Visite médicale en soirée, signature du contrat à 23h00. 4e Algérien à jouer pour Kaiserslautern. Moins d'une semaine après avoir résilié le contrat qui le liait au club saoudien du Nassr, Anthar Yahia a trouvé un club d'attache. Et quel club, puisqu'il a signé au FC Kaiserslautern, une formation de la Bundesliga allemande, consacrant ainsi son retour dans ce championnat d'élite dans lequel il avait évolué par le passé avec VfL Bochum. Jusqu'à mardi matin, c'était ou Eintracht Frankfurt ou Ingolstadt Depuis qu'il a quitté l'Arabie saoudite, il était dans l'air que c'est en Allemagne que le capitaine des Verts allait retourner. D'abord, c'est un pays qu'il connaît bien et où il a vécu ses meilleurs moments de footballeur. Ensuite, il y a un nom et une réputation, n'en déplaise à ceux qui réduisaient son aura au seul espace de Bochum. De toutes les offres qu'il a reçues ces derniers jours, deux semblaient très sérieuses : Eintracht Frankfurt, dans lequel évoluent déjà deux Algériens, Karim Matmour et Habib Bellaïd, et le FC Ingolstadt, les deux clubs évoluant en deuxième division allemande. Jusqu'à mardi matin, le projet de Yahia était de négocier avec ces deux clubs et décider de celui qui lui conviendrait. Kuntz, son ancien Directeur sportif à Bochum, le ramène à Kaiserslautern en quelques heures Comme les choses vont vite en Europe en général et en Allemagne en particulier, tout s'est accéléré mardi dans l'après-midi. En effet, le Directeur sportif du FC Kaiserslautern a appelé le joueur et il se trouve que ce n'est pas un inconnu puisqu'il s'agit de Stefan Kuntz, l'ancien Directeur sportif du VfL Bochum, celui-là même qui avait recruté Yahia dans ce club en 2007. Il lui a fait une offre verbale en lui précisant qu'il ne pouvait se permettre des négociations en plusieurs rounds. Comme Yahia était lui aussi pressé de trouver un club pour ne pas rester sans entraînement, il a accepté de se déplacer à Kaiserslautern pour discuter. Après une négociation éclair entre deux hommes qui se connaissent bien et qui savent ce que chaque partie peut apporter à l'autre, un accord a été vite trouvé. Visite médicale en soirée, signature du contrat à 23h00 Comme il fallait battre le fer tant qu'il était chaud, les formalités d'usage ont été accomplies rapidement. Ainsi, la visite médicale a eu lieu dans la soirée, pendant que le contrat était en préparation. Aux alentours de 23h00, Anthar Yahia a signé un contrat de 3 ans et demi, soit jusqu'à juin 2015. C'est du travail vite fait et bien fait entre gens qui savent ce qu'ils veulent. Cet engagement de longue durée de Yahia témoigne non seulement de la confiance que le FC Kaiserslautern lui porte, mais aussi de la volonté du capitaine des Verts de s'impliquer dans le club, même s'il serait appelé à rétrograder. Les supporters surpris de le découvrir hier à l'entraînement Les premiers à avoir été surpris de cette signature ont été les supporters de Kaiserslautern qui étaient partis assister à la séance d'entraînement du matin. Ils ont découvert un nouveau visage qu'ils ne connaissaient pas et c'est là qu'on leur a appris qu'il s'agissait d'une nouvelle recrue. Même les journaux allemands n'avaient pas l'information. C'est le site web de Kicker qui a été le premier à donner la nouvelle à la mi-journée sur sa page principale. Puis, l'information a été relayée et commentée, le FC Kaiserslautern étant l'un des clubs les plus populaires en Allemagne, donc objet d'une large couverture médiatique de son actualité. A Ingolstadt, il y avait risque de jouer pour le maintien En fait, le choix de Yahia est très cohérent sur un plan sportif. En effet, des trois clubs avec qui il était en contacts, Kaiserslautern est actuellement le mieux classé (16e de la Bundesliga). Le FC Ingolstadt aurait été un challenge risqué puisque le club occupe actuellement une place de relégable au classement de la deuxième division et l'international algérien ne veut pas revivre le cauchemar des matches à pression pour le maintien. S'il revenait en deuxième division, c'est pour un vrai challenge de remontée car il n'aime pas être gagne-petit. Passer