Retraité des terrains depuis plusieurs années et prêt à mettre son expérience à disposition mais sans faire de concession, Paolo Maldini, l'un des plus grands joueurs de l'histoire du foot italien et mondial, est marginalisé par son club de toujours et sa propre nation. Absurde. Milan-Roma, une affiche qui devrait rappeler des exploits, des buts, des titres, mais c'est surtout un adieu gâché qui nous vient à l'esprit en repensant à ce classique. C'était il y a sept ans, grand ciel bleu, San Siro rempli, hommage des adversaires, tout était prêt pour honorer une véritable légende. Puis, quelques minutes après le coup de sifflet final, le noyau dur des pensionnaires de la Curva Sud (le kop des fidèles) déployait des banderoles et réglait ses comptes concernant des prises de becs quelques années auparavant. Depuis ce coup bas, et suite à l'absence de soutien de sa direction, Maldini s'est irrémédiablement éloigné du seul et unique club qu'il a connu dans sa carrière. Une situation à l'insoutenable arrière-goût de gâchis qui perdure depuis trop longtemps.
Il souffre, en silence Cette fois, au San Mamès, pas une once de contestation, les supporters de l'Athletic Bilbao applaudissent chaleureusement. Paolo Maldini est l'invité du jour et vient recevoir le "One Man Club Award", trophée récompensant les joueurs qui n'ont porté qu'un seul maillot. C'est que les Basques s'y connaissent en matière de fidélité. Style impeccable, sobriété, charisme, tout y est. A bientôt 48 ans, le bel Italien continue d'en jeter et, carrière à l'appui, est le garant d'un football propre, transparent et limpide. Il fait l'unanimité. La veille, le Milan arrachait un nul 3-3 à domicile contre le relégable Frosinone et abandonnait une sixième place lui garantissant une qualification européenne. En tribunes, Galliani et sa réputation bien ternie exultait pour cette égalisation in-extremis. Deux images tristement symboliques à quelques heures d'écart. Depuis ce fameux match d'adieu, les rapports entre Maldini et son ancienne direction n'ont cessé de se refroidir. Aucun ou très peu de contacts en public comme en privé et des critiques acerbes mais justes lors de l'interview annuelle qu'il concède. Malgré la situation désastreuse de son club (sans guillemets), l'ancien défenseur ne s'épanche pas plus que ça dans les médias. Pas de rôle d'observateur à la télé ou à la radio, il reste en retrait, observe et constate avec amertume la dégradation, égratignant l'omnipotent homme à la célèbre cravate jaune : "un grand dirigeant mais qui a une carence dans le choix des joueurs."Touché mais pas coulé.
Indépendance intellectuelle avant tout "Ne pas voir Paolo Maldini au sein du Milan est plus qu'absurde", c'est signé Zvonimir Boban, lui aussi grand ancien du club. Une analyse concise et efficace qui résume la pensée de tout le monde. A l'heure actuelle, le board des Rossoneri est le suivant : Silvio Berlusconi, président d'honneur, sa fille et Adriano Galliani, administrateurs délégués avec des tâches respectives, et Rocco Maiorino, officieusement directeur sportif. Sorti de nulle part, ce dernier a remplacé l'excellent Ariedo Braida, bouc-émissaire remercié il y a plus d'un an et qui a vite retrouvé du boulot au Barca. Sur le papier, l'organigramme est assez complet, et pourtant : "Ces dernières années, Leonardo, Seedorf, Allegri et Barbara Berlusconi m'ont appelé. Je leur ai tous répondu la même chose, c'est à dire que cela me plairait de pouvoir être impliqué mais qu'en même temps, je veux faire les choses comme je l'entends, et cela peut assurément poser quelques problèmes..." Lors de sa dernière interview accordée à Sky Italia, Maldini a tenu à souligner sa vision des choses. Le message est clair, il ne viendra pas endosser un simple rôle d'ambassadeur comme le fait par exemple son ancien capitaine Franco Baresi. Une reconversion en tant que coach a été écartée depuis longtemps, surtout la version yesman à la Inzaghi ou Brocchi.