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Connaissez-vous Benicio Del Toro ?
L'acteur portoricain campe Che Guevara dans un rôle fusionnel
Publié dans La Tribune le 07 - 01 - 2009

à 41 ans, l'acteur portoricain, prix d'interprétation masculine à Cannes 2008 pour le Che de Steven Soderbergh, a encore davantage pris goût à l'esthétique de la mort. Cette même camarde qui le fait mourir presque en boucle, de film en film, de manière quasiment immuable depuis 1989 et le plateau d'un médiocre James Bond, Permis de tuer. Pour ce premier rôle, il interprétait un factotum de la Faucheuse, vilain, sadique, vicieux, avec un goût prononcé pour le viol, et terminait en steak haché, concrètement broyé. Jamais il ne s'était senti autant méprisé et il ne s'était après tout jamais autant ennuyé sur un plateau de cinéma. Mais, paradoxalement, celui qui fut l'un des derniers étudiants de Stella Adler, le mentor de Marlon Brando au prestigieux Actor's Studio, ne se doutait pas que ce trépas sanguinolent dans un navet cinématographique allait donner un coup de fouet à sa carrière, longtemps au point mort. Dans son cas, il y a donc eu, selon ses propres dires, cet instant «magique» où disparition a fini par rimer avec naissance ou résurrection !
La résurrection a cependant mis du temps pour se réaliser. Pour trouver une seconde chance, il lui a fallu alors attendre 1994. C'est à ce moment-là que lui est parvenu le scénario de Usual Suspects, ce classique du film noir des années 90 de Bryan Singer qui le révélera finalement au grand public. Le personnage proposé à l'acteur mourait vite, dès la page 42 du scénario. «Un corps en pourriture», précisait le scénariste. Benicio Del Toro allait se retrouver le visage tuméfié, le corps mutilé, en voie de décomposition. La perspective de terminer en charpie sur une plage déserte remporte son assentiment d'acteur et suscite l'enthousiasme de l'homme qui y voit tout de suite «ce qu'il pourrait en faire» en tant qu'artiste. Pourtant, malgré ce rôle vraiment ingrat, c'est la longue silhouette du Portoricain qui se détache le mieux dans le film, au détriment des autres prestigieux «suspects», Kevin Spacey, Alec Baldwin et Gabriel Byrne. Benicio Del Toro ou l'art de sublimer la mort et d'utiliser ainsi le macabre comme tremplin pour mieux rebondir.
Immersion dans le réel
A l'image de Robert De Niro qui s'imprègne de ses rôles autant que ceux-ci l'habitent, Benicio Del Toro effectue souvent des plongées dans le réel. Juste pour mieux se sentir à l'aise dans les habits de ses personnages, quitte à ce que ce soit dans un linceul. Avant de camper son rôle scabreux dans Usual Suspects, il avait mis à profit un séjour new-yorkais dans une école d'art dramatique pour vivre en immersion dans un des quartiers chauds de la ville tentaculaire. Sex shops, proxénètes, prostituées, truands à la petite semaine, junkies et autres éclopés de la vie peuplaient le quartier. L'attention du comédien s'était alors portée sur un toxicomane dont la façon de marcher, tout dégingandé, ressemblait un peu à la sienne. Comme lui, mal à l'aise avec sa grande taille, ne sachant que faire de ses bras de gibbon, il venait de reconnaître en cet esquif humain à la dérive son clone maudit. Comme le raconte le comédien lui-même, cet éclopé avait aussi un timbre de voix rare, haut perché, reconnaissable entre mille, qui ne permettait à aucun son de se détacher : il «oscillait entre l'aphasie et le mutisme, grommelait plus qu'il ne parlait». C'est ce timbre de voix qu'il empruntera pour transcender le suspect minable d'Usual Suspects. Et c'est ainsi qu'il a trouvé la texture pour son rôle et mangé de la laine sur le dos des autres acteurs célèbres du film.
