Par Karima Mokrani Les discussions sur la surcharge des classes et le manque d'infrastructures dans des endroits où elles doivent être présentes en force, suite à des mouvements de délocalisation et parfois d'exode rural, n'arrêtent pas de susciter une certaine polémique. Elèves, parents d'élèves, enseignants et syndicats autonomes du secteur chargent le ministre Baba Ahmed et l'accusent d'avoir failli à son engagement de réceptionner un maximum d'établissements, cette année, afin de remédier à la situation de grand désarroi vécue l'année dernière dans un grand nombre de wilayas du pays. La capitale, Alger, en fait partie, avec ses deux directions est et ouest, de même que d'autres grandes villes du pays. Les chiffres officiels font état de la réception, cette année, de 462 établissements, dont 254 écoles primaires, 99 CEM et 109 lycées. Dans le primaire et le moyen, la situation est plus ou moins gérable, de l'avis des parents, des enseignants et autres proches de l'éducation nationale. Ce n'est pas le cas dans le secondaire, puisque sur un ensemble de 609 établissements attendus pour cette année, 109 seulement sont disponibles pour le moment. Les élèves des classes de première et deuxième année secondaire en pâtissent depuis que deux cohortes d'élèves se sont rencontrées dans un même palier et un même niveau, conséquence des réformes dans le moyen. Ceux de la terminale aussi mais pas pour la même raison. «Non, ce ne sont pas seulement ceux de la première et de la deuxième année secondaire. Ceux de terminale aussi vivent la même situation mais pour une raison différente», insiste Ahmed Khaled, président de l'Union des associations de parents d'élèves. Ce dernier rappelle une circulaire signée le mois d'août dernier par le ministre de tutelle: «La circulaire ministérielle fait obligation aux responsables de tous les établissements du secondaire à travers le pays de rappeler un maximum d'élèves exclus, sans tenir compte de leur âge ni de leurs notes. C'est peut être une bonne chose de donner une chance à ces enfants de se rattraper mais, une chose est sûre, cela ne va pas se faire sans encombrer un grand nombre de classes», soutient notre interlocuteur. Les «fraudeurs» de l'épreuve de philo aubaccalauréat 2013 ne sont pas concernés malgré l'insistance de ces derniers qui n'arrêtent pas de crier à l'injustice, en recourant à nouveau à la protestation pour réclamer leur droit de repasser l'examen cette année, et dans des conditions normales. Pour en revenir au problème posé aux deux classes de première et deuxième année (secondaire), Ahmed Khaled déplore le fait que des entreprises chargées de la réalisation des nouvelles structures n'ont pas réussi à être au rendez-vous. Le représentant des parents d'élèves refuse toutefois d'engager toute la responsabilité de ces entreprises incriminées par d'autres parties: «Les entreprises aussi ont leurs problèmes. Il y a le manque des matériaux de construction, la hausse des prix et, pire encore, un grand nombre d'entreprises ne trouvent pas d'ouvriers.» Un argument appuyé par un entrepreneur: «Il faut les trouver ces ouvriers. Tu leur apprends le métier et au bout de quelques mois ils se présentent à l'Ansej et demandent des crédits pour soi-disant créer une entreprise de construction. Chose qu'ils font rarement. Ils prennent l'argent et personne ne leur demande des comptes.» «C'est un métier très stressant. Je suis très fatigué. Je ferais mieux de baisser rideau», se plaint l'entrepreneur, qui a plus de 30 ans de travail dans le même domaine. Pour Ahmed Khaled, le problème est à chercher au niveau du ministère de l'Education nationale, voire au-delà, c'est-à-dire du gouvernement. «C'est un problème de planification. Un problème de programmation. Il ne fallait pas engager des réformes de cette importance sans s'assurer de pouvoir mener à terme et dans les délais les projets de réalisation des établissements.» Et cette situation ne concerne pas seulement les salles de classe mais aussi les cantines et le transport scolaire, quoiqu'il y ait des améliorations par rapport aux années précédentes. «Il fallait s'y attendre après les nombreuses opérations de relogement des familles, dans le cadre des différentes formules d'habitat (éradication de l'habitat précaire, social, Aadl…).» Et comme par hasard, des établissements se ferment ailleurs faute d'élèves: «56 écoles primaires sont fermées à Tizi Ouzou et 52 à Béjaïa pour ne citer que ces deux wilayas. Les gens des campagnes vont vers les villes à la recherche de meilleures conditions de vie.» C'est le cas des familles dont les élèves fréquentaient une école primaire qui se trouve au milieu d'une forêt en Kabylie, sans piste aménagée, sans magasins…etc. «Quoi de plus normal que les enfants partent ailleurs?», interroge notre interlocuteur. Malheureusement, le reste ne suit pas. «Moi, je pense que cela dépasse le ministère de l'Education et engage d'autres départements à l'exemple de celui de l'Intérieur, de la Solidarité, des Transports et autres. Le problème est à résoudre au niveau du Premier ministère», insiste-il. Même chose pour les cantines scolaires, avec seulement 14 700 pour un ensemble de 25 000 établissements scolaires. Là, c'est les APC qui ont failli à leur mission, occupées par des conflits internes et des agendas électoraux. Le manque d'assiettes pour la construction de ces cantines est un des handicaps majeurs sur lesquels butent les responsables de l'Education nationale. Surtout dans les grandes villes. Pour le reste, relève Le représentant des associations de parents d'élèves, «nous nous félicitons de l'augmentation du prix du repas par élève. Ce dernier est passé de 35 DA à 40 DA. Nous disons que cela reste insuffisant, il faut arriver à au moins 100 DA». Mme Khiar Djamila, également représentante d'associations de parents d'élèves, plaide pour qu'il y ait des cantines centralisées pour pallier leur manque dans les établissements. Et nos deux interlocuteurs d'insister sur la généralisation des repas chauds: «Il faut arrêter avec ces repas froids». Autre problème qui mérite solution urgente, celui des établissements qui contiennent de l'amiante : «Il n'est pas normal qu'en 2013, des élèves, des enseignants et autres personnels de l'éducation continuent de subir les dangers sur la santé de ce produit extrêmement nocif.» Autre fait à déplorer, depuis le temps que les responsables du ministère évoquent le «petit projet», l'absence de casiers dans les écoles primaires pour alléger le poids du cartable. Jusqu'à présent, aucun établissement ne s'est distingué par la remise de petites clés aux enfants, les invitant à bien garder leurs affaires dans des casiers aménagés spécialement pour eux. K. M.