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Histoires vraies
Les ravioli (1re partie)
Publié dans Info Soir le 13 - 10 - 2006

Ils sont tous là. Les cinq fils de Don Corato. Ils ont accouru à l'annonce de l'agonie du chef de famille. Alignés le long du mur lambrissé, dans la chambre sombre aux lourds rideaux cramoisis, ils contemplent leur père et son intérieur de riche commerçant génois. Un décor pompeux, baroque : tableaux indéfinissables dans de lourds cadres dorés, assiettes multicolores aux murs, Christ de bronze doré, énorme, au-dessus du lit de noyer.
Sur la table de chevet, une lampe à pétrole au pied de cuivre, au ventre de cristal bleu, laisse filer un mince cordon de fumée grise et une lumière de mort.
Couché dans les gros draps de lin, le corps de Don Corato, puissant, trapu, semble avoir rétréci soudain. Les deux mains fortes à la peau jadis sombre ont pris une teinte grisâtre. Elles reposent à plat sur le dessus du lit de satin épais. Sur le léger oreiller de dentelle, incongru dans ce décor sinistre, le visage est de marbre blanc, orné de sourcils noirs, d'une moustache noire. Il ressort tel un masque de théâtre lugubre.
Don Corato n'est pas un vieillard. A cinquante-huit ans il vivait encore comme un jeune homme, tapant sur l'arrière-train des soubrettes, honorant son épouse douze fois l'an et les prostituées de la taverne du port douze fois plus.
La maladie l'emporte. L'une de ces maladies qui, dans les années vingt, demeure mystérieuse encore. On dit qu'une bête noire ronge le corps de l'intérieur, avale le sang et les forces, détruit la chair. C'est ainsi que la masse solide et charnue du corps de Don Corato s'est rétrécie au point de lui coller la peau sur les os, de creuser ses tempes, d'amenuiser ses épaules, d'enfoncer sa poitrine. Même sa voix, autoritaire et forte, a rapetissé jusqu'au souffle.
La main de Don Corato a bougé. Il a levé un doigt pour faire signe à l'un de ses fils. Lequel ?
Il y a là Pietro, le cadet, au buste de chasseur mais au regard veule. Il y a Luigi, le troisième, coquet, toujours à l'aise, à l'esprit négligent. Il y a aussi Fortuné, le quatrième, à la mâchoire carrée de prognathe de la préhistoire, le sourire fourbe. Et enfin Jéronime, le dernier, tête ronde d'éternel bébé, menton niais, lâche.
La main ne désigne personne en particulier mais chacun sait qu'elle s'adresse à l'aîné, Joseph, maigre et sec, regard noir de pirate, le fort.
Le veule, le négligent, le fourbe et le lâche regardent donc, sans bouger, le plus fort approcher du père et se pencher vers lui.
Don Corato va parler. Les dernières paroles d'un agonisant en présence de ses fils sont sacrées. Ils devront les respecter jusqu'à leur propre mort.
«Joseph... regarde tes frères... ils ne sont rien, de la fumée... il faut prendre le pouvoir. Tu entends, Joseph ? Prendre le pouvoir. Etre le chef. Tu seras dur, il le faut. Ma fortune ne doit pas disparaître. Prends le pouvoir, fils.»
Joseph incline la tête jusqu'à la main du père, qui le bénit.
Dans le silence oppressant de la chambre mortuaire, la respiration de Don Corato se ralentit. Il ouvre la bouche en grand, comme pour donner encore un ordre. L'air ne passe plus. Il est mort.
A l'enterrement de Don Corato, quatre escargots s'en vont. Ils suivent le chef, Joseph, qui mène le deuil. Le commendatore Joseph... Petit, l'œil noir, maigre et sec, il appuie une main ferme sur l'épaule de sa mère, dont on devine déjà qu'elle ne survivra guère longtemps à son époux. Le printemps frileux inonde le port de Gênes d'une pluie en rideau ; elle accompagne le cercueil noir et or, bringuebalant sur le chariot des pompes funèbres tiré par deux chevaux emplumés de noir. (à suivre...)


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