Pour riposter aux mesures prises aux Etats-Unis, la Commission européenne compte imposer des règles plus strictes pour les grandes banques étrangères établies dans l'Union européenne, a indiqué mardi une source proche de l'exécutif européen. Cette proposition, qui doit être présentée mercredi par la Commission (dans le cadre plus large d'un grand paquet bancaire), pourrait également compliquer la donne pour le Royaume-Uni en cas de Brexit. Nous allons proposer de faire la même chose que les Américains, a déclaré cette source. Nous voulons introduire de nouvelles conditions pour les banques des pays tiers avec des activités significatives en Europe, destinées à simplifier et à renforcer leur résolution en cas de défaillance. Cette mesure permettrait, selon elle, de protéger le contribuable européen en cas de faillite d'une banque étrangère dans l'UE, lui évitant d'être mis à contribution pour la sauver. Il y a moins de trois ans, les autorités américaines avaient décidé de soumettre à des normes financières plus strictes les très grandes banques étrangères implantées aux Etats-Unis, un nouveau cadre élaboré à la lueur de la crise financière de 2008. A l'époque, le commissaire européen aux services financiers, le Français Michel Barnier, avait accusé les Américains de protectionnisme. Le fait que la Commission européenne fasse de la réciprocité par rapport à ce qu'a fait la Réserve fédérale n'est pas une énorme surprise, a déclaré Nicolas Veron, du groupe de réflexion européen Bruegel, notant toutefois qu'elle avait été un peu lente à réagir. Dans le cas de l'UE, a expliqué la source proche de la Commission européenne, il s'agit d'exiger des banques des pays tiers la mise en place dans l'UE d'une société mère pouvant faire l'objet d'une résolution, qui est peu ou prou une sorte de restructuration orchestrée par une autorité publique dans le but de limiter l'impact pour les clients et le reste de l'économie. Coup de poignard Sont concernées par ces propositions les institutions présentant un risque systémique --c'est-à-dire un risque mettant en danger la survie du système financier-- ou qui ont des entités sur le territoire de l'UE avec des actifs d'au moins 30 milliards d'euros, a ajouté la source. Cette nouvelle proposition ne fera peut-être pas plaisir à tous les pays tiers, a-t-elle reconnu, citant notamment le Royaume-Uni. A la suite du référendum sur le Brexit en juin, le Royaume-Uni pourrait en effet à terme devenir un pays tiers de l'UE. Pour M. Veron, les Britanniques pourraient voir ceci comme un coup de poignard dans le dos avant même le début des négociations sur le Brexit. C'est un signal de position dure face aux Britanniques car cela crée des contraintes additionnelles pour les banques établies à Londres avant le Brexit. Dans l'hypothèse d'un 'hard Brexit' --une sortie de la Grande-Bretagne du marché intérieur et de l'UE-- les grandes banques (américaines notamment) vont devoir avoir deux entités, une à Londres et l'autre dans l'UE, ce qui engendrera des coûts additionnels, a-t-il souligné. Cette proposition de la Commission européenne doit encore être approuvée et peut-être amendée par les 28 Etats membres de l'UE --dont le Royaume-Uni, jusqu'à son départ éventuel de l'Union-- et par le Parlement européen. Une majorité qualifiée parmi les Etats membres est nécessaire pour qu'elle soit adoptée. Selon une source proche des milieux bancaires américains, la proposition de la Commission, si elle était adoptée, résulterait en un processus plus onéreux pour exercer dans l'Union européenne. Elle a toutefois souligné que le capital supplémentaire exigé serait également intégré par les autorités de régulation bancaire américaines dans leurs propres calculs sur les ratios de solvabilité des banques car leurs opérations à l'étranger sont prises en compte. Selon cette source, un Brexit dur rendrait cette mesure plus coûteuse car les banques américaines se retrouveraient contraintes de complètement repenser leur organisation en Europe avec notamment soit un holding dans un pays particulier couvrant toutes leurs opérations ou bien plusieurs holdings selon les différents pays où elles seraient actives.