Depuis le Ramadhan dernier, la filière lait vit une crise jamais égalée. Les parties prenantes se rejettent la balle et la responsabilité. Les consommateurs qui ne peuvent se passer de cette denrée vitale sont devant le fait accompli. Pis, le triste cliché des années 1980, période durant laquelle des files d'attentes interminables s'allongeaient devant les points de vente pour différents produits, revient tel un cauchemar. L'une des parties prenantes dans cette affaire, en l'occurrence les laiteries privées sommées de couvrir 50% des besoins du marché en lait, les 50% restants étant assurés par les 19 filiales du groupe public Giplait, se plaignent du système actuel de quotas appliqué par l'Onil, lequel, selon eux, «pénalise les producteurs privés et favorise le public». Ces transformateurs privés évoquent des «restrictions» dans les approvisionnements durant les six derniers mois, d'où la baisse de la production.Par ailleurs, le président du Comité interprofessionnel de la filière lait, M. Benchekour, a tenu à rassurer, la semaine dernière, que cette filière ne connaît pas de crise, mais plutôt des dysfonctionnements. La même source, qui s'exprimait lors de son passage à la radio nationale, a expliqué que «la quantité de poudre de lait importée cette année est légèrement supérieure par rapport à l'année dernière, entre 10 000 à 20 000 tonnes par rapport à 2009. Toutes les unités de transformation ont reçu leurs quotas de poudre de lait pour répondre aux besoins des consommateurs. Néanmoins, c'est possible qu'il y ait eu des retards dans l'arrivage des quotas». La question qui reste posée est pourquoi la rareté, voire l'absence du lait en sachet, qui est perceptible et généralisée ? M. Benchekour a eu cette réponse : «Le lait chez nous est à très bon marché, 25 DA le sachet d'un litre. Ce qui fait qu'il suscite des convoitises et destiné à ce qu'il ne faut pas. C'est pour ça qu'il y a dysfonctionnement dans quelques régions. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de poudre de lait, c'est dans la fabrication et la distribution qu'il y a problème.»Du côté des pouvoirs publics, on affirme qu'il ne s'agit pas de restriction, mais plutôt d'une politique visant à freiner l'importation de la poudre pour promouvoir le lait cru. Ainsi cette filière tend à encourager l'intégration du lait cru dans l'industrie laitière. Des incitations ont été consenties dans ce sens par l'Etat pour optimiser l'effort d'intégration et encourager les transformateurs à renforcer la production de lait dont les besoins nationaux annuels avoisinent les 5 milliards de litres, avec tendance à la hausse durant les prochaines années. Toutefois, les déclarations des uns et des autres ont-elles pour autant apaisé la crainte des consommateurs qui ne veulent absolument pas revivre la crise ayant ébranlé la filière en 2007 ? A voir les citoyens courir dans tous les sens pour se procurer un sachet de lait, on ne peut qu'en douter. En effet, en dépit des explications fournies par les responsables de l'Onil et du Cil, des perturbations dans les circuits de distribution et des ruptures de stocks sont toujours perceptibles. En d'autres termes, la crise du lait est bien réelle. Elle est vécue quotidiennement par le citoyen. S. B.