La maison de luxe Hermès a conquis de nouveaux sommets en 2012, en inscrivant des records de bénéfices et de marge, supérieurs aux attentes du marché, selon ses résultats publiés qui confirment après ceux de LVMH ou de PPR l'éclatante santé du secteur du luxe. Le bénéfice net est en hausse de 24,5% à 740 millions d'euros, là où les analystes attendaient 710 à 720 millions. "Après retraitement de la plus-value (29,5 millions d'euros) réalisée en 2011 lors de la cession de la participation dans le groupe Jean Paul Gaultier, la progression atteint 31%", souligne Hermès dans son communiqué. Le bénéfice opérationnel progresse lui de 26,4% à 1,12 milliard d'euros, quand le marché attendait 1,09 milliard, et la marge ressort à 32,1%, à son plus haut niveau historique depuis l'introduction en Bourse de Hermès en 1993. Le célèbre fabricant des carrés de soie et des sacs Kelly et Birkin, tiré par la très forte dynamique de ses ventes en Asie mais aussi par l'évolution positive en Amérique notamment, empile les records depuis plusieurs années. Il avait annoncé en février un chiffre d'affaires historique de 3,48 milliards d'euros en 2012 (+22,6%), après 2,84 milliards d'euros en 2011. Depuis 2008, la maison familiale créée en 1837 a doublé son chiffre d'affaires et multiplié par 2,5 son résultat net. Hermès a notamment été porté en 2012 par un quatrième trimestre "excellent", avait indiqué en février son patron Patrick Thomas. A lui seul, le quatrième trimestre a permis d'engranger plus d'un milliard d'euros de recettes. Même s'il semble pour l'heure insensible à tout ralentissement de l'économie en Asie, où il a réalisé plus de la moitié de ses ventes en 2012, Hermès ne fait aucune prévision pour 2013, comme à son habitude. M. Thomas s'était voulu prudent en février, rappelant qu'en 2013 "l'euro fort" pouvait "avoir un impact sur le volume des ventes ici en Europe". Le luxe toujours en croissance Mais le monde du luxe va bien. A titre de comparaison, le numéro un mondial du luxe LVMH (Vuitton, Céline, Givenchy...), qui détient 22,6% de Hermès, avait lui aussi publié le 31 janvier des résultats record pour 2012: ventes de 28,1 milliard d'euros (+19%), bénéfice net de 3,43 milliard (+12%)... La marge de LVMH avait toutefois baissé d'un point à 21% et la croissance des ventes à données comparables s'est tassée, subissant notamment le ralentissement de l'économie chinoise. En 2012, les ventes d'Hermès ont bondi dans toutes les divisions, de la maroquinerie, qui a profité de deux nouveaux ateliers en France, aux vêtements et accessoires (deuxième plus gros pôle), en passant par la soie et les textiles, aidés par de nouveaux formats et de nouvelles matières et couleurs, par la bijouterie, les arts de vivre, les parfums, l'horlogerie et les arts de la table. Le groupe, qui a ouvert en 2012 deux nouvelles succursales en Chine (Taiwan et en Chine) et rénové ou agrandi six autres magasins, n'a prévu qu'une ouverture en 2013, au sud de Shangai. Une bonne dizaine de rénovations ou agrandissements sont aussi prévus. Hermès compte verser un dividende de 2,50 euros par action à ses actionnaires, qui avaient été particulièrement gâtés en 2011, empochant 7 euros par action dont 5 euros de dividende exceptionnel. Ils ont déjà touché un acompte de 1,50 euro par titre. Le titre Hermès avait clôturé à 257 euros mercredi à la Bourse de Paris. La trésorerie nette du groupe s'élevait à 686 millions d'euros fin 2012. Hermès précise qu'il employait 10 118 personnes fin décembre dont 6.110 en France, après avoir créé "plus de 800 nouveaux emplois" l'an dernier. "La phase offensive" contre LVMH La maison de luxe Hermès a expliqué avoir lancé "la phase offensive" contre LVMH avec sa plainte en justice contre le numéro un mondial du luxe qui détient 22,6% de son capital, avec l'espoir au bout du compte de voir reculer cette participation. Hermès avait porté plainte en octobre dernier contre les conditions de l'arrivée par surprise de LVMH dans son capital en 2010 avec 17%. LVMH (Vuitton, Céline...) avait recouru à l'achat de produits financiers complexes qui lui ont permis d'éviter d'avoir à déclarer progressivement les franchissements de seuil. Une enquête a été confiée le 20 février à une juge d'instruction. "La phase défensive est terminée. Il n'y a plus de risque aujourd'hui que les intentions de LVMH aboutissent, la famille Hermès a bloqué 50,1% de ses actions dans une holding", a déclaré M. Thomas, en allusion au risque d'une prise de contrôle de Hermès par LVMH, ce dont s'est toujours défendu LVMH. "Maintenant il y a la phase offensive", a-t-il ajouté lors de la présentation des résultats annuels. L'Autorité des marchés financiers (AMF), qui a lancé une enquête fin 2010 et doit rendre ses conclusions cet été, "ne peut enquêter que sur le droit boursier et ses pouvoirs d'investigation sont tout de même limités", a estimé M. Thomas. Or Hermès a "trouvé des éléments assez accablants sur la façon dont les choses se sont passées, notamment à l'étranger, puisque des opérations (de LVMH) ont été montées depuis Panama et le Luxembourg", a-t-il dit. La justice, elle, "dispose des pleins pouvoirs d'investigation, notamment à l'étranger", alors que "l'AMF n'est pas allée au Panama", a ajouté M. Thomas. Hermès n'a pas pour "objectif d'embêter LVMH", mais estime que "pour des raisons culturelles" le groupe de Bernard Arnault ne peut rien lui apporter en étant un tel "actionnaire minoritaire important", selon M. Thomas. "Nous n'avons pas le même modèle d'entreprise", poursuit-il. Hermès se pose comme artisan familial face à LVMH, industriel du luxe en quête de profits. Pour M. Thomas, une "bonne participation" de LVMH serait "une participation qui permette au flottant de fonctionner", or la famille Hermès détient 72% du capital, LVMH plus de 22% et "le flottant est très faible, il faudrait qu'il soit de 15-20%", a dit M. Thomas.