d'un club du Golfe vers la Bundesliga, il faut le faire ! Il y avait aussi Eintracht Frankfurt, sa qualité de club de deuxième division a certainement pesé dans le choix du joueur. Puisque Yahia avait la possibilité de revenir directement en Bundesliga, il l'a fait. Il attendait cela depuis mai 2010, lorsque le VfL Bochum avait été relégué. Cela démontre surtout que Yahia a un nom dans la Bundesliga et que sa réputation n'était pas confinée uniquement dans l'espace Bochum. Passer d'un club d'un pays du Golfe vers un club de la Bundesliga, surtout que juste avant cela il jouait en deuxième division allemande, il faut le faire ! Une gifle pour ceux qui l'ont enterré trop vite Ce retour parmi l'élite allemande constitue surtout une gifle pour ceux (nombreux) qui avaient enterré le capitaine des Verts trop vite, lui prédisant une retraite anticipée alors qu'il n'a pas encore bouclé ses 30 ans. Yahia est bien là et il l'a démontré. En signant un contrat de 3 ans et demi, il a l'assurance de jouer en Allemagne jusqu'après le Mondial-2014. C'est déjà une très bonne nouvelle pour les Verts, la deuxième en une semaine après celle de la signature de Djamel Mesbah à l'AC Milan. -------------- 4e Algérien à jouer pour Kaiserslautern A Kaiserslautern, l'Algérie, on connaît. En effet, Anthar Yahia sera le 4e joueur algérien à défendre les couleurs du club de la ville, après Ismaïl Bouzid, Nourredine Daham et Chadli Amri. D'ailleurs, ce dernier a quitté le club il y a un mois pour aller rebondir au FSV Frankfurt. Yahia aurait pu être le 5e Algérien au club si Aïmen Demai, dont le père est algérien et la mère tunisienne, n'avait pas choisi de défendre les couleurs de la Tunisie. Yahia «En signant en Arabie Saoudite, je me suis trompé dans mon choix» Comment avez-vous atterri au FC Kaiserslautern ? Après 6 mois en Arabie Saoudite qui ont été un peu difficiles, j'avais envie de retrouver le vrai football. El hamdoullah, je suis content. Je n'ai rien à dire sur Al Nassr. Je souhaite bonne chance au club et à tous les gens qui y travaillent et qui m'ont bien accueilli là-bas. Moi, j'ai déjà tourné la page. Dites-nous juste à quel moment vous avez décidé de quitter ce club et de retourner en Europe ? J'y pensais depuis un moment. Je regardais les matchs de l'Europe à la télévision et, franchement, voyant l'univers dans lequel j'étais, j'avais envie de participer de nouveau à ce genre de matchs. El hamdoullah, en tant que croyant, je dis qu'Allah m'a facilité le chemin pour retourner en Europe. C'est bien le cas de le dire puisque moins d'une semaine après avoir résilié votre contrat avec Al Nassr, vous atterrissez en Bundesliga. Comment se sont fait les contacts avec le FC Kaiserslautern ? Avant même de résilier mon contrat, j'avais au moins une opportunité de signer dans un club. Donc, vous n'êtes pas parti à l'aventure et vous saviez que vous alliez trouver un club preneur… Oui, car j'ai gardé des contacts en Allemagne, même après mon départ. Lorsque le mercato approchait, ça s'est accéléré. Comme Al Nassr était à la recherche d'un attaquant, mon agent était venu en décembre pour discuter avec les dirigeants et essayer de trouver une solution pour une résiliation à l'amiable, mais le club ne voulait absolument pas que je parte. En janvier, j'ai insisté et rediscuté avec eux et nous avons trouvé une solution. Puis, je suis reparti en Allemagne. J'avais deux contacts très avancés, mais Kaiserslautern est entré au dernier moment en négociations. Grâce à Dieu, ça s'est fait rapidement. Si on comprend bien, contrairement à ce qu'affirmait la presse saoudienne, c'est bien vous qui vouliez partir et ce n'est pas Al Nassr qui voulait vous mettre à la porte, c'est bien ça ? Oui, c'est ça. Je voulais partir au mois de décembre, quitte à être perdant financièrement, mais le coach avait opposé son veto à mon départ. D'ailleurs, même le jour où j'étais parti, il était triste. C'est donc moi qui voulais partir. Mais comme le coach, qui venait d'être nommé, ne le voulait pas, les dirigeants du club ont suivi sa position. Quelque temps après, je les ai recontactés et nous avons