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La ronéo de l'appel de Novembre 1954 n'a plus rien à tirer… de l'indépendance
Ali Zamoum dort du sommeil du juste à Ighil Imoula à Tizi Ouzou
Publié dans La Tribune le 29 - 10 - 2008

De notre correspondant à Tizi Ouzou
Lakhdar Siad

Entrée du village du combattant Ali Zamoum, Ighil Imoula : «Oui aux accords d'Evian», est le slogan d'une époque mémorable toujours lisible sur un mur fatigué d'une maison basse. On devrait ajouter, question d'actualisation, «Ci-gît Ighil Imoula», tant une débauche de misère humaine et sociale vous soulève le cœur.
Décédé à Paris le 28 août 2004 à l'âge de 71 ans, Ali Zamoum est toujours vivant dans le cœur de beaucoup de femmes et d'hommes de sa génération et celle d'après aussi bien ici chez lui dans son village d'Ighil Imoula (haute Kabylie) qu'ailleurs dans le pays pour avoir été un nom intimement lié à la guerre d'indépendance déclenchée un certain 1er novembre 1954. Le nom d'Ali Zamoum est synonyme d'un fait historique unique dans l'histoire de cette guerre contre la colonisation française : le texte de la proclamation du 1er Novembre 1954 a été ronéotypé avec son irremplaçable concours et celui des villageois d'Ighil Imoula. «[…] J'avais reçu de Krim Belkacem un texte que je devais reproduire en milliers d'exemplaires. A Tizi Ouzou, je reçus un journaliste, Laïchaoui Mohamed, envoyé par l'organisation, chargé d'imprimer ce document à la ronéo. Je l'ai emmené de nuit jusqu'à notre village en taxi […]. Là, je lui montrai le texte qu'il fallait taper sur stencil. Il se rendit compte alors du contenu des deux pages qu'il devait reproduire. C'était la proclamation au peuple algérien, aux militants de la cause nationale.» Une véritable déclaration de guerre qui portait une date : 1er novembre 1954. «Le texte historique fut tapé au domicile de Benramdani Omar alors que le tirage à la ronéo s'était fait dans la maison d'Idir Rabah dans le village Ighil Imoula», témoigne-t-il dans le même contexte.
Ighil Imoula, 46 ans après l'indépendance, est un village aujourd'hui oublié et marginalisé, sous-développé et où il ne fait pas bon vivre, à l'exemple des centaines d'autres contrées de la région de Kabylie et d'Algérie. Dans l'Algérie d'aujourd'hui, c'est comme cela qu'on récompense les descendants des sacrifiés et les sacrifices de la liberté et de la dignité. Sur l'unique et étroite placette poussiéreuse du village encore habitée, des signes physiques des actes de gloire d'antan, quelques fripiers démotivés entourés de femmes de tous âges et d'une poignée d'hommes d'un certain âge partagent ce quotidien avec une meute de chiens bâtards, visiblement malades et sales et sûrement dangereux. «Attention au chien blanc», nous prévient juste à temps l'adolescent qui nous accompagne au domicile de la veuve de Dda Ali Zamoum, à une vingtaine de mètres de là.
Ali Zamoum est né en 1933 à Boghni (Kabylie), de père instituteur, il a rejoint le PPA-MTLD dès son jeune âge et s'est longtemps forgé aux principes et idéaux de la révolution et surtout à son éthique. «A 14 ans, j'ai quitté l'école, et assez vite je me suis détaché des jeunes de ma génération», écrivait-il dans Tamurt Imazighen, une sorte d'écrits autobiographiques. Le 1er novembre 1954, il déclenche en compagnie des membres de son groupe les hostilités dans l'actuel chef-lieu de la commune de Tizi N'tlata avant d'être arrêté un an plus tard dans un accrochage, en 1955. Il sera condamné à mort et fera plusieurs (une douzaine environ) prisons en Algérie mais aussi dans la métropole. Durant ses séjours carcéraux, il rencontrera le premier Algérien guillotiné, Ahmed Zahana, dit Zabana et Mohamed Boudiaf. Libéré en 1962, il décide, contrairement à ce qui était en vogue à cette époque euphorique de liberté arrachée, de sortir des rangs de l'ALN, Armée de libération nationale, mais acceptera, en revanche, d'être nommé préfet de Tizi Ouzou, poste qu'il désertera plus tôt que prévu.
