Pour être ce qu?elle est aujourd?hui, la langue française a été obligée de se délester de ses guenilles, de se mettre à poil et de s?habiller clint. Plantée par les corsaires près des jeunes pouces de Séville à l?ombre des mers du Sud, elle donnera naissance, quelques siècles plus tard, à un idiome appelé créole. Greffée au peul et au heoussa par des négriers au golfe de Guinée, cette langue fleurira sous le nom de pataouète. «Y a bon banania», ça vous dit quelque chose ? L?une et l?autre, quand elles sont parlées, sentent bon ou la fraîcheur de la Savane africaine ou la caresse des vagues des Caraïbes. A force de l?essorer dans le même bac à indigence et de l?étendre pour sécher comme une serpillière, la langue française a fini par devenir un bazar à fripe chez nous. N?importe quel plumitif peut y trouver sa taille. Et cela donne dans certains journaux des phrases du type : la symbiotique de notre réflexibilité fait de nous des soiffards. Avec un pareil morceau d?anthologie écrit avec un réel talent de prétention, l?étalon de la bêtise va être certainement changé. Le franco-calentita, messieurs, est né. Et il est bien né chez nous.