Menaces de guerre commerciale, polémique Facebook, secteur technologique en berne... La chute de Wall Street s'est brusquement accélérée jeudi alors que Donald Trump a annoncé de nouvelles sanctions commerciales contre la Chine qui a déjà menacé de riposter. A la clôture, le Dow Jones a plongé de 2,93% à 23.957,89 points, soit une chute de plus de 700 points, le Nasdaq a lâché 2,43% à 7.166,68 points et le S&P 500 2,52% à 2.643,69 points. Il s'agit de la plus forte baisse du Dow Jones depuis le 8 février. Les trois principaux indices de Wall Street se dirigeaient vers une glissade hebdomadaire proche de 4%, et vers une deuxième semaine de recul de suite. "La chute des indices est la combinaison du plongeon de Facebook qui pèse sur le secteur technologique traditionnellement locomotive de la hausse des cours, et de la perspective d'une guerre commerciale avec la Chine", a commenté Maris Ogg, présidente de Tower Bridge Advisors. Jeudi, ces indices ont été très affectés par l'annonce de M. Trump de mesures punitives contre Pékin pouvant atteindre "60 milliards de dollars". Cette nouvelle offensive protectionniste survient deux semaines seulement après que M. Trump a promulgué des taxes de 25% sur les importations d'acier et de 10% sur celles d'aluminium. Les inquiétudes sur une guerre commerciale avec l'un des principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis ne font que croître au fil des jours, a observé William Lynch de Hinsdale Associates. "Nous exhortons les Etats-Unis à revenir sur leur décision, à prendre des décisions prudentes et à éviter de mettre les relations commerciales entre la Chine et les Etats-Unis en danger", a réagi l'ambassade de Chine aux Etats-Unis jeudi.
Représailles D'éventuelles représailles de Pékin pourraient cibler aussi bien l'avionneur Boeing que les massives exportations américaines de soja, avec pour possible objectif de pénaliser des régions soutenant électoralement Donald Trump. La Chine et les Etats-Unis sont étroitement liés sur le plan économique et financier bien que le déficit commercial sur les biens soit très défavorable aux Etats-Unis, ce que dénonce vivement le président américain. Les Etats-Unis ont exporté pour 130,4 milliards de dollars de marchandises vers la Chine et importé 505,6 milliards de biens chinois en 2017, selon les statistiques du département du Commerce, soit un déficit de 375,2 milliards de dollars. Les grandes multinationales américaines ont logiquement souffert après ces annonces de M. Trump, Boeing a perdu 5,19%, General Motors 3,27% et Caterpillar 5,71%, General Electric 3,82%. Signe des craintes très fortes de guerre commerciale, l'indice regroupant les valeurs de l'industrie américaine au sein du S&P 500 a perdu 3,28%. De son côté, Facebook a poursuivi sa descente aux enfers entamée lundi à la suite d'une polémique le week-end dernier autour de l'utilisation indue de données personnelles de millions de ses utilisateurs par une firme britannique. Jeudi, Israël a ouvert une enquête et l'Union européenne a réclamé une "protection totale" des données personnelles. Le titre a perdu 2,66% malgré les excuses, tardives, de son patron Mark Zuckerberg la veille, portant sa chute depuis lundi à près de 11%, soit environ 50 milliards de dollars de capitalisation boursière. "L'administration américaine ne va pas s'asseoir et ne rien faire. On parle depuis des années de régulation de ces géants de l'internet. Cela semble se concrétiser désormais", a commenté Mme Ogg.
Ligne rouge Ce climat de scepticisme a entraîné l'ensemble des valeurs technologiques vers le bas, à l'instar d'Amazon (-2,39%), Alphabet (maison mère de Google, -3,73%), Twitter (-4,67%). L'indice regroupant les valeurs technologiques au sein du S&P 500 a perdu quant à lui 2,69%. Il a perdu plus de 5% depuis lundi. Les annonces de la banque centrale américaine (Fed) mercredi à l'issue d'une réunion de deux jours ont également pesé un peu sur les marchés selon plusieurs analystes, l'institution ayant relevé sa perspective de hausse de taux d'intérêt supplémentaires pour 2019. La démission jeudi de l'avocat dirigeant l'équipe qui conseille M. Trump dans l'enquête du procureur spécial Robert Mueller sur une éventuelle collusion entre son équipe de campagne et Moscou, John Dowd a également inquiété Wall Street. "Nous avons franchi une ligne rouge", dans les démêlées judiciaires de la présidence, a indiqué Art Hogan de Wunderlich Securities, Jack Ablin de Cresset Wealth Advisors affirmant qu'"il s'agit d'un nouveau facteur d'instabilité problématique à la Maison Blanche".
Les actions européennes en baisse Les Bourses européennes ont fermé jeudi en forte baisse, dans le sillage de Wall Street sur fond de craintes de tensions commerciales mondiales. La Bourse de New York craignait l'éclatement d'une guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine après l'annonce par Donald Trump jeudi de mesures punitives contre des importations chinoises pouvant atteindre "60 milliards de dollars", Pékin ayant déjà menacé de répliquer. "Les inquiétudes sur une guerre commerciale avec l'un des principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis ne font que croître au fil des jours", a observé William Lynch de Hinsdale Associates. "La police commerciale de l'administration Trump devrait rester le principal facteur influençant les marchés", relèvent les analystes de Capital Economics. La question majeure est désormais de savoir si le conflit va rester cantonné à quelques produits, ou si Washington va adopter "une approche protectionniste" plus large, susceptible d'entraîner des représailles et de dégénérer en guerre commerciale.