La pièce qui faisait office de maison où l'appel du 1er Novembre a été «imprimé» est toujours debout au milieu du village en déperdition de l'espoir de vivre. L'appel à la guerre d'indépendance y est reproduit sur du cuivre en trois langues : tamazight, français et arabe. «Pour tirer en milliers d'exemplaires l'appel du 1er Novembre 1954, les voisins faisaient toutes sortes de bruits, heureux et malheureux, pour couvrir celui qui se dégageait de la machine», s'efforce de se rappeler Hamid par mémoire recueillie chez de plus vieux que lui. «Cet épisode de l'histoire de la guerre d'indépendance est une fierté pour le village d'Ighil Imoula, pour toute la Kabylie et pour l'Algérie entière», dira-t-il avant d'insister sur la place que doit naturellement avoir la langue amazighe «avant toute autre langue» dans le pays. Le lieu est géré par l'association du comité du village, cadre qu'aimait beaucoup Ali Zamoum.
Son amour des personnes défavorisées et fragiles l'a conduit à des actions à caractère caritative et humanitaire tout en étant un haut fonctionnaire de l'Etat au ministère du Travail et, en même temps, compagnon privé et public de Kateb Yacine. Il fondera en 1996 à Boghni l'association Tagmat (fraternité) pour aider les malades démunis et les enfants, et contribuera à l'ouverture d'un centre de santé à Halouane, pas loin de chez lui.
Tout près de cette maison, la présence d'une caserne, qui servira de PC à un autre résistant au colonialisme, ne trompera pas le visiteur sur le passé révolutionnaire d'Ighil Imoula. C'est en effet dans ce coin qui domine le massif du Djurdjura que Boubaghla, de son vrai nom Mohamed Lamdjed Ben Abdelmalek, résistera à l'armée coloniale de 1851 à 1854. Cette caserne sera récupérée et transformée par la France en école en 1887. C'est d'ici que partiront 19 éléments pour rejoindre l'organisation paramilitaire du FLN (Front de libération nationale) en 1954. En 2000, le lieu est dénommé «Centre historique et culturel» et est transformé en «Centre historique et culturel des martyrs de tous les temps» le 5 juin 2007. «C'est fou comme les gens sont oublieux et ingrats», commente Ali Ferhat, fils de chahid, retraité de l'OPGI, en regardant les portraits des héros de la guerre d'Algérie exposés dans le hall du centre. La veuve de Ali Zamoum n'est pas à la maison. «Elle est peut-être partie dans les champs cueillir les olives», risque un personnage du village.
A propos des travaux de la terre, extrait du Pays des hommes libres, tamurt imazighen, mémoire d'un combattant : Algérie 1940-1962, paru en 1999 aux éditions la Pensée sauvage : «De simple militant, j'ai bien vite été élu chef de cellule, puis chef de groupe, puis chef de kasma de notre région. Je ne faisais pratiquement que militer dans le parti. Au grand désespoir de ma grand-mère qui ne comprenait pas que je ne sois pas comme les autres militants du village. Un jour, elle s'en plaignit auprès d'un ami, Yantren Chabane :
- Pourquoi vous ne l'aidez pas un peu ? Ali est tout le temps pris par le parti alors que vous vous occupez bien des travaux de vos champs !
- Mais Yemma Hadjila, il travaille pour son pays ! lui répondit Yantren.
- Je ne comprends pas comment on peut travailler pour son pays et abandonner ses propres terres ! lui répondit-elle alors.
En Kabylie, la terre et le pays portent le même nom : tamurt. Logiquement, je devais commencer par m'occuper de nos propres parcelles plutôt que du pays entier !»


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