L'Allemagne se rapproche de l'Algérie, un interlocuteur pivot au Maghreb et au Sahel

Sans-papiers, économie et sécurité au menu de la visite d'Angela Merkel à Alger

La chancelière allemande, Angela Merkel, sera à Alger aujourd'hui pour une deuxième visite officielle de deux jours à l'invitation du président Abdelaziz Bouteflika, selon l'agence APS qui cite un communiqué de la présidence de la République. Cette visite sera l'occasion de faire une évaluation des relations économiques entre l'Algérie et l'Allemagne et de renforcer les axes de partenariat pour une relation bilatérale économiquement dense. Les relations entre l'Algérie et l'Union européenne (UE) et la situation sécuritaire et politique au Sahel, au Maghreb et au Moyen-Orient seront au menu des discussions.
Ulrike Demmer, porte-parole adjoint du gouvernement allemand a, pour sa part, précisé que les relations économiques et les questions migratoires seront abordées par la responsable allemande à Alger. Il y a lieu de noter que l'Algérie est un partenaire très important pour l'Allemagne et un pays-clé dans la région du Maghreb. C'est d'ailleurs, ce qu'a indiqué le ministre allemand des Affaires étrangères, M. Westerwelle, lors de sa visite à Alger en 2012. Le chef de la diplomatie allemande avait affiché la disponibilité de l'Allemagne à construire un partenariat «étroit et intense» avec l'Algérie.
En fait, ce n'est que ces dernières années, que les relations entre les deux pays commencent à prendre des reliefs plus importants en termes de contenu et de mécanismes. En effet, depuis la visite, en décembre 2010, du chef de l'Etat à Berlin, de nombreux accords ont été passés dans le domaine industriel et une commission mixte de suivi et de promotion des relations économiques a été mise en place. Pour l'Allemagne, l'Algérie recèle un énorme potentiel, sa jeunesse et le Grand Sud. Ne voulant pas se faire distancer, apparemment, par les autres pays de l'Union européenne, l'Allemagne a affiché son intérêt pour le marché algérien et sa volonté de s'y engager.
Cependant, il faut rappeler qu'avant d'arriver à un stade de dynamisation effective des relations bilatérales, il a fallu une grande maturation de près d'une dizaine d'années. Faut-il rappeler que c'est en avril 2001 que le président Bouteflika s'est rendu en Allemagne. C'était le premier chef d'Etat algérien à effectuer une visite officielle dans ce pays. Ce n'est que six années plus tard, en 2007, que le Président allemand Köhler atterrit à son tour à Alger. Il sera suivi l'année d'après par la chancelière Angela Merkel. Six mois après cette visite, l'accord algéro-allemand, relatif à l'annulation de la double imposition en matière d'impôts, est entrée en vigueur. Plusieurs de ses ministres se succéderont durant deux années pour faire avancer le dossier de coopération. En décembre 2010, le président Bouteflika se rend pour la deuxième fois en Allemagne. Visite au cours de laquelle fut annoncée la création de la commission économique mixte algéro-allemande qui sera constituée en mars 2011. C'est dire que le rapprochement entre les deux pays a été scrupuleusement réfléchi.
Par ce rapprochement avec l'Algérie, les Allemands viennent, une nouvelle fois, de prouver la pertinence de leurs choix et leur statut de «locomotive» européenne. Car, en plus du fait que l'Algérie offre aujourd'hui des opportunités importantes sur le plan économique, elle avance doucement, mais sûrement vers son positionnement comme un pays pivot dans la région du Maghreb et du Sahel. Un statut reconnu par ses voisins et par plusieurs forces mondiales dont les Etats-Unis. D'ailleurs, les relations algéro-allemandes ne concernent pas uniquement le volet économique, mais également les volets militaire, sécuritaire et culturel. Des potentialités de coopération existent aussi dans les technologies médicales et les énergies renouvelables. L'exportation de l'électricité vers l'Europe est même envisagée grâce à Desertec. Un mémorandum d'entente a été signé à Bruxelles avec Sonelgaz pour un projet de 400 milliards d'euros. Même l'industrie automobile figure dans l'agenda. Le cas des technologies vertes est aussi cité comme exemple de coopération.
Pour revenir aux sujets clés qui seront abordés lors de la deuxième visite de Mme Merkel en Algérie, il y a lieu de préciser qu'outre la tenue de la 6e session de la commission mixte de coopération algéro-allemande et du forum d'affaires entre les entreprises des deux pays, le dossier des ressortissants algériens en situation irrégulière en Allemagne sera au cœur de la visite. Berlin souhaite une coopération plus grande d'Alger pour un rapatriement de ses ressortissants en situation irrégulière en Allemagne. En mars 2016, Thomas de Maizière, ministre de l'Intérieur allemand, était venu à Alger pour discuter principalement des procédures de réadmission. Depuis 1997, Alger et Berlin sont liés par un accord qui précise, entre autres, que «les autorités algériennes réadmettront sans formalités les ressortissants algériens séjournant de manière illégale sur le territoire de la République fédérale d'Allemagne, même lorsque ceux-ci ne sont pas en possession d'un passeport ou d'une carte d'identité valides, à condition qu'il soit prouvé ou démontré de manière crédible que lesdites personnes possèdent la nationalité algérienne». Cependant les autorités allemandes éprouvent du mal à prouver la nationalité algérienne des jeunes sans-papiers.
Angela Merkel abordera également la situation sécuritaire et politique en Libye. Berlin partage en grande partie le point de vue d'Alger sur le règlement par les moyens politiques et le dialogue de la crise dans ce pays qui dure depuis 2011. L'Envoyé spécial pour la Libye, l'Allemand Marin Kobler, a toujours salué les efforts diplomatiques d'Alger pour éviter le chaos en Libye. L'Allemagne souhaite, par ailleurs, développer davantage sa coopération avec l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le terrorisme à travers la densification des échanges d'informations surtout après l'attentat au camion bélier le 19 décembre 2016 contre un marché de Noël à Berlin.
H. Y.