L'Eurostoxx 50 a chuté de 1,55% A Paris, le CAC 40 a lâché 1,38%, soit 72,53 points, à 5.167,21 points, dans un volume d'échanges étoffé de 4,3 milliards d'euros. Les titres du secteur bancaire ont été pénalisés par la forte détente enregistrée sur le marché des rendements obligataires. Société Générale a reculé de 2,20% à 44,11 euros, Axa de 2,35% à 21,80 euros, tandis que Crédit Agricole a lâché 1,51% à 13,38 euros et BNP Paribas 1,83% à 60,11 euros. Le secteur technologique a aussi reculé dans le sillage du Nasdaq : STMicroelectronics (-4,57% à 19,41 euros), et Ingenico Group (-3,37% à 64,26 euros). Les titres liés aux matières premières ont également pâti des craintes d'une guerre commerciale: ArcelorMittal (-3,84% à 26,18 euros), Vallourec (-4,50% à 4,54 euros) ou TechnipFMC (-3,75% à 24,11 euros). A l'inverse, DBV Technologies a gagné 3,75% à 37,10 euros, après avoir annoncé une augmentation de capital de 122,5 millions d'euros. L'indice FTSE 100 de la Bourse de Londres a abandonné 1,23%, ou 86,38 points, à 6.952,59 points, notamment à cause de la fermeté de la livre, nourrie par le discours de la Banque d'Angleterre (BoE). Les valeurs minières ont souffert: Anglo American (-2,52% à 1.696,20 pence), Glencore (-3,22% à 359,20 pence), BHP Billiton (-2,69% à 1.395,20 pence) et Rio Tinto -3,53% à 3.584 pence). Le marché a été également entravé par la fermeté de la livre, nourrie par le discours de la Banque d'Angleterre (BoE). Le spécialiste des produits d'hygiène Reckitt Benckiser a signé la meilleure performance de l'indice (+4,78% à 5.895 pence). Le spécialiste des systèmes de détection Halma a reculé (-2,03% à 1.160 pence), après avoir pourtant annoncé que sa rentabilité pour l'exercice en cours serait conforme aux attentes du marché. Le groupe s'attend toutefois à un impact neutre des changes, alors que cet effet était positif jusqu'à présent. A Francfort, l'indice DAX a abandonné 1,70%, ou 209,07 points, à 12.100,08 points, tandis que le MDax a cédé 1,56% à 25.383,10 points. Deutsche Börse (+0,54% à 111,70 euros), Beiersdorf (+0,39% à 87,26 euros) et Vonovia (+0,36% à 39,55 euros) ont échappé à la correction généralisée. Commerzbank (-6,17% à 11,19 euros) a fini en queue de Dax, sur fond de repli des valeurs bancaires européennes. Deutsche Bank a cédé 2,98% à 11,65 euros après avoir déjà lâché plus de 5% la veille, alors que les comptes trimestriels de la banque s'annoncent moins bons que prévu. Bayer a cédé 1,42% à 93,03 euros au lendemain du feu vert européen à la reprise de Monsanto. HeidelbergCement a reculé de 2,33% à 79,76 euros, malgré son intention de distribuer un dividende en hausse de près de 20% à ses actionnaires. A Amsterdam, l'indice AEX a cédé 1,51% à 528,37 points. A la baisse, le sidérurgiste Arcelor Mittal a chuté 3,84% à 26,18 euros et la banque ABN Amro de 3,50% à 23,96 euros. A la hausse, le groupe de biotechnologies Gemalto a pris 0,34 percent à 49.60 euros et le brasseur néerlandais Heineken 0,33% à 85,60 euros. Madrid, l'indice IBEX a cédé 1,49% à 9487,40 points. Le secteur bancaire a fortement reculé (Banco Santander - 2,09% à 5,21 euros; BBVA -1,32% à 6,45 euros; CaixaBank -2,30% à 3,82 euros), tout comme les valeurs liées à l'acier (Arcelor Mittal -3,82% à 26,16 euros; Acerinox -1,81% à 11,65 euros). Les valeurs-phare de l'Ibex 35 sont également en baisse: Inditex (Zara) perd 1,36% à 25,46 euros et Telefonica 1,22% à 7,83 euros. Le groupe télécoms Cellnex est l'une des rares valeurs à termine dans le vert (+1,02% à 21,83 euros) aux côtés du gestionnaire autoroutier Abertis (+0,22% à 18,22 euros). A Milan, l'indice FTSE Mib a dégringolé de 1,85% à 22.398 points. Seuls Mediaset (+0,49% à 3,048 euros), Campari (+0,49% à 6,15 euros) et Yoox Net-a-porter (+0,05% à 37,78 euros) ont terminé la journée dans le vert. Dans le fond du tableau, Tenaris a perdu 6,12% à 14,19 euros, STMicroelectronics 4,79% à 19,385 euros, Exor 4,05% à 58,34 euros et CNH Industrial 4,01% à 10,17 euros.