trouvé un terrain d'entente. A présent, on comprend mieux l'entraîneur Maturana qui a déclaré récemment qu'il ne voulait pas de votre départ et que c'était une décision prise par l'administration… Maturana n'a rien à voir dans ce qui m'est arrivé. C'est un très bon entraîneur et j'étais content de travailler avec lui. C'est vraiment un Monsieur. Il a été deux fois en Coupe du monde avec la Colombie. Un vrai gentleman. Avec le FC Kaiserslautern, tout s'est joué dans l'après-midi de mardi. Pourquoi cela s'est-il conclu si rapidement et qu'est-ce qui vous a le plus motivé dans son offre ? Le nom du club ! Ensuite, le fait que ce soit un club évoluant en Bundesliga. Il y a aussi le fait que le Directeur sportif, Stefan Kuntz, me connaît puisque nous avons travaillé trois ans ensemble au VfL Bochum. C'est lui qui gère tout le côté sportif de Kaiserslautern. Donc, je ne partais pas à l'aventure. Je connais la personne et sa façon de travailler. Lui aussi me connaît et connaît mes qualités. Même si j'étais parti en Arabie Saoudite, il sait que je suis professionnel et que je me donnais à fond. Cela m'aidera à entrer dans le rythme. Il faut dire qu'à Kaiserslautern, il y a une forte concurrence. Nous sommes 4 ou 5 défenseurs centraux. Pour moi, c'est un nouveau challenge qui commence. Je suis humble, je me mets au service de l'équipe et de l'entraîneur. Cependant, nous nous sommes informés et il paraît que la principale lacune de l'équipe du FC Kaiserslautern est sa charnière centrale. Si on vous a recruté, c'est certainement pour jouer… Je ne veux même pas parler de ça parce que j'ai beaucoup de respect pour les gars qui jouaient dans l'axe avant moi et aussi pour les jeunes qui attendent et qui mettent la pression. Mon objectif à moi est d'être bon et compétitif à l'entraînement et gagner ma place petit à petit. Quand on arrive en tant que nouveau joueur, il faut s'intégrer. J'ai du respect pour les joueurs qui ont joué toute la phase aller. Ils étaient bons quand même puisque c'est l'une des défenses qui a encaissé le moins de buts. Un contrat de 3 ans et demi, c'est quand même un signe de confiance de la part de votre nouveau club… Bien sûr. C'est un vrai signe de confiance. C'est un contrat valable pour les première et deuxième divisions, sachant que l'objectif pour un club tel que le FC Kaiserslautern est d'être toujours en Bundesliga. Je suis content de la confiance qu'on me manifeste. Inch'Allah, je serai à la hauteur de cette confiance dans l'engagement, le comportement et la performance. Comment a été la réaction des supporters du FC Kaiserslautern lorsqu'ils vous ont découvert ce matin (interview réalisée hier dans la soirée, ndlr) à l'entraînement, alors que l'information de votre recrutement n'avait pas été rendue publique ? Je ne peux pas le savoir, parce que je ne connais pas grand monde encore. Je pense que ça a été une surprise pour tout le monde, parce qu'il n'y avait pratiquement personne, à part ma famille qui le savait. Votre engagement au FC Kaiserslautern est la deuxième bonne nouvelle en une semaine pour le football algérien, après celle de la signature de Djamel Mesbah à l'AC Milan. Ne pensez-vous pas que c'est la preuve que les footballeurs algériens peuvent jouer dans le haut niveau, en dépit de choix de carrière différents dictés par les circonstances ? Que ce soit dans le positif ou dans le négatif, il ne faut pas toujours tout remettre en cause. Ce n'est pas parce qu'une fois on fait un bon match qu'on est les meilleurs et que lorsqu'on perd, on devient les plus nuls. Dans une carrière, c'est pareil : à un moment donné, il y a des choix à faire et je le dis en parlant uniquement pour moi : je me suis trompé dans mon choix. Cela n'engage que moi. Il faut retenir les leçons pour ne pas refaire les mêmes erreurs, voilà tout. En parlant de Mesbah, un mot sur son transfert, en ta qualité de capitaine des Verts ? Je suis très content pour Djamel parce qu'il est parti dans un club d'une autre dimension. A son âge, il a encore des paliers à franchir. Quand j'ai appris la nouvelle de son transfert, j'étais vraiment très content. C'est