C'est cela Benicio Del Toro dont la motivation au cinéma est de choisir ses personnages en fonction de la variable mortifère souvent consubstantielle à ces rôles. Peu importe alors son temps de présence dans le film, le montant du cachet, la taille graphique de son nom sur l'affiche, les futurs chiffres de l'audimat. Seul aurait un sens le lien intime entre lui et son personnage cinématographique : de son point de vue, il ne pourrait insuffler la vie à un homme sans réfléchir à sa mort, penser à son cadavre. Chez lui, avec l'identification et la communion, il y a également le binôme réflexion-action. Où l'on voit que la réflexion précède toujours l'action, la seconde nourrissant ensuite la première. Il en fut ainsi du petit rôle que son ami Sean Penn lui accorde dans The Pledge (2001). L'acteur y incarne un Indien simplet, accusé à tort de meurtre, parvenant à se suicider lors d'un interrogatoire musclé. «Je me suis demandé ce que je pouvais avoir de commun avec un type issu d'une minorité comme moi, maudit à la naissance, dont la seule issue consiste à se faire exploser la tête. Je me suis mis à penser à l'Américain d'origine portoricaine que je suis, arrivé en Pennsylvanie à l'âge de 3 ans, et traité comme une merde par son entourage. J'ai compris.» Difficile donc pour l'acteur de ne pas penser à la mort dont le sentiment l'habite depuis le décès brutal de sa mère. Benicio Del Toro n'avait alors que 9 ans, et résidait encore dans son pays natal. Il n'a jamais tout à fait porté le deuil et mentionne rarement le nom de sa mère morte d'une hépatite. Et, quand il parvient à le
faire, c'est toujours avec difficulté et douleur.
Cette même douleur qui imprègne son visage peint d'une permanente mélancolie et dont les traits trahissent une certaine fêlure. En fait, il a presque tout dit de sa mère dans une des scènes inaugurales de Traffic (2000) de Steven Soderbergh, qui l'a laissé modeler le dialogue à sa guise. Dans la séquence qui ouvre le film, l'agent de la brigade des stupéfiants mexicain, interprété par Del Toro dit à son partenaire : «Cette nuit, j'ai fait un cauchemar affreux. J'étais dans mon lit. Je me suis levé.
Au pied du lit, il y avait ma mère… paix à son âme, assise sur une chaise, un sac plastique sur la tête. Elle étouffait, la pauvre, et moi je ne pouvais rien pour elle. Quelle merde !» Acteur d'exception, Benicio Del Toro met des bouts de vie, la sienne, dans ses personnages, y compris dans le rituel de la décomposition et du trépas. C'est un comédien qui vit si intensément ses rôles qu'il n'aime pas être dirigé, quels que soient le prestige et le poids du réalisateur. Acteur de la métamorphose morbide, il sait toujours quoi faire, quoi dire et adopter le ton et l'attitude les plus conformes à son personnage quand bien même celui-ci serait un candidat à la mort. De l'acteur, Steven Soderbergh dit : «La plupart des comédiens préfèrent qu'on leur dise quoi faire et je parle d'acteurs formidables ; ils
souhaitent tous être dirigés. Ce n'est pas le cas de Benicio. Ce n'est pas un trou du c…, encore moins un frimeur. Juste le genre de gars à travailler très consciencieusement.»
Dix centimètres vous manquent…
S'il est un acteur perfectionniste, Benicio Del Toro n'a jamais songé pour autant au cinéma, sa vocation première étant de devenir joueur de basket. Après la mort de sa mère, son père, avocat, avait construit un terrain de basket en face du domicile familial à Porto Rico. Avec son mètre quatre-vingt dix, il croyait avoir le gabarit idéal pour ce sport. Son adresse, associée à son talent réel de passeur et de dunker, croyait-il, allait faire le reste, c'est-à-dire lui laisser espérer une place en NBA américaine. Ses espoirs les plus fous se sont effondrés dès son arrivée aux Etats-Unis. Il se voyait en géant à Porto Rico, il n'était qu'un pygmée au pays des basketteurs si haut perchés. Il lui manquait en fait dix bons centimètres pour tutoyer les paniers et les cimes de la gloire sportive. Cet échec
inattendu lui fait encore mal : «Ces dix centimètres en moins font chier. Ils font toujours chier. Toute ma vie.» Au cinéma, Benicio Del Toro est en quête perpétuelle de ces dix centimètres manquants, qui font la différence. Ce fantasme du panier inaccessible a donc pris une tournure particulière dans sa vie professionnelle d'acteur. Après avoir lu un jour que Pete Maravich, une de ses idoles de jeunesse et l'une des vedettes du basket américain des années 70, exécutait 200 lancers francs tous les soirs avant de se coucher, il en a déduit que son métier de comédien devait se nourrir d'une telle ascèse sportive. Depuis, pratiquement chaque soir, il vise une
bonne centaine, jusqu'à l'épuisement. Presque, jusqu'à la «mort», comme la plupart de ses personnages.
N. K.


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