfant d'un des quartiers les plus héroïques d'Alger. Avec sa voix spéciale, un regard intelligent et une conscience professionnelle avérée, il dirigeait les éléments nouveaux qui ont rejoint la rubrique «guide» en leur disant «n'écrivez pas pour les autres, il faut d'abord écrire pour vous». Des anecdotes, des pans de vie, le Grand Sud dont il était tombé amoureux, Timimoun, Illizi, Ahl Ellil, El-Ferda et bien sur El-Anka qu'il a réussi à faire aimer aux plus réticents de la musique chaâbie comme Mohamed Balhi. Ce dernier auxquels se sont joints Ghani le photographe et copain de toujours, M. Bechichi ancien ministre de l'Information, Abdelmadjid Merdaci qui l'appelait «Papi», des anonymes, tous ont, en cette soirée du mois sacrée, évoqué un homme parti trop tôt. Il a traversé son ciel de vie comme «une comète» a confié Sid-Ali Sekhri. Et comme on raconte une histoire «fi sahrate Ramdane», chacun a apporté avec lui un souvenir, un bout de parcours, une pensée heureuse, une parole chaleureuse... Krimo Djilali le patriote, le partisan pour qui l'Algérie était sa deuxième mère «n'a pas bénéficié d'une prise en charge médicale à l'étranger... Alors que d'autres...», a fait remarquer Balhi la voix émue et de proposer : «On devrait penser à créer le prix Abdelkrim Djilali de la photographie». Il ne faut pas oublier de parler de la qacida qu'il a écrite avec le chanteur chaâbi Réda Doumaz. Krimo Djilali a su trouver et forger sa ligne propre et unique qu'il a en homme de principes, enracinée dans ses idéaux auxquels il est resté fidèle jusqu'à la fin. Abdelkrim Djillali est décédé au mois de mai à l'âge de 61 ans à Alger, des suites d'une longue maladie. Ancien journaliste à Algérie Actualités où il écrivait notamment dans la rubrique culturelle, le défunt a dirigé cet hebdomadaire avant d'intégrer le quotidien Le Siècle et enfin rejoindre la télévision algérienne en qualité de conseiller, dernier poste depuis lequel il a fait valoir ses droits à la retraite. Abdelkrim Djillali, «Krimo» pour toutes les générations de journalistes qui l'ont côtoyé, était un homme bon et un journaliste généreux. Il était, aussi, un patriote. Un homme intègre. Krimo n'économisait aucun effort à inculquer son «art» aux jeunes qui intégraient le métier. La jeune rédaction du Siècle, journal qui a disparu en novembre 2000, avec tous les jeunes journalistes qu'il a recrutés et encadrés, se souviendra de lui comme de ce rédacteur en chef qui leur a appris l'amour de ce métier. Il leur a appris comment rédiger une information, comment «planter leur caméra et tourner» sans jamais occulter un plan et comment se préserver des bulles qui les isoleraient de la société. Ils garderont de lui son shangai bleu et son «mayahkiwelekch lazem tchouf» (on ne te raconte pas, il faut que tu vérifies par tes yeux) comme première règle de base de leur métier. Krimo Djilali, n'était pas qu'un reporter. Il était aussi auteur. Il avait à son actif trois livres dont «Le temps des patriotes» et «Les chercheurs du désert». Le défunt avait été aussi le promoteur, en 2005 d'une grande exposition de photos rassemblant les travaux des photographes de la première heure et ceux de la nouvelle génération. Ayant contribué à l'organisation de l'année de l'Algérie en France en 2003, il était par ailleurs auteur de documentaires-témoignages sur des faits d'armes de la guerre de Libération nationale.