un bon joueur qui a encore une marge de progression. Je sais qu'il va travailler inch'Allah pour se faire une place dans l'équipe de Milan. Milan, vous connaissez bien puisque vous avez été joueur de l'Inter, le club rival, certes, mais dont le fonctionnement est similaire à celui de l'AC Milan. Pensez-vous qu'il est possible d'y passer des caps quand on tombe sur un entraîneur qui vous fait confiance ? Bien sûr, surtout si on y va dans la situation de Djamel. C'est incomparable avec mon cas puisque j'avais signé à l'Inter mon premier contrat professionnel à 18 ans, alors que je n'avais pas encore joué en Ligue 1 française. C'était plus difficile. Mais quand on y va en tant que joueur confirmé en Serie A comme Djamel, doté d'une culture tactique, on a des chances de s'imposer. Inch'Allah, il sera épargné par les blessures. Je pense qu'il va gagner sa place. On assiste à un regain de forme des professionnels algériens puisque, outre votre transfert et celui de Mesbah, il y a Belhadj qui est champion d'Asie, Djebbour qui est buteur à l'Olympiakos Le Pirée, Kadir qui tourne bien dans son club, Boudebouz qui est convoité par des grands d'Europe, Ziani qui est meilleur passeur du championnat du Qatar, Lacen qui est régulier à Getafe… N'est-ce pas finalement la meilleure nouvelle sur un plan collectif ? C'est difficile de parler pour les autres, mais quand je vois un joueur algérien signer dans un bon club ou s'illustrer dans un match, ça me fait toujours plaisir. En ce qui me concerne, je suis très content, surtout pour ma famille, mes parents, ma femme et mon fils. IL faut dire que le stress a été encore plus dur pour eux que pour moi. Justement, autre avantage de votre signature à Kaiserslautern : ce n'est pas loin de la frontière française et même de Belfort, où résident vos parents… Oui, ce n'est pas très loin de chez mes parents. C'est très important que mes parents, mon épouse, mon fils et aussi mes frères et sœurs soient là dans les moments difficiles. Il y a aussi le fait que plusieurs de tes coéquipiers en sélection nationale ne sont pas loin puisqu'il y a Karim Matmour, un très bon ami à vous, ainsi que Chadli Amri, Karim Benyamina et Habib Bellaïd qui jouent tous à Francfort, pas très loin… Justement, Karim Matmour, qui est un frère, voulait absolument que j'aille à l'Eintracht Frankfurt. Il a tout fait pour que j'y aille. Pour dire vrai, j'y étais presque (rires). Je tiens à le remercier. Pour l'anecdote, il avait failli venir à Bochum quand j'y jouais et j'ai failli aller à Francfort maintenant qu'il y joue. Soit dit en passant, j'étais en contacts avancés avec l'Eintracht Frankfurt et le FC Ingolstadt. Je suis touché par la confiance qu'ils voulaient placer en moi et je tiens à les remercier et aussi à m'excuser auprès d'eux pour avoir fait un autre choix. Anthar Yahia en Bundesliga, c'est aussi une bonne nouvelle pour Vahid Halilhodzic qui voit son capitaine d'équipe revenir dans un championnat de haut niveau. Avez-vous pensé à la sélection nationale en faisant votre choix ? C'est justement l'un des paramètres qui ont dicté mon choix. Je dois dire aussi une chose : lorsque j'ai résilié mon contrat avec Al Nassr, j'avais pris aussi un risque car on ne peut pas savoir ce qui peut se passer dans les 24 heures après. Même si on a un contact avec un club, le temps de voyager, ce club pourrait faire signer un autre joueur. El hamdoullah, ça s'est bien passé. Que ce soit à l'entraînement ou dans les matchs, j'essayerai de me mettre dans les meilleures dispositions pour être sélectionnable. Ça ne change rien : pour être sélectionnable, il faut être bon. La nouvelle de votre signature au FC Kaiserslautern n'a été diffusée que par les radios et les sites Web, mais des Algériens ont d'ores et déjà exprimé leur satisfaction quant à votre retour en Europe. Un mot à leur adresser ? Ces derniers temps, j'ai eu pas mal de messages gentils de supporters algériens. Ça m'a fait très chaud au cœur. Je dis un grand, grand, grand merci à tous ceux qui m'aiment et à tous ceux qui ont été derrière moi. Je vais tout faire pour être à la hauteur inch'Allah.
