La plus puissante des dynasties qui aient gouverné l?Iran islamisé avant la conquête des Turcs saldjuqides, au XIe siècle (932-1056), tient son nom de Buwayh (ou Buyeh), le «père» des trois frères fondateurs : Ali, Al-Hassen et Ahmed. Ces chefs de guerre d?origine modeste, sont des montagnards du Daylam (au sud-ouest de la mer Caspienne), qui s?engagent alors massivement dans les armées musulmanes. Ils font leurs premières armes dans les rangs du Daylamite Mardawidj Ziyar, lui-même fondateur de la lignée des Ziyarides. Au moment de l?assassinat de Mardawidj (935), Ali tient Isfahan et s?empare bientôt du Fars. Hassen tient l?Iran central (Djibal) et Ahmed le Kirman et le Khuzistan. Profitant des rivalités de factions autour du califat abbaside moribond, Ahmed entre à Bagdad en 945 et les Abbassides doivent accepter pendant cent dix ans la tutelle des princes buyides. Ahmed fait déposer et aveugler le calife régnant, qui vient de lui décerner le titre de Mu?izz al-Dawla et fait introniser un de ses rivaux. Bien qu?ils aient maintenu pour des raisons politiques le califat abbasside, les Buyides gouvernent, en fait, comme de véritables «maires du palais» et confient l?administration à leurs propres vizirs et dignitaires dont certains sont de remarquables lettrés et patronnent les arts et les lettres. Les Bouyides sont les premiers souverains iraniens à professer le chiisme imamite , alors même que se poursuit sous leur patronage l?élaboration doctrinale de cette tendance qui doit devenir la religion officielle de l?Iran au début du XVIe siècle. L?introduction des grandes fêtes chiites à Bagdad déchire la communauté musulmane, car les sunnites y sont majoritaires. Toutefois, les Buyides savent se montrer tolérants tant envers les sunnites qu?envers les juifs, les chrétiens ou les mazdéens ; en revanche, ils sont le plus souvent hostiles à l?égard de leurs rivaux chiites, hamdanides ou fatimides, ces derniers faisant leur apparition en Egypte en 969. La personnalité la plus remarquable de la dynastie est Adud al-Dawla, fils de Rukh al-Dawla (Hassen). Après avoir dépossédé de l?Iraq son neveu Izz al-Dawla Bakhtiyar, il unifie sous son autorité (de 978 à 983) toutes les possessions buyides de l?Iraq, de l?Iran méridional et même de l?Oman, laissant à son frère Mu?ayyid le reste de l?Iran buyide. Avec la disparition de ce prince éclairé, la cohésion de la famille Bouyide s?effrite. Les Ghaznawides en profitent pour annexer Ray et le Djibal en 1029. Affaiblis, les Buyides deviennent une proie facile pour les tribus conduites par des chefs saldjuqides. Ceux-ci s?emparent de Bagdad en 1055, et seul l?émir Buyide du Fars parvient à se maintenir encore durant sept ans. Au moment de leur expansion, les Buyides se lient avec de petites dynasties du nord-ouest iranien d?obédience sunnite et d?origine kurde ou prétendue telle. Le déclin des Buyides profite aussi à la lignée des Daylamites kakuyides (1008-1051) qui dominent pour un temps l?Iran central et occidental et se maintiennent comme vassaux des Saldjuqides jusqu?au début du XIIe siècle. Dans l?administration, les Buyides furent des réformateurs et des novateurs. Mais le rôle croissant de l?armée dans les affaires publiques n?est pas sans danger, surtout en ce qui concerne les impôts et la tenue des terres. Les Buyides sont de grands bâtisseurs, tant en Iran qu?en Irak. Ils encouragent l?industrie (surtout textile), le commerce, l?artisanat, et patronnent les arts et les lettres, alors essentiellement d?expression arabe sur le plateau iranien.